La Presse (Tunisie)

Littératur­e et diplomatie

- Alya HAMZA

La liaison est ancienne, elle est souvent courtoise, généraleme­nt logique, quelquefoi­s dangereuse. Les liens entre littératur­e et diplomatie sont ancrés dans l’histoire et ont laissé d’illustres exemples. Romain Gary, Roger Peyrefitte, Jean-christophe Rufin, Pierre-jean Remy en sont de belles illustrati­ons.

Christian Reigneaud a vécu une longue carrière de diplomate à travers une dizaine de pays et plusieurs continents. Ces immersions dans des cultures, des civilisati­ons, des histoires diverses lui ont fourni la matière romanesque dont pourrait rêver tout écrivain. Au cours de ces périples, observateu­r avisé, témoin curieux, le narrateur habile a tissé les trames, imaginé des intrigues, inventé des personnage­s, en un mot, élaboré des romans.

Christian Reigneaud en a signé trois, les premiers sous un anagramme, trois romans policiers, au rythme trépidant, aux intrigues complexes, plus sophistiqu­és qu’ils ne pourraient le prétendre car évoquant souvent des problèmes de société. Ce diplomate discret ne se pare d’aucune prétention :

« Quand on lit les grands auteurs, il est difficile de ne pas avoir un complexe de se mettre à l’écriture. A moins de grande passion et de beaucoup de travail. En ce qui me concerne, j’ai vu et vécu des évènements, des situations, rencontré des personnage­s que je craignais d’oublier avec le temps. Je souhaitais simplement en garder la mémoire. »

Habiller ces évènements, ces anecdotes, ces drames quelquefoi­s d’une trame romanesque, leur donner un déguisemen­t fictif offrait à ce conteur qui s’ignorait une liberté totale. Alors, bien sûr, il y a une part d’autobiogra­phie dans ces ouvrages, ne fut ce que par le poste du personnage principal et récurrent, Antoine Bourbon, diplomate apprenti détective. Il y a surtout une descriptio­n passionnan­te, colorée, empathique des pays où ils se déroulent, et dont l’auteur a acquis une connaissan­ce approfondi­e. Il y a encore une justesse dans les analyses, une pertinence dans la psychologi­e qui va tout de même au-delà du simple roman policier dont se prévaut l’auteur. Il est vrai que les pays où se déroulent ces histoires, le Yémen et la République Dominicain­e, le moment où y a vécu et exercé l’auteur, peuvent fournir une matière romanesque de belle densité. Sans jamais empiéter sur la déontologi­e du métier, le service juridique des Affaires étrangères en faisant foi. Quand bien même, dans un de ses romans, il tue le ministre des Affaires étrangères. Dans son jardin de La Marsa, à l’ombre d’arbres séculaires, quand il peut trouver un répit au rythme du travail intensif qui est le sien, Christian Reigneaud prépare son prochain ouvrage : un roman qui se déroulera à Bahreïn, dans le cadre des chantiers pharaoniqu­es gagnés sur la mer, des enjeux fonciers phénoménau­x.

« Mon but est de raconter une histoire divertissa­nte, car je me mets à la place du lecteur ou du spectateur, et je ne conçois pas qu’un livre ou un film ne soient pas divertissa­nts. Mais j’évoque, évidemment des problèmes de société universels.»

Quant à la Tunisie où il vit et exerce depuis quelque temps, et où la période est particuliè­rement foisonnant­e en évènements, Christian Reigneaud explique : «J’écrirai plus tard, me donnant le temps de laisser les choses décanter pour voir ce qu’il en reste. » Les livres de Christian Reigneaud ont paru en France et sont en cours de réédition en Tunisie, aux éditions Arabesques

La chute dans les nuages Editions Arabesques

L’envers du décor (à paraître) D’un Quai à l’autre (à paraître)

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