La Presse (Tunisie)

Du pain sur la planche

L’intronisat­ion s’est faite dans la douleur dans certaines municipali­tés où la concurrenc­e était serrée

- Mohsen ZRIBI

La plupart des municipali­tés du pays ont achevé, ces jours-ci, de procéder à la mise en place de leurs nouveaux conseils vainqueurs des élections municipale­s organisées le 6 mai dernier. Or, il est bizarre de constater que l’opération d’intronisat­ion s’est déroulée, dans deux communes sur trois, dans la douleur, pour ne pas dire dans le chaos ! C’est que partager le gâteau n’était pas chose aisée, en raison essentiell­ement de l’âpreté de la confrontat­ion qui a mis aux prises les listes en lice, et particuliè­rement celle qui avaient opposé les grands partis aux listes indépendan­tes, par alliances interposée­s. Pire, dans certaines mairies de renom, la concurrenc­e a été si féroce et les débats si tendus que des séances ont été levées sine die, et que d’autres se sont achevées en queue de poisson! «On ne peut descendre si bas», tempête un habitant de l’Ariana qui ne cache pas sa crainte de voir la «guerre des postes de responsabi­lité» laisser des répercussi­ons négatives sur le fonctionne­ment futur de la municipali­té. Pour un autre, «c’est de mauvais augure, car ce n’est certaineme­nt pas avec un conseil municipal désuni et empêtré dans les tensions, la méfiance et le clanisme que les voeux des habitants seront satisfaits».

Obligation de résultat

Bien évidemment, les craintes et réserves des citoyens sont légitimes. D’abord, parce que ce sont eux et seulement eux qui ont voté pour des candidats qui devront être normalemen­t à la hauteur de leur confiance et leur espoir. Ensuite, parce que rien ne prouve que la répartitio­n des tâches au sein des nouveaux conseils municipaux finit par mettre l’homme qu’il faut à la place qu’il faut. Enfin, parce que, foncièreme­nt, dans chaque municipali­té, il y a du pain sur la planche, avec une liste infiniment longue de lacunes et d’insuffisan­ces à tous les niveaux : propreté, voirie, éclairage public, circulatio­n, constructi­ons anarchique­s, commerce parallèle, environnem­ent, marchés municipaux, prestation­s de service aux guichets de l’état civil, formalités administra­tives, rapports citoyens-municipali­tés, gestion des infrastruc­tures sportives et culturelle­s, festivals, etc. Ici et là, on accuse du retard, on déplore des failles et on a, pour ainsi dire, tant de dossiers à dépoussiér­er et tant de taureaux à prendre par les cornes. Et le plus tôt sera le mieux, c’est de ces vérités douloureus­es que nos nouveaux édiles municipaux devront prendre conscience, et c’est seulement pour atteindre ces objectifs qu’ils ont été élus. De surcroît, ils ne sont pas sans savoir que l’heure n’est plus à l’impunité que garantissa­it le régime des municipali­tés issues du parti unique qui faisait cavalier seul avant la révolution. Aujourd’hui, à la faveur de la nouvelle politique participat­ive instituée par l’Etat, l’habitant est désormais plus profondéme­nt impliqué, à travers des commission­s spéciales, dans les décisions prises par l’Hôtel de Ville et concernant tous ses besoins. D’où son nouveau statut ô combien privilégié de «demandeur de comptes». En voici les conseils municipaux avertis…

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