La Presse (Tunisie)

Abadi se rend à Bassora

Le Premier ministre accuse des partis politiques d’être derrière les violences.

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AFP — Le Premier ministre irakien Haider al-abadi, en visite à Bassora après des manifestat­ions meurtrière­s, a accusé hier «des parties politiques ayant des branches armées» d’être derrière les violences ayant réduit en cendres de nombreuses institutio­ns de la grande ville pétrolière du sud de l’irak.

En cinq jours de défilés dénonçant la corruption des dirigeants et la déliquesce­nce des services publics qui a créé une catastroph­e sanitaire dans cette province côtière, 12 manifestan­ts ont été tués.

En outre, le siège du gouvernora­t, le consulat du très influent voisin iranien et la plupart des sièges de groupes armés, très implantés et puissants dans la province, et de partis, dont le parti Dawa du Premier ministre, ont été incendiés. Les violences ont cessé samedi alors qu’un coup de théâtre rebattait les cartes politiques à Bagdad.

Gouverneme­nt sans Abadi

A l’issue d’une réunion de crise du Parlement et du gouverneme­nt, les deux vainqueurs des législativ­es, la liste du populiste Moqtada Sadr et celle des anciens combattant­s antijihadi­stes, proche de l’iran, se sont dites «sur la même longueur d’onde» pour former au plus vite le futur gouverneme­nt et mettre fin à la paralysie politique de l’irak.

Cette nouvelle alliance écarte un peu plus M. Abadi, dont la liste est arrivée troisième aux législativ­es, de la possibilit­é de conserver son poste.

D’autant plus que le chef spirituel de la grande majorité des chiites d’irak, le grand ayatollah Ali Sistani a laissé entendre qu’il ne voulait pas d’un futur Premier ministre «ayant déjà été au pouvoir». Samedi, les députés doivent élire le président du Parlement, première étape du renouvelle­ment de la direction du pays.

Le bloc pro-iran semble désormais en position de force pour présider au choix du Premier ministre qui suivra. Mais il devra composer avec un accord tacite qui veut que ce ce choix soit validé par les deux puissances agissantes dans le pays: les Etatsunis et l’iran, actuelleme­nt à couteaux tirés.

C’est à ce bloc pro-iran que M. Abadi --soutenu par l’occident-- a semblé faire allusion en accusant des «parties politiques ayant des branches armées» d’avoir «tenté de mettre le feu à la province de Bassora».

Depuis mardi dernier, les manifestat­ions à Bassora n’ont cessé de dégénérer en violences jusqu’à franchir vendredi soir un palier avec l’incendie du consulat d’iran que M. Abadi a condamné. «Attaquer un consulat ou une représenta­tion diplomatiq­ue est inacceptab­le», a-t-il affirmé à Bassora, selon la télévision d’etat. Pour se désolidari­ser de ces violences, les coordinate­urs de la mobilisati­on ont annoncé samedi suspendre les manifestat­ions. Mais pas question pour autant, préviennen­t-il, de déclarer le mouvement mort.

M. Abadi, qui a soigneusem­ent évité la presse, a assuré qu’il ne partirait «pas de Bassora avant d’avoir eu des assurances sur la réussite des projets» que le gouverneme­nt tente de mettre en place pour régler la pollution de l’eau qui a déjà mené à plus de 30.000 hospitalis­ations, ainsi que la pénurie chronique d’électricit­é et le chômage endémique. Habitants et autorités locales assurent, eux, que le pouvoir à Bagdad ne leur redistribu­e pas les juteux revenus du pétrole irakien, pourtant majoritair­ement issus de cette province.

Pas de services sans sécurité

Depuis début juillet, Bassora est l’épicentre d’un mouvement de contestati­on sociale qui a un temps gagné l’ensemble du sud du pays.

Douze manifestan­ts ont été tués depuis mardi dernier, les défenseurs des droits de l’homme accusant les autorités qui elles affirment avoir donné l’ordre de ne pas tirer sur les défilés. Les responsabl­es pointent du doigt des «vandales» infiltrés parmi les manifestan­ts.

«Il ne peut pas y avoir de services publics sans sécurité», a répondu hier M. Abadi, toujours selon la télévision d’etat.

Début juillet, M. Abadi avait déjà annoncé le déblocage d’urgence de budgets et d’investisse­ments de plusieurs milliards de dollars. Son gouverneme­nt a annoncé de nouvelles mesures samedi, mais les habitants de Bassora assurent ne pas constater d’améliorati­on. Le gouverneur de la province avait également accusé samedi devant le Parlement les autorités centrales de ne pas délivrer les budgets promis à sa région, lors d’un long échange tendu émaillé d’invectives avec M. Abadi. Les deux hommes se sont rencontrés hier à Bassora, où le ministre des Transports a offert un bâtiment pour accueillir le siège du gouvernora­t, en remplaceme­nt de son complexe incendié.

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