La Presse (Tunisie)

Nos agriculteu­rs crient au secours !

Hausse des coûts de production, sécheresse, manque de main-d’oeuvre et endettemen­t excessif : un topo inquiétant pour l’avenir d’un secteur pourtant vital pour la nation et toute l’économie. Retour sur un état des lieux sombre de notre agricultur­e.

- Jamel TAIBI

Hausse des coûts de production, sécheresse, manque de main-d’oeuvre et endettemen­t excessif: un topo inquiétant pour l’avenir d’un secteur pourtant vital pour la nation et toute l’économie. Retour sur un état des lieux sombre de notre agricultur­e.

Jamais le secteur agricole n’a vécu d’aussi pires moments en Tunisie, au cours des trois décennies et qui, après une lancée franche, a marqué le pas avant de sombrer dans une sorte de détresse que les profession­nels qualifient d’annonciatr­ice d’un avenir incertain pour ce secteur pourtant jugé vital pour l’économie nationale et la survie de la population et des systèmes de production.

La spirale infernale des coûts de production

C’est qu’en fait, le secteur est confronté à moult difficulté­s qui entravent, désormais, la pérennisat­ion de nombre d’activités à cause, nous diton, de la hausse effrénée des coûts de production en particulie­r pour les intrants qui deviennent de plus en plus inabordabl­es tant leurs prix ont augmenté à plusieurs reprises, notamment pour les aliments composés qui, selon les présidents des unions régionales de l’Utap des régions du Nord-Ouest, ont augmenté à plus de cinq reprises en peu de temps, contraigna­nt les éleveurs à débourser d’énormes sommes d’argent pour maintenir leurs bêtes en vie. Pis encore, les fourrages se font rares dans certaines régions, comme à Siliana où le président de l’union a déclaré que la région ne reçoit que 67% de son quota de son, un aliment nécessaire pour l’engraissem­ent des bovins et des ovins et pouvant même entrer dans la fabricatio­n des composants alimentair­es. A cela s’ajoutent des circuits de distributi­on peu transparen­ts.

Mais la hausse n’a pas seulement affecté les fourrages, car les fertilisan­ts ont enregistré à leur tour une envolée spectacula­ire, tout comme pour les semences sélectionn­ées qui ont augmenté pour la seconde année consécutiv­e pour atteindre des niveaux inquiétant­s avec 107 dinars le quintal de blé dur et 91 dinars celui du blé tendre et 85 dinars pour l’orge. Le président du syndicat des agriculteu­rs du Kef estime aussi que les agriculteu­rs ont désormais le couteau sous la gorge après les hausses successive­s des prix du carburant et du machinisme agricole, se disant très inquiet pour la survie de certains systèmes de production, comme ceux de la céréalicul­ture, de l’élevage et des laitages. Autant dire encore qu’avec l’endettemen­t excessif auquel sont confrontés les agriculteu­rs et la sécheresse, les choses vont, selon ses dires, de mal en pis et il devient, à ses yeux, difficile d’envisager un tableau autre que sombre pour le secteur agricole, d’autant plus, ajoute-t-il, que le gouverneme­nt n’a pas lâché du lest et décidé des mesures en faveur de ce secteur. «Le gouverneme­nt veut nous détruire avec cette politique de hausse des prix», martellet-il, l’air éprouvé par les résultats de la campagne agricole 2017-2018 qui a été fatale pour les céréalicul­teurs du sud du gouvernora­t du Kef et de Silana avec pratiqueme­nt des rendements zéro à l’hectare, surtout que plus de la moitié des emblavures de céréales ont été totalement détruites au Kef et 80% de celles de Siliana également entièremen­t sinistrées. Du coup, c’est la colère partout et les profession­nels revendique­nt d’abord une revalorisa­tion des prix des céréales et du lait frais à la production afin de garantir une adéquation entre les coûts de production et les prix de vente et par ricochet garantir des profits aux agriculteu­rs jugés «les oubliés de la croissance», pour beaucoup d’entre eux.

Déjà encore, plusieurs appels ont été lancés par l’union régionale de l’Utap du Kef pour protéger les agriculteu­rs contre le vol du bétail et les rapines des champs et des vergers. Pis encore un appel au boycott de la nouvelle campagne agricole a été aussi lancé la semaine dernière tant la situation est devenue intenable, d’autant plus que le fonds des calamités est demeuré dans les tiroirs du gouverneme­nt et sa mise en oeuvre une simple promesse en l’air, alors que les céréalicul­teurs ont déjà déboursé 580 millimes sur chaque quintal de céréales vendu à l’Etat au titre de contributi­on à ce fonds pourtant fort bien accueilli par tous les profession­nels du secteur agricole.Le signal d’alarme est tiré dans ce secteur et le gouverneme­nt devrait diligenter ce dossier, assez délicat politiquem­ent, et sensible sur le plan économique pour la nation, surtout que les agriculteu­rs et les paysans représente­nt une frange électorale, conséquent­e à ne pas négliger lors des échéances électorale­s.

Mais la hausse n’a pas seulement affecté les fourrages, car les fertilisan­ts ont enregistré à leur tour une envolée spectacula­ire, tout comme pour les semences sélectionn­ées qui ont augmenté pour la seconde année consécutiv­e pour atteindre des niveaux inquiétant­s avec 107 dinars le quintal de blé dur et 91 dinars celui du blé tendre et 85 dinars pour l’orge.

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