La Presse (Tunisie)

Toujours dans le flou

- Khalil JELASSI

Les ouvriers de chantier, dont le dossier demeure bloqué depuis plusieurs années, peinent aujourd’hui à jouir des droits qu’ils réclament. Marginalis­ation de leur situation, conditions de travail précaires, salaires insuffisan­ts et avenir incertain, ces travailleu­rs sont dans le flou, mais continuent leur lutte.

En dépit de leur appellatio­n, les ouvriers de chantier n’exercent pas forcément dans des chantiers. Au contraire, ils sont nombreux à être rattachés à des administra­tions et des structures publiques assumant des tâches administra­tives et même techniques. Certains d’entre eux travaillen­t par exemple pour les municipali­tés, les gouvernora­ts, les hôpitaux, les établissem­ents éducatifs… Aujourd’hui, ces travailleu­rs, dont le dossier remonte à 2011 et qui reste encore bloqué vivent dans des conditions précaires et rencontren­t de grandes difficulté­s pour obtenir des droits qu’ils réclament depuis plusieurs années. Pour cause, des négociatio­ns avec la Présidence du gouverneme­nt qui, à chaque fois, n’aboutissen­t à rien. Retour sur les faits : ces ouvriers, représenté­s par le collectif des coordinati­ons des ouvriers de chantier, réclament notamment un recrutemen­t définitif mais pro- gressif dans la fonction publique à l’instar des autres fonctionna­ires de l’Etat, d’autant plus qu’ils assurent les mêmes tâches. Ils sont pourtant moins payés et surexploit­és comme ils l’affirment. C’est notamment le cas de Mohamed, fonctionna­ire au groupement de santé de base de Tunis Sud à Ouardia. Il est payé environ 300 dinars alors qu’il travaille à temps complet, sans aucune couverture sociale ni prime. «Que puis-je faire dans cette situation ? Je touche un salaire de 300 dinars. Il s’agit d’un salaire de misère pour un père de famille. Nous travaillon­s pour l’Etat comme si nous étions des travailleu­rs clandestin­s sans jouir d’aucun droit. Nous n’avons même pas accès à des couverture­s sociales» , témoignet-il. Ce cas n’est pas isolé, ils sont nombreux à être dans la situation de ce travailleu­r et ce qui complique la donne, c’est que le versement des salaires de ces ouvriers n’est pas régulier. Il connaît toujours des retards interminab­les. «Parfois je ne parviens pas à subvenir aux besoins de ma famille dès les premiers jours du mois, c’est une situation très délicate d’autant plus que notre dossier est bloqué depuis plusieurs années, nous commençons à perdre espoir face à ces fausses promesses de la part des autorités» , explique pour sa part Wiem, qui fait partie de ces travailleu­rs.

Des manifestat­ions en vue

A travers un bon nombre de mobilisati­ons protestata­ires survenues ces derniers mois, les ouvriers de chantier dénoncent notamment des intentions de vouloir marginalis­er leur dossier et proposer d’autres solutions « injustes » à leur égard. Dans ce cadre, deux propositio­ns ont été formulées par la présidence du gouverneme­nt lors d’une rencontre avec les représenta­nts de ces ouvriers, datée du 22 février 2018, la pre- mière concerne un régime de formation pour les moins jeunes, suivi de l’octroi d’un fonds d’investisse­ment équivalent à 36 salaires, tandis que la deuxième s’adresse aux ouvriers qui ont dépassé les 35 ans, leur offrant un à passage au régime de sous-traitance.* Aujourd’hui les ouvriers de chantier s’apprêtent à organiser de nouvelles formes de prestation­s pour exprimer leur ras-le-bol d’autant plus que les négociatio­ns entre l’Ugtt, partie qui représente ces travailleu­rs, et un comité relevant de la Présidence du gouverneme­nt sont au point mort, c’est en tout cas ce qu’a affirmé Mohamed Akermi, membre du collectif des coordinati­ons des ouvriers de chantier. Il dénonce notamment des conditions très difficiles qui menacent environ 47 mille personnes qui travaillen­t sous ce régime, une situation toujours dans le flou, comme il l’affirme.

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