Une approche réconciliante
L’installation de l’artiste japonais Ken Matsubara à Dar Bayrem illustre à merveille l’idée de la sauvegarde du patrimoine et se détache du lot avec une approche qui se veut réconciliante entre le présent et le passé.
L’installation de l’artiste japonais Ken Matsubara à Dar Bayrem illustre à merveille l’idée de la sauvegarde du patrimoine et se détache du lot avec une approche qui se veut réconciliante entre le présent et le passé.
Interférence le Festival international d’art de lumière, a illuminé durant 4 jours les rues et autres bâtisses et monuments de la Médina de Tunis. Une très belle deuxième édition de cette biennale créée en 2016 par l’architecte tunisien Aymen Gharbi et Bettina Pelz et qui vient merveilleusement enrichir notre paysage culturel. A sa création, cet événement se voulait un projet communautaire qui a rassemblé autour de lui une équipe de bénévoles ambitieux et dynamiques, une équipe qui, depuis, s’est agrandie, ce qui a profité à l’organisation qui, soulignons-le, fut un succès. Cela s’est passé du 6 au 9 septembre avec la participation de 42 artistes venus des quatre coins du monde et réunis dans un seul et même lieu : la médina autour de laquelle ils ont pensé et construit, in situ, leurs oeuvres, installations et autres performances.
Au gré des lumières
Il y a d’abord l’idée de la préservation du patrimoine en donnant aux différents sites de la vieille ville un nouveau souffle pour en faire plus que les foyers d’un processus artistique, mais également les mettre en dialogue avec des approches contemporaines de l’art où la lumière, principalement, se fait outil et matériau. L’installation de l’artiste japonais Ken Matsubara à Dar Bayrem illustre à merveille cela et se détache du lot avec une approche qui se veut réconciliante entre le présent et le passé. Ses objets-films qu’il présente dans cette installation sont l’extension d’objets du quotidien (ici ce furent des objets en céramique de l’artisanat tunisien) via la projection. A travers ce moyen, il conçoit la matière photographique comme le mouvement du pendule entre présent et passé, entre expérience et mémoire. Son oeuvre dialogue entre le patrimoine (des objets en céramique tunisienne), la culture tunisienne et son héritage à lui à travers des bribes d’images projetées dont certaines représentent Hiroshima et le tsunami de 2011. L’installation d’art filaire ou «String art» intitulée «Mrabaâ» de Mouna Jemal Siala à Dar Haddad rejoint aussi cette idée. L’artiste a tissé des fils donnant forme à une sorte de grande toile d’araignée en motifs de l’art islamique. Le carré tournant, un motif de notre patrimoine que l’artiste voulait mettre en valeur, une manière de préserver ses hauts lieux du patrimoine à travers la symbolique de la toile d’araignée sur laquelle est projetée également de la matière. L’autre idée que véhicule cet événement est la sensibilisation à la question écologique. Certains artistes ont construit leurs oeuvres autour de cela. C’est le cas d’ursula Scherrer qui a collecté des mégots de cigarettes rencontrés lors de ses déambulations dans les rues de la Médina. Comme une fourmi laborieuse elle les a placés, in situ et tout au long de l’événement, autour de fils, se servant de bouteilles en plastique pour les dérouler et en faire un grand tapis... Autant d’espaces publics, des appartements privés, des bâtiments prestigieux et des sites investis par des artistes d’une grande créativité, de belles énergies, de belles rencontres, de la lumière mais aussi du son comme matériaux de construction et notre vieille ville rajeunie sous les mains de ces faiseurs d’images. L’événement gagnerait à explorer d’autres lieux de notre patrimoine.