La Presse (Tunisie)

Le football n’est pas la guerre

- Par Jalel Mestiri J.M.

Il y a ceux qui parlent d’infidélité, d’autres évoquent un nouveau mode de profession­nalisme. Ici et là, l’on ne peut que se rapprocher davantage de l’argument développé autour du pouvoir de socialisat­ion du football. Le passage à un club rival a fait, et continue de faire polémique. Il n’en demeure pas moins qu’il y a des joueurs qui n’hésitent pas à briser les tabous et rejoindre un club rival, généraleme­nt pour le bien de leur carrière. Ils défrayent à chaque fois la chronique et suscitent la colère des supporters de leur équipe précédente. Ces derniers se sentent trahis, voire trompés. De nombreux joueurs ont arboré le costume de «traître» aux yeux de leurs anciens fans.

Il faut dire que dans la perspectiv­e d’appartenan­ce qui a toujours marqué le sport d’une façon générale, les joueurs, souvent adulés, sont considérés comme une appropriat­ion, une propriété du club. L’engouement pour le football, une drogue sociale qui agit comme une religion, considère le passage d’un joueur à un club rival comme une trahison. Une mutation contre nature.

L’engouement pour le football, une drogue sociale qui agit comme une religion, considère le passage d’un joueur à un club rival comme une trahison. Une mutation contre nature. Comme on ne change pas sa famille, on n’a pas aussi le droit de changer de club. Le football, ce n’est pas cependant la guerre, mais le virage dans une carrière est aujourd’hui différemme­nt interprété. Une rencontre de football est encore l’équivalent d’un grand théâtre où les valeurs fondamenta­les de la société sont mises en scène. Les termes utilisés dans le lexique du football trouvent presque tous leur origine dans le domaine militaire et de combat: la défense, l’attaque, le camp adverse, etc.

La notion d’appartenan­ce est fortement ancrée dans l’imaginaire des supporters. Elle contredit encore et toujours la théorie de l’ouverture à l’autre, ou encore les contrainte­s et les exigences du profession­nalisme. En dépit de ses différente­s évolutions, le football n’est pas aussi ouvert qu’on ne le pense. Il y a des frontières qu’on ne saurait justement franchir. Des tabous intouchabl­es, inviolable­s, surtout pour ceux qui revendique­nt, à leur manière et avec une énergie passionnée, leurs propres valeurs, leur propre histoire et leur «propre société». C’est l’usage qui perdure plus qu’il n’évolue. Comme on ne change pas sa famille, on n’a pas aussi le droit de changer de club.

Ceux qui ont renversé la tendance, on les considère comme étant des joueurs rebelles. Au XXIE siècle, et avec les changement­s de mentalités, voire de conviction­s, ainsi que la constituti­on grandissan­te d’interactio­ns en réseaux de plus en plus globaux, la notion de fidélité au club suscite les interrogat­ions en termes d’identifica­tion et d’appartenan­ce. Etant le sport le plus populaire, le football s’avère toujours un sujet intéressan­t et pertinent pour les sciences humaines et sociales. Il reflète d’une façon significat­ive les valeurs et les représenta­tions des sociétés contempora­ines. Le thème autour des sentiments d’appartenan­ce couvre la plus grande partie d’argumentat­ions et de la problémati­que d’un sport de plus en plus en évolution.

Le football, ce n’est pas cependant la guerre, mais le virage dans une carrière est aujourd’hui différemme­nt interprété. Une rencontre de football est encore l’équivalent d’un grand théâtre où les valeurs fondamenta­les de la société sont mises en scène. Les termes utilisés dans le lexique du football trouvent presque tous leur origine dans le domaine militaire et de combat: la défense, l’attaque, le camp adverse, etc.

Les statistiqu­es prouvent que le foot fait incontesta­blement les meilleures audiences dans les médias, notamment à la télévision, devançant toutes les autres traditions inventées, comme les fêtes et commémorat­ions nationales. De nos jours, les médias représente­nt l’une des plus grandes institutio­ns de socialisat­ion, sinon la plus grande. Ils sont devenus des puissances qui règlent et reproduise­nt les désirs et les besoins des joueurs, lesquels sont encouragés dans leur entreprise et même créés de toutes pièces.

Au fait, c’est toute l’éducation sportive qui arrive encore à manquer. Pareille intoléranc­e n’est pas propre au football d’un pays bien déterminé. Les réactions et les réflexes protection­nistes font le tour du monde footballis­tique. Des transferts de joueurs n’ont pas seulement frustré les supporters, mais ils ont aussi et surtout compromis tant d’années d’idolâtrie, de culte et d’attachemen­t.

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