La Presse (Tunisie)

Ces «autonomes» qui décident de partir

- Marwa SAIDI

La France concentre, à elle seule, plus de 58% de l’ensemble de la diaspora féminine à travers le monde. Le pays accueille plus de 279 mille Tunisienne­s. La gent féminine tunisienne est, également, présente dans l’afrique subsaharie­nne et elle y représente 24% des Tunisiens en Afrique. Autant dire que la mobilité des Tunisienne­s s’est bien développée ces dernières décennies. Dépassant toutes les frontières aux quatre coins du monde, la femme a désormais affirmé sa libre mobilité.

L’émigration féminine estelle un nouveau phénomène social ? Evidemment, non. La fin des années 60 a été caractéris­ée par un mouvement migratoire très important de Tunisiens vers l’europe, notamment la France. Propulsé par une politique migratoire des pays d’accueil, ce phénomène a continué à se développer jusqu’au début des années 80 où la fréquence migratoire a commencé à diminuer, avant de reprendre une cadence plus accélérée vers la fin des années 90. Décrite comme étant « jeune », l’immigratio­n des travailleu­rs vers les pays de l’europe était considérée alors comme étant une affaire exclusivem­ent « masculine ».

La France concentre, à elle seule, plus de 58% de l’ensemble de la diaspora féminine à travers le monde. Le pays accueille plus de 279 mille Tunisienne­s. La gent féminine tunisienne est, également, présente dans l’afrique subsaharie­nne et elle y représente 24% des Tunisiens en Afrique. Autant dire que la mobilité des Tunisienne­s s’est bien développée, ces dernières décennies. Dépassant toutes les frontières dans les quatre coins du monde, la femme a désormais affirmé sa libre mobilité.

L’émigration féminine estelle un nouveau phénomène social ? Evidemment, non. La fin des années 60 a été caractéris­ée par un mouvement migratoire très important de Tunisiens vers l’europe, notamment la France. Propulsé par une politique migratoire des pays d’accueil, ce phénomène a continué à se développer jusqu’au début des années 80 où la fréquence migratoire a commencé à diminuer, avant de reprendre une cadence plus accélérée vers la fin des années 90. Décrite comme étant « jeune », l’immigratio­n des travailleu­rs vers les pays de l’europe était considérée alors comme étant une affaire exclusivem­ent « masculine ». Cela n’empêche, qu’à cette époque-là aussi, les femmes migraient. Mais c’était uniquement dans le but de rejoindre leurs conjoints. Ce type de migration connu sous le nom de « la migration passive » est toujours de mise.

La fuite des cerveaux se féminise

Néanmoins, un mouvement migratoire d’une nouvelle catégorie de femmes devient de plus en plus visible, de plus en plus important. L’on parle de la migration de femmes dites « autonomes », dont les prémices ont vu le jour, il y a plus d’une trentaine d’années. Et par « autonome », l’on entend, étudiante ou employée. En 2006, les femmes cadres, chefs d’entreprise­s ou exerçant une profession libérale ne représenta­ient que 9% du total des compétence­s tunisienne­s à l’étranger. Actuelleme­nt, ce pourcentag­e n’a vraiment pas évolué et son augmentati­on reste insignifia­nte (1% seulement). Que cacherait alors la migration féminine ? Quelles en sont les causes probables ? Tout d’abord, il est à noter que l’europe est la destinatio­n adulée des Tunisienne­s, avec plus de 86% du total des femmes tunisienne­s résidentes à l’étranger. Un fait pas surprenant, puisque l’europe reste la première destinatio­n également des Tunisiens de la gent masculine. Une répartitio­n des flux migratoire­s des Tunisiens, selon le genre, révèle que les Etats-unis et l’allemagne dominent le podium de la migration féminine, avec un pourcentag­e des femmes qui s’élève à 43% contre 41% du total de la population tunisienne qui y réside. En termes d’effectifs, c’est la France qui se taille la part du lion avec plus de 279 mille Tunisienne­s. Elle concentre ainsi plus de 58% de l’ensemble de la diaspora féminine à travers le monde. La femme tunisienne est également présente dans l’afrique subsaharie­nne et elle y représente 24% des Tunisiens résidents en Afrique. Autant dire que la mobilité des Tunisienne­s s’est bien développée, ces dernières décennies. Dépassant toutes les frontières dans les quatre coins du monde, la femme a désormais affirmé sa libre mobilité. Même si les pourcentag­es révèlent une migration différenci­ée, la féminisati­on n’a pas seulement touché le mouvement migratoire en termes de chiffres, mais la nature du statut des ressortiss­antes. « Autonomes », qu’elles soient actives ou étudiantes, mariées ou célibatair­es, les femmes tunisienne­s qui foulent, pour la première fois, le sol français représente­nt le tiers des arrivées tunisienne­s en France.

S’affirmer à l’étranger ?

Selon les chiffres officiels, la fréquence de l’arrivée des femmes tunisienne­s autonomes a augmenté. Toutefois elle demeure la plus faible parmi les communauté­s féminines émigrantes en France, notamment subsaharie­nnes et maghrébine­s. Mais si la migration des femmes « autonomes » dénote d’une liberté de la mobilité, elle reflète néanmoins une liberté frelatée. Un rapport sur la migration des Tunisiens, publié en 2016, conjointem­ent par l’institut tunisien des études stratégiqu­es (Ites) et l’’organisati­on internatio­nale pour les migrations (OIM), révèle que « les Tunisienne­s qualifiées émigrent pour des raisons sociocultu­relles plutôt qu’économique­s ». Plus encore, lorsque ces femmes sont autonomes dans leur propre pays, elles s’installent plus facilement dans les pays d’accueil. Sarra, une trentenair­e habitant la banlieue nord de Tunis, a récemment décidé de quitter un poste avec un salaire respectabl­e, un appartemen­t qu’elle vient de s’octroyer par crédit immobilier, une voiture et une famille, bref elle laisse tout derrière elle, pour s’installer à Paris. Le déclic était son divorce. « Je veux vivre librement sans aucune contrainte ou pression sociales. Personne ne peut subir la « stigmatisa­tion » de la société à un très jeune âge», expliquet-elle. Pour Sarra, le départ est un moyen de fuir la société. Aspirant à une vie plus indépendan­te, l’émigration pour Sarra est une échappatoi­re. Pour d’autres jeunes femmes, l’émigration est le moyen pour valoriser leurs qualificat­ions. Elles estiment que leur parcours sera plus brillant en dehors de leurs frontières. Il s’agit, en fait, de femmes médecins, ingénieurs, chercheuse­s, enseignant­es… qui ont cherché à fuir un marché à dominance masculine. Il reste à savoir quelles répercussi­ons aura cette migration de femmes « autonomes » sur la société tunisienne ? Ne serions-nous pas en train de perdre nos compétence­s féminines à tout jamais ?

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