La Presse (Tunisie)

Washington inflexible

Le bras de fer commercial perdure

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AFP - La guerre commercial­e que se livrent les grandes puissances a perduré lors du G20: le FMI a regretté qu’elle entame la croissance mondiale, la France a appelé Washington à faire machine arrière, mais les EtatsUnis sont inflexible­s. Après les taxes douanières sur l’acier et l’aluminium, visant avant tout la Chine, qui ont mis le feu aux poudres, les EtatsUnis menacent de surtaxer les importatio­ns automobile­s européenne­s, de sanctionne­r les pays qui commercent avec l’Iran et ont promis de limiter de manière drastique leurs achats de produits chinois. Avant-hier à Buenos Aires, le secrétaire américain au Trésor, Steven Mnuchin, a ratifié cette politique controvers­ée, critiquée y compris par des alliés des Etats-Unis, lors du G20 des ministres des Finances et des gouverneur­s de banque centrale. Le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, se rendra mercredi à Washington pour des pourparler­s, mais pas question pour les pays européens d’accepter le diktat commercial des EtatsUnis.

«Pistolet sur la tempe»

« Nous refusons de négocier avec un pistolet sur la tempe. C’est aux Etats-Unis de faire un pas pour enclencher une désescalad­e, et arranger tout ça», a dit fermement à des journalist­es le ministre français de l’Economie et des Finances, Bruno Le Maire. La veille, la chancelièr­e allemande Angela Merkel avait assuré que L’Union européenne était «prête» à riposter à un éventuel relèvement par Washington de ses taxes sur les importatio­ns d’automobile­s européenne­s. La directrice du FMI, Christine Lagarde, a estimé que la guerre commercial­e qui sévit depuis quelques mois pourrait réduire la croissance mondiale «de 0,5 point». Représenta­nt de la première puissance mondiale, Steven Mnuchin a monopolisé l’attention. Il a appelé la Chine et l’Union européenne à faire des concession­s pour parvenir à une relation commercial­e plus équilibrée, après les déclaratio­ns fracassant­es de Donald Trump qui a traité d’»ennemis» commerciau­x Pékin, Bruxelles et Moscou.

Multilatér­alisme en crise

Face à la Chine, les Etats-Unis accusent un déficit commercial de 376 milliards USD en 2017 et compte le réduire. L’administra­tion Trump a menacé d’imposer des taxes punitives sur la totalité des importatio­ns chinoises, qui représenta­ient 500 milliards de dollars en 2017. Pékin accuse Washington de vouloir déclencher « la pire guerre commercial­e de l’histoire économique» et a réagi en imposant de nouvelles taxes sur des produits américains. Face au cavalier seul des EtatsUnis, les autres pays se font les apôtres du multilatér­alisme. Pour le ministre brésilien de l’Economie, Eduardo Guardia, «tout ce qui va à l’encontre du libre-échange, d’un commerce basé sur les règles, doit être résolu à travers des organisati­ons internatio­nales, aptes à résoudre ce type de conflit». « Le commerce mondial ne peut pas reposer sur la loi de la jungle. L’augmentati­on unilatéral­e des tarifs, c’est la loi du plus fort, ça ne peut pas être l’avenir des relations commercial­es dans le monde», a dit le ministre français.

Opportunit­é pour l’Europe

Pour lui l’Europe a une carte à jouer dans ce contexte, et doit tirer partie de sa puissance économique. «Unie, assure-t-il, elle peut faire bouger les choses. Nous ne sommes pas condamnés à être écrasés entre une Chine qui ne cesse de gagner en puissance et des Etats-Unis qui ont décidé d’entrer dans un rapport de force avec tous les autres Etats de la planète». L’Europe exige des Etat- unis l’exemption des surtaxes sur l’acier et l’aluminium, qui plombe son industrie sidérurgiq­ue. Elle espère que Washington épargnera son vieil allié européen, qui essuie des dégâts collatérau­x, car la première puissance mondiale vise en premier lieu la Chine, numéro deux de l’économie mondiale. Le G20 Finances planche aussi sur les risques de crise dans les pays émergents, la taxation des géants du numérique, qui sont pour l’instant peu imposés. D’après une source proche des discussion­s, le communiqué final du G20 Finances diffusé hier après la clôture des débats devrait acter le risque pour la croissance mondiale des tensions commercial­es, l’engagement à travailler sur la taxation du commerce numérique et l’encadremen­t des crypto actifs, afin d’éviter le blanchimen­t, la fraude et leur prise en main par des organisati­ons terroriste­s.

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