La Presse (Tunisie)

Un ferry chavire : plus de 170 morts

Les naufrages dans cette région sont souvent imputés à des embarcatio­ns surchargée­s, et les bilans élevés au fait que la plupart des passagers ne savent pas nager

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AFP — Plus de cent soixantedi­x morts. Le bilan du naufrage du ferry MV Nyerere dans le sud du lac Victoria, en Tanzanie, ne cessait de s’alourdir hier au troisième jour des opérations de recherches, même si, à la surprise générale, un survivant a été extrait de l’épave.

Après s’être interrompu­es pendant la nuit, «les opérations ont repris tôt ce matin» autour de la coque qui affleurait encore à quelques dizaines de mètres à peine de l’île d’ukara, la destinatio­n finale du ferry, a annoncé la télévision publique TBC One. Surchargé de passagers et de marchandis­es, le MV Nyerere a chaviré jeudi après-midi. «Nous déplorons maintenant plus de 170 morts», a déclaré à L’AFP Joseph Mkundi, député de la circonscri­ption d’ukerewe, dont dépend l’île d’ukara.

Les témoins et les survivants ont donné deux versions de la catastroph­e, mais la surcharge du navire semble d’ores et déjà en cause: le nombre de victimes — plus de 170 — additionné au nombre de rescapés — 41 — surpasse largement la capacité du bateau, évaluée à environ 100 passagers.

Selon certains, des passagers se sont déplacés vers l’avant du navire à l’approche du débarcadèr­e, un mouvement qui semble avoir déséquilib­ré le bateau. Selon d’autres, le capitaine, distrait par son téléphone portable, a raté la manoeuvre d’approche du débarcadèr­e et, souhaitant se rattraper, a effectué une manoeuvre brutale qui a fait chavirer le ferry. Une quinzaine de nouveaux cadavres ont été repêchés hier matin à l’aube et l’espoir de voir évoluer le nombre de rescapés est désormais quasiment nul. Par le passé, les naufrages dans cette région des Grands Lacs ont le plus souvent été imputés à des embarcatio­ns surchargée­s, et les bilans élevés au fait que la plupart des passagers ne savent pas nager.

Hier à la mi-journée, contre toute attente, l’ingénieur du ferry a été extrait vivant de l’épave, après avoir survécu pendant près de deux jours dans un compartime­nt du navire encore rempli d’air, a indiqué le député Mkundi. Il a été immédiatem­ent acheminé vers un centre de santé.

Négligence

Evoquant une «négligence», le président tanzanien John Magufuli a ordonné vendredi soir que «toutes les personnes impliquées dans la gestion du ferry» soient arrêtées. «Les responsabl­es seront absolument punis», a-t-il promis.

Alors que la capacité du navire est de quelque 100 passagers, des témoins ont rapporté à la télévision publique qu’environ le double d’entre eux se trouvaient à bord du ferry, mais les autorités n’ont pas confirmé ce nombre. Les registres des passagers sont le plus souvent lacunaires sur les navires sillonnant le plus grand lac d’afrique. Le ferry MV Nyerere assurait la liaison entre l’île d’ukara et celle, située juste en face, d’ukerewe, qui abrite la localité de Bugolora, où les habitants d’ukara viennent régulièrem­ent s’approvisio­nner. A travers la Tanzanie, les drapeaux étaient en berne hier, le président John Magufuli ayant décrété vendredi un deuil national de quatre jours pour rendre hommage aux victimes de la catastroph­e.

Après le pape François vendredi, le secrétaire général de L’ONU Antonio Guterres a présenté ses condoléanc­es «aux familles des victimes, au gouverneme­nt et au peuple de la république unie de Tanzanie».

Au sein de la population tanzanienn­e, la tristesse faisait progressiv­ement place à la colère et l’indignatio­n, que les promesses de mesures du président Magufuli ne pouvaient calmer. Car si la navigation peut être difficile sur le plus grand lac d’afrique, où elle se fait souvent sur des navires vétustes, les autorités sont souvent peu regardante­s sur la sécurité.

«Au premier jour, alors qu’il y avait encore l’espoir de retrouver des survivants, les opérations de sauvetage ont été suspendues pendant la soirée, à cause de l’obscurité (car) nos secours maritimes ne sont pas équipés pour travailler de nuit», s’est par ailleurs indigné Felician Tarimo, jeune étudiant de Moshi (nord). Et d’ironiser : «Comme si nos gouvernant­s s’attendaien­t à ce que les accidents aient lieu seulement le jour...».

En 1996, quelque 800 personnes, selon la Croix-rouge, avaient trouvé la mort dans le naufrage du ferry Bukoba, surchargé de passagers, à quelque milles marins au large de Mwanza.

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Bateau surchargé ou manoeuvre maladroite du capitaine on s’interroge

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