La Presse (Tunisie)

VAR : quand l’oeil de Moscou intervient

- Par Jalel MESTIRI

La Coupe du monde 2018, c’est aussi des décisions controvers­ées et de l’optimisme fortifié. En ce moment en Russie, l’assistance vidéo à l’arbitrage (VAR) est utilisée pour la première fois dans la plus prestigieu­se épreuve du monde. Si elle permet aux arbitres de se faire une idée plus précise sur de nombreuses actions, elle n’a pas éteint toutes les polémiques.

Après une première partie durant laquelle elle s’était fait une place discrète, offrant des arguments à ses défenseurs comme à ses détracteur­s, la VAR s’est brutalemen­t invitée à l’avant et a relancé les débats sur la place de la vidéo dans le football. Censée devoir rester dans l’ombre, sans se faire remarquer, elle a joué un tel rôle dans le dénouement dans certains groupes qu’il apparaît faramineux d’isoler tout autre intervenan­t. Elle a agacé les Marocains, permis à la France d’égaliser, frustré le Brésil de Neymar ou scandalisé les Serbes. Depuis le début de la Coupe du monde, la VAR, petit nom de l’arbitrage vidéo, alimente de nombreuses discussion­s et joue sur le scénario des rencontres, comme lors des dernières minutes d’Espagne -Maroc et d’IranPortug­al, matches qui ont déterminé l’issue du groupe B.

On craint que le football devienne un sport de séquences, façon foot américain, et perde de la dramaturgi­e tout en fluidité qui a bâti sa légende. On n’y est pas encore, mais l’idée qu’on y parvienne un jour est tout à fait dérangeant­e. L’une des questions centrales demeure celle de l’uniformité. La VAR seraitelle bénéfique uniquement aux « grands » ? Pourquoi est-elle intervenue sur certains joueurs, mais pas sur d’autres? Les fins de parties totalement hachées par le recours à la technologi­e ajoutent de l’eau au moulin des opposants à l’assistance vidéo. Un coup de coude, c’est carton rouge selon les règles. Les règles ne précisent cependant rien concernant Messi ou Ronaldo. Il faudra sans doute du temps pour que les esprits se fassent à la révolution.

Certes, il est bien des matches où l’outil a été utilisé à bon escient, dans le sens où il a permis de signaler des penaltys qui avaient échappé à la vigilance de l’arbitre. Depuis le début de la Coupe du monde, 20 ont été accordés, un record dans l’histoire du Mondial. Sur ce total, la vidéo a joué un rôle pour neuf d’entre eux. A terme, ça peut permettre de nettoyer les surfaces si les joueurs se sentent épiés. Ils sont mis face à leurs responsabi­lités et ils le savent.

Mais derrière les polémiques s’ouvre un débat bien plus vertigineu­x. La VAR est en passe de bouleverse­r en profondeur les codes du football. Penser que la vidéo allait mettre un terme aux polémiques relève du rêve. Aujourd’hui, on a déplacé les débats sur l’emploi et l’utilité de la VAR. Entre décisions incompréhe­nsibles, durée des matchs rallongée et injustices, elle a rappelé qu’elle était encore très imparfaite dans son utilisatio­n.

Problémati­que dans un Mondial : l’oeil de Moscou intervient. Le rituel est désormais connu. Ces quelques secondes d’hésitation qui s’étirent en longueur à chaque décision litigieuse. Ces joueurs qui se ruent sur l’arbitre en mimant un écran, démentant le vain espoir que le recours à la vidéo mette fin à toute polémique et offre davantage de sérénité à l’arbitre. Le doigt sur l’oreillette pour mieux échanger avec ses compères installés dans un car régie à des centaines ou des milliers de kilomètres du stade où tout se passe, où tout se vit, se respire et s’interprète différemme­nt, avec le filtre de l’instant. Puis ces mains qui forment un carré pour représente­r celui vers lequel l’arbitre se dirige à toute vitesse, dans l’espoir de faire durer le moins possible l’insoutenab­le attente pour les joueurs, les supporters et les téléspecta­teurs. Le débat enflammé entre partisans et opposants de cette nouvelle technologi­e, introduite pour la première fois en Coupe du monde, ne fait que commencer.

L’une des questions centrales demeure celle de l’uniformité. La VAR serait-elle bénéfique uniquement aux « grands » ? Pourquoi est-elle intervenue sur certains joueurs, mais pas sur d’autres? Les fins de parties totalement hachées par le recours à la technologi­e ajoutent de l’eau au moulin des opposants à l’assistance vidéo. Un coup de coude, c’est carton rouge selon les règles. Les règles ne précisent cependant rien concernant Messi ou Ronaldo. Il faudra sans doute du temps pour que les esprits se fassent à la révolution.

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