Macif El Kiteb : au bonheur des enfants
«Le livre en villégiature» est une sorte de festival dédié au livre et à la lecture
Organisé par le service de motivation à la lecture relevant du commissariat régional aux Affaires culturelles à Sfax, Macif El Kiteb a touché, en l’espace de quatre jours, un millier d’enfants habitant à la Cité El Habib, une agglomération populaire déshéritée de la périphérie de Sfax, dépourvue de bibliothèque publique, de maison de la culture et de maison des jeunes. Installé à l’école primaire Cité El Habib 2, «Macif El Kiteb» ou «le livre en villégiature» est une sorte de festival dédié au livre et à la lecture. Forte d’une expérience concluante et couronnée de succès lors des précédentes sessions ciblant des cités populaires de Sfax, la manifestation conçue dans un esprit de discrimination positive est en droit de se prévaloir d’une nouvelle réussite sur les plans quantitatif et qualitatif. En effet, du 28 au 31 août dernier, un millier d’enfants ont participé aux différents ateliers programmés. Plus important, au-delà des chiffres, ce qui est réjouissant, c’est la douceur de l’ambiance, la réceptivité des enfants, leur bonne humeur communicative, la complicité régnante, voire la communion avec les encadreurs: «Rien n’est plus agréable, rien n’est plus émouvant que le sourire gracieux d’un enfant et que cet air candide, puéril, sincère et plein de charme d’un petit bout de chou qui arrive le matin, plein d’énergie, débordant d’enthousiasme, irradiant des ondes positives et qui distribue généreusement des bisous aux encadreurs. Il y a là de quoi quintupler vos forces, votre vitalité et votre courage, surtout que ces gamins sont déjà sur les lieux, avant même les heures d’ouverture !», s’écrie Naïla Berrajah, chef de service de la motivation à la lecture.
Mais instantanément rattrapée par l’arrière-goût quelque peu amer, laissé par cette expérience pourtant si exaltante, notre interlocutrice, l’air moins satisfait, fait part de sa déception: « Imaginez que plusieurs enfants déclarent n’avoir jamais mis les pieds dans une bibliothèque publique! D’ailleurs, le vocable arabe de «maktabah» aidant à l’amalgame, ces enfants confondent lamentablement entre bibliothèque et librairie! Je lance donc un appel pressant à l’adresse des ministres des Affaires culturelles et de l’education nationale pour qu’ils mettent à notre disposition un bus qui servira de bibliothèque ambulante afin que nous puissions organiser des visites de classe dans toute la région de Sfax».
On apprend à ce propos que les parents réjouis de constater l’engouement insoupçonné de leur progéniture pour ces activités saines, ludiques et enrichissantes, mais prenant conscience de l’absence d’infrastructure culturelle, ont exprimé le voeu de voir mis en place un noyau de bibliothèque à l’école primaire Cité El Habib 2, surtout que l’établissement dispose d’un local approprié.
Pour revenir à la manifestation proprement dite, disons que la chef de service de la motivation à la lecture auprès du commissariat régional aux Affaires culturelles ne cache pas sa fierté suite au succès remporté auprès du public des enfants : «A telle enseigne, que des directeurs d’autres écoles nous ont contactés pour inclure leurs établissements dans notre calendrier d’animation des écoles primaires».
Il faut dire que nombre d’ingrédients sont à l’origine de cette satisfaction générale. En premier lieu, la contribution spontanée des différents acteurs aux préparatifs et à la décoration des différents espaces clos ou en plein air : dès l’obtention de l’accord des autorités compétentes, le directeur de l’école primaire, Adel Chakroun, a fait entreprendre des travaux d’élagage des arbres de la cour de l’école, de nettoyage général et de badigeonnage pour égayer l’espace de la manifestation. Ce coup de neuf, est-il besoin de le préciser, est loin d’être un luxe, vu l’aspect global et l’état de vétusté des installations du bâtiment, livré à lui-même la nuit, se transformant en un repaire mal famé, théâtre d’orgies et autres scènes de débauches dument arrosées.
A son tour, l’équipe du service de motivation à la lecture s’est chargée de planter un décor attrayant dans les lieux, comme il sied à une aussi belle fête destinée à accueillir les enfants dans un cadre reposant, accueillant et agréable. Sans oublier la diffusion de l’information auprès du public dans les différents quartiers de la Cité El Habib, avant la tenue de Macif El Kiteb.
Quant au programme du Macif, il se décline en cinq ateliers présentés comme suit par Naïla Berrajah : «Il y a eu un atelier de lecture animé par un groupe de jeunes bibliothécaires frais émoulus, durant lequel les participants, libres de toute contrainte, choisissaient l’activité de leur choix qu’il s’agisse des activités de lecture, de dessin, ou de jeu de rôle en interprétant le rôle du personnage d’un conte. Le deuxième atelier, animé par Mme Yousra Abdelmouleh, professeur de français, était consacré à la traduction de contes (thème, version). Le troisième, celui du scrabble était dirigé par M.mustapha Mallek, professeur de français, également, et ancien animateur d’un club de scrabble, le maître d’oeuvre de l’atelier dédié au conte électronique n’était autre que notre collègue, M. Islam Ghorbel. Et enfin, l’animation de l’atelier de création a été confiée à M. Hafedh Dhieb, instituteur et auteur de contes pour enfants. En apothéose à toutes ces activités, les enfants ont produit des contes à partir d’un mot-clé préalablement choisi par eux-mêmes». Pour clôturer cette fête dédiée à la lecture, faute de moyens, quelques cadeaux ont été distribués dans chaque atelier, «Alors qu’on aurait souhaité donner une récompense à chaque enfant participant rien que pour le remercier pour sa présence et son assiduité», déclare Naïla Berrajah.