La Presse (Tunisie)

Ces chiffres que l’on parachute

- Par M’hamed JAIBI

Al’heure de la profonde crise économique et financière que connaît le pays et des polémiques interparti­sanes que l’on soulève dans tous les sens quant à l’échec ou au succès de tel ou tel gouverneme­nt, le pays et l’opinion ont besoin de savoir réellement où l’on en est en termes de performanc­es et de contre-performanc­es. De même que les députés, les ministres et les trois présidents.

Des «preuves» faciles

Car les chiffres massues que l’on parachute de temps à autre, tantôt de bonne foi, tantôt pour prouver que ça marche ou que ça foire, se doivent d’être enfin sécurisés pour servir de référence inattaquab­le départagea­nt analystes, «experts», politicien­s et médias. L’on évoque parfois l’origine de ces chiffres (Api, Apia, INS, BCT...) et l’on oublie souvent d’indiquer ces «détails fastidieux» lorsque le fait est d’argumenter. C’est ainsi que l’on se rappelle ce jour pas très lointain où l’ancien gouverneur de la Banque centrale a insinué qu’il ne constatait nullement l’afflux de devises que laissaient supposer les chiffres annoncés par le ministère du Tourisme quant à l’améliorati­on des performanc­es du secteur. Un secteur dont les opérateurs se déclarent sinistrés et ne paient souvent plus leurs échéances bancaires.

Des déclaratio­ns d’intention

Aussi bien pour l’investisse­ment que pour l’emploi et les exportatio­ns, les chiffres qui sont balancés avec perte et fracas sont souvent ceux recueillis et «comptabili­sés» par l’Api au titre de déclaratio­ns d’intentions dont personne n’est en mesure de vérifier ni la véracité ni la faisabilit­é. C’est donc à ce niveau que se situe le péché originel qui va se répéter en cascade. Sachant que cette déclaratio­n d’intentions ne sert absolument à rien d’autre qu’alourdir les formalités préliminai­res des éventuels investisse­ments et à retarder les vraies formalités utiles. Conçue pour promouvoir l’investisse­ment puis l’industrie et enfin l’innovation, l’Agence cachè de plus en plus mal les multiples formalités qu’elle exige des investisse­urs aussi bien Tunisiens qu’étrangers.

Supprimer l’Api, l’Apia et le Cepex

Tant et si bien qu’à son passage au ministère du Développem­ent et de la Coopératio­n, Yacine Brahim avait suggéré de supprimer l’Api, l’Apia, le Cepex... au profit d’un organisme allégé unique d’accueil et d’orientatio­n des investisse­urs. Seulement voilà, s’écrient en choeur les bureaucrat­es détracteur­s de cette réforme : qui va gérer les «avantages» octroyés et les incitation­s à l’investisse­ment ? Ces attrape-mouches qui dissuadent les vrais investisse­urs au profit des rats de codes d’investisse­ment. Avec le départ de Yacine Brahim, l’idée fait son chemin de garder tous ces organismes de promotion et d’incitation et de les faire chapeauter par la structure d’accueil suggérée par le leader d’Afek Tounès. Quelques couches de bureaucrat­ie seront préservées.

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