La danse, en chantier…
«I listen, you see», une création chorégraphique du danseur et chorégraphe Hamdi Dridi, avec les danseurs Feteh Khiari et Houcem Bouakroucha, a été présentée dans le cadre de la 1ère édition des Journées chorégraphiques de Carthage, mercredi dernier à la Salle Le 4e Art de Tunis.
Cette toute dernière création ou performance signée Hamdi Dridi a été le fruit d’une collaboration entre trois théâtres : le Théâtre national tunisien, Bonlieu-Scène nationale et le Ballet national de Marseille. Elle a été présentée à l’occasion de la 1ère édition des Journées chorégraphiques de Carthage. Toujours en chantier, ce spectacle, qui tourne autour de trois travailleurs dans un chantier, met en avant le milieu ouvrier d’une façon général et explore les gestes quotidiens des ouvriers. Dans un chantier, le travail est mécanique, engendrant des gestes mécaniques et synchronisés. Cette conscience du corps assujetti au travail répétitif, à l’effort constant, à la pénibilité, est bien présentée dans cette création. La rencontre des trois protagonistes est «plus qu’un carrefour sonore, mais un lieu où l’épuisement permettra au geste du travailleur de se métamorphoser en danse». Les gestes répétitifs ont un caractère hypnotique et obsessionnel pour cette capacité à transformer les corps. Elle peut le mettre dans un état d’ivresse (la transe) comme le ramener à un état plus brut. Ces gestes quotidiens de l’ouvrier forment dans ce travail les mouvements chorégraphiques que chacun des danseurs interprète sur scène. La répétition agit pour le spectateur comme une berceuse que l’on répète pour apaiser, comme un soin intime. C’est la musique intérieure en chacun de nous réduite à son minimum, représentée sur scène par une enceinte acoustique suspendue au plafond par un fil que les protagonistes s’efforcent de le faire tenir en équilibre entre eux. «I listen, you see» est un chantier, «un espace de friction entre le geste et l’abstraction, le dramatique et l’ironique. Appuyés sur la densité du silence, des bruits et des contrastes musicaux, ils questionnent et secouent le corps de l’ouvrier, le révèlent comme un patrimoine méconnu, souvent caché, mais vivant». Une pure performance, une suite d’actions qui se veut ultimement une « parodie de construction ouvrière» tout autant qu’un défi physique, technique et artistique. A suivre !