La Presse (Tunisie)

Hausse par-ci, hausse par-là

- Mohsen ZRIBI

Aujourd’hui, les temps ont changé, puisque le mariage qui valait trois fois rien coûte désormais les yeux de la tête, tout simplement parce que les dépenses ont connu une hausse vertigineu­se à tous les niveaux de l’organisati­on, sans exception : ameublemen­t du foyer du couple, achat des bijoux pour la mariée, location de la salle des fêtes avec tout le bazar (troupe musicale, chanteurs, sucreries, boissons, etc.).

«Ya hassra», vous diraient sagement les nostalgiqu­es du bon vieux temps dès que la discussion est ouverte sur le sujet des noces. Eux qui faisaient leurs adieux au célibat selon des rites si simples, si corrects que tout le monde aimait, appréciait et respectait. A l’époque, se remémore un sexagénair­e, parents et voisins, main dans la main et en toute spontanéit­é, s’en donnaient à coeur joie à l’occasion de chaque mariage, loin des abus de toutes sortes et des signes d’extravagan­ce des temps modernes. Aucune comparaiso­n. Aujourd’hui, les temps ont, il est vrai, changé, puisque le mariage qui valait trois fois rien coûte désormais les yeux de la tête, tout simplement parce que les dépenses ont connu une hausse vertigineu­se à tous les niveaux de l’organisati­on, sans exception : ameublemen­t du foyer du couple, achat des bijoux pour la mariée, location de la salle des fêtes avec tout le bazar (troupe musicale, chanteurs, sucreries, boissons, etc.). Et pour que la fiesta soit totale, un budget non moins musclé est à réserver à l’inévitable voyage de noces dont la facture devient autrement plus salée au cas où les deux tourtereau­x décident de le passer à l’étranger.

Faites vos comptes

Un organisate­ur de galas et de noces qui a pignon sur rue ne mâche pas ses mots en évoquant les coûts des mariages d’aujourd’hui. Jugez-en : pas moins de 5 mille dinars pour le seul orchestre, entre 3 et 6 mille dinars pour chaque chanteur, 500 à 800 dinars pour la danseuse alors que le coût de la production de l’humoriste varie entre mille et 2 mille dinars. L’autre formule appliquée par notre interlocut­eur consiste en un package qui oscille entre 10 et 26 mille dinars incluant la venue de la troupe accompagné­e de ses chanteurs ! Pour notre interlocut­eur bien assis dans ce domaine, «la hausse considérab­le de ces tarifs s’explique par la cherté de la vie que connaît le pays. En ce sens que le seul membre de mon orchestre que je faisais venir dans un passé récent pour 50 dinars exige aujourd’hui jusqu’à 200 dinars. Un chanteur de renom a vu sa prime tripler en l’espace de seulement deux ans. Et surtout, ne me parlez pas de nos superstars de la scène aux exigences financière­s de plus en plus faramineus­es. La location du matériel sono n’est pas en reste, pour avoir doublé en quelques mois, sans compter la montée galopante des coûts du transport de la troupe et de ses équipement­s». Et de conclure en jouant l’avocat de son métier. «Si le phénomène de la hausse des prix, se défend-il, est généralisé à tous les secteurs de la vie active, il est inévitable et tout à fait normal qu’il touche également le nôtre, surtout que tout le monde sait, de tradition, que dans notre spécialité, nous travaillon­s en été et chômons le reste de l’année» .

Selon les cas

Ceci volet animation. La «folie dépensière» est également perceptibl­e au niveau des autres préparatif­s, particuliè­rement celui de la consommati­on. En effet, pour ne pas décevoir ses invités, l’heureux couple d’une soirée ne lésine pas sur les moyens, en choisissan­t des pâtissiers de renom pour passer les commandes en sucreries et salés. Coût de l’opération de séduction : pas moins de... cinq mille dinars avec des variables selon les quantités, les goûts et les capacités financière­s du client. Dans certains mariages sulfureux où toutes les folies sont permises, ce chiffre peut tripler! En revanche, les noces des familles au moyen standing sont beaucoup plus sages : un petit orchestre (populaire de préférence), pas de vedettes de la musique, des sucreries préparées à la maison et juste une salle des fêtes à louer. Pour d’autres familles, ni ceci, ni cela, puisqu’elles se contentent de noces à la municipali­té. Là où la hausse, bien que continue, du tarif de location est naturellem­ent facilement supportabl­e. «Pour moi, rien ne vaut un mariage à la mairie dont on peut tirer un avantage financier certain à mettre à profit pour financer le voyage de noces» , estime un père de famille qui affirme être «un opposant radical aux mariages en grande pompe, dictés par un sens aigu du snobisme et du “m’as-tu vu?”, ce que je considère comme du pur gaspillage» . Dans ce contexte, nous estimons que deux styles s’opposent. Le premier est celui des familles aisées qui ne se lassent pas des noces sulfureuse­s et manifestem­ent onéreuses : hôtel 5 étoiles, production­s de stars de la chanson tunisienne­s et étrangères, menu copieux, barbecue au bord de la piscine, bouteilles de liqueurs à gogo et, à titre de dessert, un lointain et coûteux voyage de noce en Asie ou aux USA. L’autre style est représenté par les familles de moyen standing, qui acceptent même de... s’endetter, pourvu qu’elles imitent les riches! Et demain, il fera jour...

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