Téhéran sous la «pression maximale»
EVOQUANT l’escalade verbale à laquelle on assiste actuellement entre les Etats-Unis et l’Iran, le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, a laissé récemment entendre que Donald Trump adoptait la même stratégie que Kim Jung-un : «... il attaque, il prend des mesures fortes et après il propose de discuter». Cette déclaration survenait après que l’Administration américaine eut adressé une invitation — indirecte — aux responsables iraniens afin qu’ils entament avec eux des négociations qui seraient, en quelque sorte, la reprise de celles qui ont débouché en 2015 sur le fameux accord nucléaire.
Nous savons que Donald Trump avait, dès sa campagne électorale, dénoncé cet accord, à cause duquel il a réservé à son prédecesseur, Barack Obama, des critiques acerbes. Passant des paroles aux actes, il a rétabli au début du mois de mai dernier le système des sanctions qui prévalait avant l’accord, obligeant toutes les entreprises étrangères ayant des relations commerciales avec les EtatsUnis à cesser de faire des affaires avec l’Iran, sous peine d’interdiction de son territoire à leurs activités économiques.
Cette mesure, qui a attiré sur elle les critiques du monde entier ou presque, parce qu’elle est un cas de violation d’un engagement clair, pris en commun sous la supervision de l’Organisation des Nations unies, est pourtant en train de produire ses effets néfastes sur l’économie iranienne. La monnaie a connu récemment une chute vertigineuse et l’on parle d’une dépréciation de 18% face au dollar pour les seules deux journées du début de la semaine... Cette évolution inquiétante est sans doute liée à l’imminence de l’entrée en vigueur des mesures américaines à l’encontre des entreprises étrangères, mais elle donne quand même une idée de l’ampleur des dégâts...
L’invitation américaine à la négociation s’inscrit dans le prolongement de cette action d’asphyxie économique, que les accords de partenariat avec nombre de pays asiatiques n’aura pas suffi à neutraliser. Mais les effets escomptés par Washington risquent de ne pas suivre... Pour l’instant, la réponse des Iraniens demeure fermement négative : «L’Iran ne peut pas négocier avec quelqu’un qui viole ses engagements internationaux, menace de détruire des pays et change constamment de position», résume un professeur qui fut membre de l’équipe des négociateurs iraniens de l’accord de 2015.
Le ministre iranien des Affaires étrangères est dans le même état d’esprit : «Les menaces, sanctions et effets d’annonce ne fonctionneront pas... Essayez le respect des Iraniens et des engagements», a-t-il écrit dans un tweet.
Bref, tout porte à croire que la tentative d’engager des discussions de la part des Américains ne fait pour l’instant qu’aggraver un blocage que l’on a observé depuis plusieurs mois. Mais ce qui est digne d’attention, c’est que Téhéran ne semble pas se laisser tenter par la réponse du pire, qui consisterait à renoncer à son tour à ses engagements. Ce qui, il faut bien le dire, lui confère une crédibilité diplomatique qui pourrait ouvrir le champ des possibles en matière de nouvelles négociations... Mais sûrement pas sous la «pression maximale» d’une politique qui cherche à lui faire rendre gorge.
tout porte à croire que la tentative d’engager des discussions de la part des Américains ne fait pour l’instant qu’aggraver un blocage que l’on a observé depuis plusieurs mois. Mais ce qui est digne d’attention, c’est que téhéran ne semble pas se laisser tenter par la réponse du pire, qui consisterait à renoncer à son tour à ses engagements