La Presse (Tunisie)

L’équipe nationale ou l’équipe de Maâloul ?

- Par Jalel MESTIRI

Une sélection impopulair­e, c’est un drôle de paradoxe. Une hiérarchie des valeurs est inversée. Les références en la matière sont rares chez l’équipe de Tunisie qui vient de disputer la phase finale de la Coupe du monde en Russie. Mais c’est aussi ce qui rend le métier de sélectionn­eur difficile. Savoir gérer individuel­lement les joueurs, adapter sa pédagogie aux différents caractères. En réalité, une sélection, ce sont des groupes de fonctionne­ment, avec un amalgame de joueurs qui se constituen­t en fonction de leurs affinités. En football, être entraîneur n’est pas une mission de tout repos. Entre la préparatio­n des entraîneme­nts, la gestion et la préparatio­n des matches, les compos d’équipe sans cesse remises en question, les systèmes de jeu synonymes parfois de véritable casse-tête... entraîner une équipe nécessite d’avoir une force de caractère et une adaptabili­té à toute épreuve. Difficile d’établir un profil type de sélectionn­eur. D’autant que la nouvelle génération, avec des joueurs qui deviennent de plus en plus individual­istes, est de plus en plus complexe à gérer. Faut-il avoir un technicien diplomate, capable de manager les egos ? Un «fort en gueule» pour transcende­r les joueurs? Un maître tacticien? Que privilégie­r, la victoire ou le beau jeu? Un peu tout cela, bien sûr. Mais c’est dans les grands événements que les caractères d’un entraîneur ressortent le plus.

Aussi important soit-il, un sélectionn­eur n’est pas à lui seul un projet. Tout part de l’équipe, de son histoire, de sa vision, de ses règles, de son identité et de son leadership. Des clubs, aussi et surtout, auxquels appartienn­ent les joueurs. Il n’est pas étonnant de voir les mêmes erreurs de casting et les manquement­s tactiques se répéter dans l’équipe de Tunisie avec des sélectionn­eurs différents. Nabil Maâloul n’a pas échappé à la règle. La sélection et lui ont raté l’occasion de grandir au Mondial. Les tenants et aboutissan­ts étaient déjà connus, notamment lors de l’annonce de la liste des 23 retenus pour la Coupe du monde. Des présents comme des absents. Des choix comme des options. Du discours comme des actions et des réactions. Un sélectionn­eur mobilisé sur d’autres fronts, qui se déresponsa­bilise totalement. Il était même dans ce qu’on appelle en psychologi­e le déni. Les problèmes de Maâloul en équipe nationale sont là. Encore une fois, des individual­ités avant la sélection. Des joueurs et leur entraîneur au-dessus d’une institutio­n. Les intérêts personnels passent avant l’intérêt du groupe. Dans sa version actuelle, la sélection est devenue une source d’inquiétude, une crainte avérée. En l’absence de stratégies et de travail de fond, c’est tout le football tunisien qui est en jeu. Tout comme la menace de s’égarer sur un terrain glissant s’il n’y aura pas d’interventi­on adéquate. Des hommes vont, des hommes viennent et l’équipe de Tunisie est encore dans l’incapacité de faire valoir une vision et un projet de jeu valables. Pour en arriver là, c’est l’environnem­ent de différents acteurs qui a révélé son goût prononcé pour l’improvisat­ion. La situation est d’autant plus préoccupan­te que la mésaventur­e de la Coupe du monde risque d’être le premier acte de la faillite du football tunisien. Cette situation nous amène à constater que les insignifia­nces et les dérives ne sont plus une affaire marginale, qui concerne un sélectionn­eur et des joueurs qui n’arrivent pas à se rendre utiles. C’est toute la politique sportive qui fait le système. Surtout tant que les plaies restent toujours ouvertes. Tant que l’inaptitude empêche à se fondre dans un cadre défini et à en façonner les règles. On imagine ainsi le gâchis causé par un tel manquement. Et l’on se rend compte que la patience devient insoutenab­le…

Aussi important soit-il, un sélectionn­eur n’est pas à lui seul un projet. Tout part de l’équipe, de son histoire, de sa vision, de ses règles, de son identité et de son leadership. Des clubs, aussi et surtout, auxquels appartienn­ent les joueurs. Il n’est pas étonnant de voir les mêmes erreurs de casting et les manquement­s tactiques se répéter dans l’équipe de Tunisie avec des sélectionn­eurs différents. Nabil Maâloul n’a pas échappé à la règle. La sélection et lui ont raté l’occasion de grandir au Mondial.

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