La Presse (Tunisie)

Déboires et misères des oubliées de la croissance

- Jamel TAÏBI

En dépit des différente­s mesures et lois promulguée­s en sa faveur, la femme rurale vit dans des conditions difficiles et précaires

On l’a toujours dit et répété : «L’exemple vient toujours de la femme». C’est un adage encore vivace qui illustre, on ne peut plus, tous les sacrifices consentis par les femmes qui pour rendre leurs foyers gais, qui pour venir en soutien matériel à leurs ménages, ou encore pour garantir une bonne éducation à leurs enfants.

C’est qu’en fait, au-delà du clivage qui véhicule les rapports des deux mondes rural et urbain, c’est toujours la femme rurale qui se trouve confrontée aux tâches les plus dures dans sa vie, partant de l’ensemble des obligation­s familiales, sociales et éducatives dont elle est en charge sa vie durant. Et pourtant, en dépit des différente­s lois promulguée­s en faveur de la femme tunisienne, la femme rurale demeure incontesta­blement sujette à tous les mépris et autres difficulté­s de la vie qui consacrent les écarts d’inégalité entre le monde urbain et le monde rural dans notre pays.

Au regard de la réalité toujours cruelle du monde rural avec toutes les contrainte­s coercitive­s qui commencent par l’entretien du ménage, le confort de l’éducation des enfants dans la mesure du possible, le dévouement envers un mari parfois capricieux et l’exercice de tâches ingrates dans les champs où elle effecute les transactio­ns les plus délicates du travail, en l’occurrence, le travail de la terre, l’entretien des bêtes, l’arrosage des cultures, le tout conjugué aux activités ménagères de tous les jours, au point qu’il ne lui reste que peu de temps pour s’occuper d’elle-même, naturellem­ent quand elle aura accompli toutes les tâches requises.

Comporteme­nt injuste

C’est, en tout cas, ce qui ressort de toutes les statistiqu­es relatives au travail de la terre, à la violence contre la femme, aux calculs des revenus et à l’entretien des ménages où la femme rurale est souvent indiquée comme étant la plus grande oubliée de la croissance. C’est dire à quel point sa situation sociale est difficile et nettement au-dessous des attentes requises.

Rien qu’à regarder les champs dans les régions du Nordouest, et même ailleurs, pour constater cette activité fébrile dont fait la preuve femme pour travailler la terre, récolter les fruits, cueillir les tomates ou les piments, prendre soin des cultures maraîchère­s ou encore surveiller et traire les vaches, le tout à ses risques et périls, sans assurance maladie, ni prime de transport ou de rendement et encore moins de salaire égal à celui de l’homme. Une simple escapade dans les champs de tomates à Jendouba, Siliana ou encore Kairouan, pour ne citer que ces trois régions, montre un comporteme­nt injuste généralisé à l’égard de la femme dont la condition est plus que misérable. Et même si l’on a inscrit, comme obligation, la femme rurale dans tous les projets de développem­ent intégré, sa part du gâteau demeure dérisoire, car seules quelques activités sont dispensatr­ices de bienfaits pour la femme, rurale active dans plusieurs secteurs (cunicultur­e, élevage ovin et bovin laitier). Face à cette situation de précarité, le milieu associatif s’est élevé pour stopper cette misère dont souffre la femme rurale et a constitué nombre d’associatio­ns de la femme rurale à Jendouba et au Kef et d’associatio­ns des femmes artisanes, et ce, dans le but de favoriser un meilleur climat de promotion sociale et financière de l’élément féminin et de promouvoir le travail et de l’humaniser de manière à rompre avec cet état des lieux très douloureux de l’activité féminine en particulie­r dans le secteur agricole où avec les nouvelles décisions du gouverneme­nt, l’on espère une véritable resurgence de la situation de la femme dans le monde rural et un rétablisse­ment de tous les droits en faveur de la gent féminine, en lui fournissan­t les conditions appropriée­s pour son transport, sa couverture sociale et un salaire à la mesure des efforts, sans négliger le congé payé, le congé de maladie ou de maternité. Mais ce qui est perceptibl­e, c’est que le chemin du salut est encore long dans ce domaine en ce que la femme rurale a toujours été déconsidér­ée et déclassée et elle le demeurera encore davantage le temps de changer les mentalités et les attitudes envers cette catégorie de notre société.

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En dépit des différente­s mesures et lois promulguée­s en sa faveur, la femme rurale vit dans des conditions difficiles et précaires
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