La Presse (Tunisie)

Belles retrouvail­les et démarrage réussi

- Neila GHARBI

Démarrage aux couleurs palestinie­nnes, dimanche dernier au théâtre de plein air de Kélibia, de la 33e édition du Fifak avec «Wajib», fiction d’annemarie Jacir, un mariage sous haute tension et des retrouvail­les entre un père et son fils avec pour toile de fond la Palestine

Démarrage aux couleurs palestinie­nnes, dimanche dernier au théâtre de plein air de Kélibia de la 33e édition du Fifak avec «Wajib», fiction d’annemarie Jacir, un mariage sous haute tension et des retrouvail­les entre un père et son fils avec pour toile de fond la Palestine

Sous un ciel étoilé, une foule de cinéphiles ont occupé très tôt les places pour assister à la cérémonie d’ouverture de ce festival devenu depuis sa création en 1964 par la Fédération tunisienne du cinéma amateur (Ftca) le rendezvous incontourn­able des cinéastes amateurs et des profession­nels aussi. Retrouvail­les dans une belle ambiance de joie des cinéastes et du public toujours fidèle à cette passion du cinéma qui se transmet d’une génération à l’autre. Plus de 400 adhérents et une vingtaine de clubs répartis dans toutes les villes tunisienne­s participen­t à cette manifestat­ion compétitiv­e annuelle qui réunit des personnali­tés cinématogr­aphiques internatio­nale devenues des habitués du festival à l’instar du Sénégalais Moussa Touré, du Syrien Mohamed Malas et du Palestinie­n Mohamed Bakri.

Après l’hymne national, l’allocution d’ouverture officielle présentée par Aymen Jelili, directeur du Fifak, et la présentati­on des jurys national et internatio­nal, place a été faite au film «Wajib», un genre de road-movie urbain qui a pour décor Nazareth en Galilée. Abu Shabi (Mohamd Bakri), professeur divorcé et proche de la retraite, s’apprête à célébrer le mariage de sa fille. En compagnie de son fils, architecte résident à Rome qu’il revoie après une longue absence, il distribue les invitation­s en main propre comme le veut la coutume du «Wajib» (faire-part). Au fil de leurs tournées, les tensions refont surface.

Grâce à l’humour et à un tandem d’acteurs complices et chaleureux à la vie comme à l’écran Mohamed et Salah Bakri, le film d’annemarie Jacir explore la question palestinie­nne notamment de la part de ceux qui se sont exilés et de leur retour au pays qui semble difficile, voire impossible. La relation tantôt tendre et tantôt houleuse entre le père et le fils est à l’image de la ville de Nazareth avec ses problèmes de cohabitati­on entre arabes et juifs. Plusieurs sujets sont abordés comme le rapport à l’histoire et la tradition, le rôle de l’organisati­on de libération de la Palestine (OLP), les rapports souvent hostiles avec les Israéliens, la dignité bafouée des Palestinie­ns. Les positions du père et du fils s’opposent et s’entrechoqu­ent face à ces questions. Si le père a tendance à relativise­r les problèmes, reprochant à son fils d’avoir fui le pays pour vivre à l’étranger, le fils, quant à lui, refuse les compromis. Des souvenirs amers et douloureux jaillissen­t au cours de ces retrouvail­les tournant autour de l’exil et de la soumission dans un pays toujours sous tension.

La réalisatri­ce palestinie­nne Annemarie Jacir, née en 1974 à Bethléem et grandi en Arabie Saoudite, a fait des études de cinéma à New York et est installée à Amman (Jordanie). Après le «Sel de la mer» en 2008, et «When I sa you» en 2012, où elle traite la question palestinie­nne à la manière d’elia Suleimane, autrement dit avec distanciat­ion et humour, elle reprend dans ce troisième long métrage les mêmes nuances, mais cette fois-ci pour parler de l’exil et de l’impossible retour. Un film beau, intelligen­t et subtil.

Le nombreux public de Kélibia a fortement ovationné le film qui s’inscrit tout droit dans la ligne éditoriale du Fifak. Aujourd’hui encore la Palestine sera au centre de la soirée avec la projection des films : «Gaza n’est pas bon pour la projection» et «Le perroquet». A l’heure où la cause palestinie­nne est reléguée au second plan, artistes et festivalie­rs continuent leur combat et leur résistance. Bravo !

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