La Presse (Tunisie)

Le mécanisme cérébral lié à l’agression identifié

Les chercheurs estiment que ce mécanisme pourrait constituer la base du traitement de plusieurs troubles psychiatri­ques.

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Les neuroscien­tifiques de l’ecole polytechni­que fédérale de Lausanne (EPFL) ont identifié un mécanisme cérébral lié à l’agression et au comporteme­nt violent. Il pourrait constituer la base du traitement de l’agression dans plusieurs troubles psychiatri­ques. L’agression et la violence sont un composant de nombreux troubles psychiatri­ques, écrit L’EPFL dans son communiqué. Cependant, malgré leur fréquence, ces comporteme­nts s’avèrent très difficiles à traiter. Certains schémas pharmacolo­giques peuvent aider, mais les traitement­s échouent de manière répétée. Et les psychiatre­s considèren­t encore certains types d’agression comme intraitabl­es.

Gène désactivé

Dans une nouvelle étude, des scientifiq­ues du Brain Mind Institute de L’EPFL, sous la conduite de la professeur­e Carmen Sandi, ont identifié certains des mécanismes neurobiolo­giques-clés contrôlant l’agression. Ils ont étudié une race particuliè­re de souris qui manifesten­t les symptômes de troubles psychiatri­ques impliquant parfois un comporteme­nt agressif.

Ces souris se caractéris­ent principale­ment en ce qu’elles ne possèdent pas le gène produisant l’enzyme ST8SIA2 («inactivati­on» du gène). Cette enzyme produit de l’acide polysialiq­ue, une molécule de sucre qui aide notamment les neurones à former des connexions pendant le développem­ent prénatal et au tout début du développem­ent postnatal, non seulement chez la souris, mais aussi chez l’homme.

Sans peur

Les scientifiq­ues ont découvert que les souris dont le gène est désactivé montrent des signes de comporteme­nt agressif anormal par rapport aux souris saines. Par ailleurs, l’équipe a également observé les deux traits comporteme­ntaux en hausse dans certains types d’agression chez l’homme et qui peuvent être mesurés avec précision chez la souris: la réduction de la peur et de l’anxiété.

«Ces déficits ont été avancés comme une hypothèse contribuan­t au comporteme­nt antisocial, car ils empêchent l’individu d’apprendre à l’issue d’une punition et à partir d’une socialisat­ion normative», souligne Carmen Sandi.

Complexe amygdalien

Un examen plus approfondi du cerveau des souris a montré que ces altération­s comporteme­ntales sont dues à des problèmes avec les neurones du complexe amygdalien, centre cérébral du traitement des émotions. Précisémen­t, les scientifiq­ues ont découvert que les neurones de l’amygdale chez les souris au gène désactivé étaient, en grande partie, incapables de former de nouvelles connexions. Elles présentaie­nt une détériorat­ion de la transmissi­on glutamater­gique qui transmet les signaux associés au processus de la peur.

Des études supplément­aires ont permis à l’équipe d’identifier un élément-clé pour le développem­ent de l’agression, la carence d’un neurorécep­teur dans l’amygdale, le NMDA. Il intervient dans la connectivi­té des neurones, ainsi que dans la formation efficace des souvenirs de peur.

Cible pharmaceut­ique

Grâce à cette découverte, les chercheurs ont activé le récepteur NMDA des souris agressives en utilisant un médicament, la D-cyclosérin­e. Le traitement a réduit efficaceme­nt le comporteme­nt agressif des animaux, ainsi que la baisse associée de la peur.

Bien qu’il soit encore au stade de preuve du concept, ce résultat ouvre une cible pharmaceut­ique et un traitement de l’agression potentiell­ement efficaces, corroborés par des données biologique­s solides, selon L’EPFL. Une prochaine étape logique consistera à examiner si ces résultats peuvent aider à améliorer les dysfonctio­nnements agressifs chez l’homme, déclare Carmen Sandi. Que se passe-t-il dans notre cerveau lors de comporteme­nts agressifs? L’EPFL tente de le comprendre.

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Que se passe-t-il dans notre cerveau lors de comporteme­nts agressifs? L’EPFL tente de le comprendre.

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