Tous contre le viol des femmes et des enfants
En réaction à la recrudescence des viols ces derniers mois, l’association des femmes tunisiennes pour la recherche et le développement (Afturd) a organisé hier une manifestation sur la place de La Kasbah
En réaction à la recrudescence des viols ces derniers mois, l’association des femmes tunisiennes pour la recherche et le développement (Afturd) a organisé hier une manifestation sur la place de La Kasbah
Malgré la chaleur de ce mercredi 12 septembre, dès midi et quart une trentaine de femmes s’installent sur la Place de La Kasbah. Banderoles et pancartes à la main, elles sont venues dénoncer la multiplicité des crimes de viol ces derniers mois subis par les femmes et les enfants.
« Honte aux violeurs et non pas aux victimes », « Non à l’allégement de la peine des violeurs », « Besoin de programmes de prévention des agressions sexuelles dans les jardins d’enfants et les institutions éducatives », lit-on parmi les slogans brandis par les manifestantes.
La plupart ont répondu présentes à l’invitation de l’association des femmes tunisiennes pour la recherche et le développement (Afturd) lancée il y a quelques jours sur les réseaux sociaux pour une mobilisation générale. L’appel visait toutes les composantes de la société civile, les défenseurs des droits des femmes et des enfants et tous ceux et celles qui luttent contre les violences à l’égard des femmes et des enfants.
« Un drame qui peut arriver à n’importe qui. D’où la nécessité d’en parler pour que les victimes ne se murent pas dans le silence et la culpabilité », soutient Ivette, venue de Hammamet manifester sa solidarité avec le mouvement en compagnie de mari et amie.
Un appel aux autorités pour appliquer fermement la loi
« Tenir notre rassemblement de sensibilisation sur la Place de La Kasbah revêt une symbolique. Il s’agit d’une alerte lancée à l’adresse du gouvernement quant à l’urgence de la prise des mesures nécessaires contre ce fléau dévastateur », insiste Salwa Kennou, présidente de l’afturd.
Elle ajoute : « Les autorités doivent appliquer fermement la loi contre les violeurs, contrôler les récidivistes, protéger les populations vulnérables particulièrement dans les jardins d’enfants, les centres d’intégration sociale et les lieux de rééducation des handicapés, prendre en charge les victimes et mettre en oeuvre une stratégie de lutte contre ces crimes ».
Dans un précédent communiqué, L’ONG s’était inquiétée de la multiplication des crimes de viol des femmes et des enfants en Tunisie : « Des affaires de viols atroces, dont les derniers ont été perpétrés contre une enfant de trois ans à Gafsa et contre une fillette de huit ans agressée sexuellement par deux enfants de neuf et onze ans à la cité Ibn Khaldoun (Tunis), sans oublier le drame à Bir Al Ach (délégation de Goubellat) où une jeune fille de quinze ans a été enlevée puis violée par un groupe de délinquants et la mère et la grand-mère sauvagement agressées provoquant le décès de cette dernière ».
75 % des femmes ont subi une violence sexuelle dans l’espace public
Déjà en 2016, une étude du Crédif menée dans dix-huit villes différentes, sur un échantillon de 3.873 femmes âgées entre 18 ans et 64 ans, intitulée : « La violence fondée sur le genre dans l’espace public en Tunisie », avait révélé que 75 % des femmes ont subi une violence sexuelle dans l’espace public. Des agressions qui peuvent prendre selon l’étude des formes multiples : importuner, siffler, harceler dans les transports publics, se déshabiller devant quelqu’un, tenter de toucher, toucher, embrasser de force, faire des allusions à caractère sexuel...
Plus récemment, la Loi organique n° 2017-58 du 11 août 2017, relative à l’élimination de la violence à l’égard des femmes, a clairement défini le viol dans son article 227 nouveau. Il s’agit de : « tout acte de pénétration sexuelle, quelle que soit sa nature, et le moyen utilisé commis sur une personne de sexe féminin ou masculin sans son consentement. L’auteur du viol est puni de vingt ans d’emprisonnement. Le consentement est considéré comme inexistant lorsque l’âge de la victime est au-dessous de seize (16) ans accomplis ». La peine atteint la prison à perpétuité quand le criminel est un membre de la famille.
Pour l’afturd, ce rassemblement de sensibilisation fait partie d’une campagne nationale contre les crimes de viol, qui prévoit entre autres la diffusion de spots intitulés « Ne me touche pas » et l’organisation d’ateliers régionaux sur la prévention contre ce drame, dont les traumatismes peuvent durer à vie.