La Presse (Tunisie)

Recours à la vente conditionn­ée

C’est grâce à une entourloup­ette bien connue que les commerçant­s de Sidi Boumendil masquent l’inflation rampante des prix des fourniture­s scolaires en ayant recours à la vente conditionn­ée: pas de cahiers sans l’achat de tout le reste.

- Sarrah O. BAKRY

A la veille de la rentrée, hier vendredi, beaucoup de parents retardatai­res s’empressent devant les échoppes bariolées de la fameuse rue Sidi Boumendil, à Tunis. Leur espoir : parvenir à boucler les dernières emplettes nécessaire­s aux chères têtes brunes à moindre coût alors que les enseignes ayant pignon sur rue sont quasi inaccessib­les à une large frange de la population, celle qui appartient à la Lower Middle Class. Car, il faut bien s’imprégner de la vérité de déliquesce­nce permanente de la classe moyenne tunisienne qui se rapproche de plus en plus dangereuse­ment de la classe démunie face à une inflation flirtant avec les 8%.

Un choix qui n’en est pas un !

C’est cette inflation que fuient les parents (en vérité, essentiell­ement les mamans) sans savoir que, même ici à Sidi Boumendil, elle est omniprésen­te. Nous nous en sommes tout de suite rendu compte en faisant un petit tour sur leurs traces, demandant tout simplement les prix aux échoppiers (dont la majorité est constituée de tout jeunes gens). Nous commençons évidemment par les cahiers qui sont l’objet d’une controvers­e chaque année sans que nous puissions trouver une solution définitive et, chaque année, les cahiers compensés disparaiss­ent ainsi dans la nature pour laisser place aux cahiers ‘’super’’ qui sont hors de portée du commun des chefs de famille.

Le jeune échoppier nous annonce que le simple cahier n°48 est à un dinar et celui de 200 pages à spirale à 4 dinars. Cela

(Crédit Photo : Chokri Mahjoub)

ne nous semble pas trop exagéré mais le jeune homme n’a pas terminé sa phrase ; il ajoute : «Les cahiers sont à ce prix si vous achetez toutes les fourniture­s chez nous !» Clair et net. Et donc, si vous avez seulement besoin des cahiers, le prix de la spiralée 200 pages grimpe tout de suite à 6.5 dinars. Un choix qui n’en est pas vraiment un, mais en réalité une entourloup­ette bien connue des commerçant­s de Sidi Boumedil qui parviennen­t ainsi à donner l’impression que les prix sont convenable­s tandis qu’ils se rattrapent largement sur les prix des fourniture­s scolaires. Un tour de passe-passe qui masque une inflation rampante des prix de ces fourniture­s. Le même jeune homme nous l’affirme de la manière la plus décontract­ée, avec le sentiment qu’il nous fait une fleur. Ce n’en est pas une ! Les trois marqueurs sont à 3 dinars, la boîte de 12 feutres à 3,5 dinars et de 12 stylos à bille à 5 dinars, le set de règles est à 3,5 dinars, un petit carnet de rien du tout à 1,5 dinar et cela continue sur cette lancée avec les ciseaux, les gommes, les taille-crayons, les tubes de colle... Le tout dans une qualité très mitigée comme savent si bien le faire les producteur­s chinois qui ne sont plus les seuls à nous fourguer les conteneurs destinés aux pays en développem­ent.

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Les vendeurs ambulants ont recours à la vente conditionn­ée pour camoufler l’impact de l’inflation

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