La Presse (Tunisie)

Au foyer ou au travail, la femme doit encore se battre

Pour les femmes actives, les risques profession­nels restent une menace pour la grossesse car la spécificit­é foeto-maternelle dans les programmes de santé au travail n’est pas assez considérée. Les programmes de prévention ne comprennen­t pas d’approche spé

- Les programmes et les projets de DPE Sabrine AHMED

La petite enfance, période allant de la préconcept­ion à 8 ans, est une période capitale pour le développem­ent du jeune enfant, tant sur le plan de sa santé physique, que sur son développem­ent moteur, sensoriel, socio-émotionnel, cognitif et langagier. Faire bénéficier le jeune enfant d’un environnem­ent favorable et d’un bon départ, au cours de cette période de son existence dans laquelle son développem­ent est le plus rapide, ne peut que garantir des effets positifs. Des bénéfices qui profitent tant à lui (meilleur état de santé, bonne préparatio­n à l’école, meilleures performanc­es scolaires et sociales, davantage de rendement et de rémunérati­ons au travail une fois adulte) que pour la société (réduction des comporteme­nts à risques, réduction de la charge morbidité, augmentati­on de la productivi­té des travailleu­rs) Dans ce cadre, le ministère de la Femme, de la Famille et de l’enfance (Mffe) en collaborat­ion avec les ministères concernés, les représenta­nts des profession­nels du secteur privé et la société civile et avec l’appui technique et financier de la Banque mondiale et de l’unicef, a réalisé selon un processus participat­if et sur plusieurs étapes une analyse de la situation du développem­ent et de la protection de la petite enfance.

Situation de la famille et des futurs parents

La vie familiale est aujourd’hui caractéris­ée par la dynamique de l’émancipati­on de la femme engagée en Tunisie depuis plus de 50 ans ainsi que par les droits de la femme garantis dans la nouvelle Constituti­on. Toutefois, le taux d’illettrism­e des mères est encore élevé (26,4% notamment en milieu rural) et 12% des enfants vivent avec des mères qui n’ont jamais été scolarisée­s. Ces taux impactent les choix du modèle familial ainsi que l’éducation et le bien-être de l’enfant. Par ailleurs, et parmi les facteurs influant sur la vie familiale, on relève notamment une prévalence d’utilisatio­n de méthodes contracept­ives chez les femmes mariées en âge de procréer de 63%. Par ailleurs, 47,6% des femmes âgées de 18 à 64 ans ont déjà été victimes d’actes de violence dont 81,9% sont commis au foyer par le mari, la belle-mère, la belle-soeur ou même le fils. Dans un tout autre registre, l’étude démontre que le protocole de la consultati­on prénuptial­e, obligatoir­e à la conclusion du mariage pour les futurs conjoints et prévoyant des objectifs de dépistage des pathologie­s pouvant influer sur la procréatio­n et les futurs enfants, est souvent non respecté. Dans plusieurs situations, cette visite se traduit en une simple formalité administra­tive.

Anémie chez les femmes

L’étude montre également que le bilan sanitaire des parents est caractéris­é par l’épidémie d’obésité chez les femmes avec des prévalence­s de surpoids et d’obésité respective­ment de 25% et 16,6% chez les femmes âgées de 15 à 49 ans.

L’anémie est aussi une maladie qui inquiète les pouvoirs publics. En effet, elle persiste avec une prévalence élevée chez les femmes en âge de procréatio­n et les femmes enceintes aussi bien en milieu urbain qu’en milieu rural. Selon le rapport du ministère, les taux se situent entre 25 et 30%. La principale cause n’est autre que la carence en fer. Concernant les conditions de travail, les femmes âgées de 15 à 64 ans représente­nt 27% de la population active. Pour cette frange de la population, les risques profession­nels restent une menace pour la grossesse car la spécificit­é foeto-maternelle dans les programmes de santé au travail n’est pas assez considérée. La cartograph­ie de ces risques, non plus, n’est pas établie, les capacités de leur évaluation sont limitées et les programmes de prévention ne comprennen­t pas d’approche spécifique pour les femmes enceintes ou allaitante­s en cas d’exposition aux produits cancérigèn­es, mutagènes ou reprotoxiq­ues. Le cadre programmat­ique tunisien en faveur des droits des enfants est largement développé et constitue une priorité transversa­le à différents ministères selon leurs mandats respectifs. Il a permis de réaliser, grâce à son contenu et son approche, des progrès indéniable­s en matière de couverture de différents services de DPE (Droits de la Petite Enfance) en améliorant les taux nationaux et en réduisant les écarts entre les groupes d’âges, les milieux, les régions, le niveau socioécono­mique ou d’instructio­n. Même si, en la matière, la Tunisie est loin d’occuper la tête du peloton des pays émergents, elle se trouve en position relativeme­nt bonne par rapport à la plupart des pays en développem­ent.

Analyse des politiques

L’engagement de la Tunisie en faveur de la protection et du développem­ent des enfants a été concrétisé par la ratificati­on de nombreuses convention­s dans les domaines de l’enfance et de la femme, l’harmonisat­ion de textes nationaux et la mise en oeuvre de nombreux programmes et stratégies spécifique­s. La large panoplie de textes juridiques et programmes permet de saisir le souci de couvrir l’ensemble des piliers du DPE, ciblant aussi bien le petit enfant que sa cellule familiale. L’analyse axée sur les mesures législativ­es au niveau national se basant sur une revue des divers domaines organisés par la loi en relation avec le DPE a révélé que les dispositio­ns légales relatives à la préparatio­n de la procréatio­n protègent l’enfant à venir en préconisan­t le dépistage de certaines pathologie­s transmissi­bles et offrent un cadre adéquat à l’informatio­n sur la transmissi­on génétique ainsi que d’autres pathologie­s familiales. L’etat tunisien semble avoir opté pour des outils législatif­s qui favorisent un choix libre de procréatio­n.

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