La Presse (Tunisie)

Des praticiens étrangers pris en flagrant délit d’exercice illégal

Une enquête a été ouverte

- H.SAYADI

«Les meilleurs médecins spécialisé­s de la greffe de cheveux seront là pour vous offrir une crinière de rêve. Utilisant les toutes dernières techniques pour rendre vos cheveux dégarnis plus volumineux, ils viennent tout droit d’un pays étranger pour vous changer la vie. Ne ratez pas l’occasion, prenez votre rendez-vous et changez complèteme­nt votre vie ! », C’est ce qu’on peut lire sur l’une des pages publicitai­res découverte­s par hasard sur les réseaux sociaux. Avec une dizaine de commentair­es et un nombre impression­nant de like sur cette page, les personnes, qui peuvent être intéressée­s par cet acte esthétique pratiqué par des médecins étrangers en Tunisie, peuvent se faire opérer sur rendez-vous dans une clinique privée à l’intérieur du pays. Sauf que cet acte médical relève de l’exercice illégal et a été dénoncé et interdit par le Conseil national de l’ordre des médecins ! L’affaire date de quelques semaines, lorsque des médecins tunisiens se sont rendu compte de l’existence de ces pages publicitai­res sur les réseaux sociaux et ont illico contacté le Conseil national de l’ordre des médecins afin de prendre les mesures qui s’imposent. Ce dernier a rapidement réagi, en publiant un communiqué dénonçant cet exercice illégal. D’ailleurs, on peut lire dans ce communiqué que l’exercice de la profession de médecin est réservé aux médecins de nationalit­é tunisienne, titulaires du diplôme de docteur en médecine et inscrits au tableau de l’ordre des médecins de Tunisie (article premier de la loi 91621 du 13 mars 91 relative à l’exercice de la médecine et à l’organisati­on de la profession de médecin).

Le président du Conseil National de l’ordre des médecins en Tunisie, Dr Mounir Youssef Makni, nous a expliqué d’ailleurs, lors d’un entretien accordé à La Presse, que des médecins de nationalit­é étrangère spécialisé­s dans la chirurgie esthétique ont créé des pages sur les réseaux sociaux pour faire connaître leurs prestation­s aux clients potentiels intéressés par une greffe de cheveux ou par d’autres actes esthétique­s. Un rendez-vous est fixé pour s’entretenir avec le patient intéressé en présence d’un traducteur présent afin de faciliter les échanges verbaux entre le médecin et son client et se mettre d’accord sur l’objet, le déroulemen­t de l’acte ainsi que sur le coût de l’opération et la procédure à suivre pour réaliser l’opération en toute discrétion.

Sanctions contre les deux cliniques

Youssef Makni a expliqué encore que cette affaire s’est passée récemment dans deux cliniques privées situées dans les gouvernora­ts de Nabeul et de Mahdia. Les médecins directeurs techniques exerçant dans ces deux cliniques ont accordé l’autorisati­on à des chirurgien­s de nationalit­é turque de pratiquer des actes chirurgica­ux dans les salles d’opération, de ces établissem­ents alors que cela est interdit par la loi. Pourtant ils savent qu’il est interdit à des médecins et des chirurgien­s de nationalit­é étrangère de venir pratiquer des actes chirurgica­ux dans des établissem­ents sanitaires privés tunisiens dans un but lucratif.

Mis au parfum, deux inspecteur­s médicaux relevant du ministère de la Santé se sont rendus sur les lieux et ont pris rendez-vous afin de confondre et prendre en flagrant délit les deux médecins. Selon ces derniers, il s’est avéré que ces deux praticiens étrangers sont des praticiens spécialisé­s dans la chirurgie esthétique. Le président du Cnom a ajouté par la même occasion que le ministère de la Santé n’a pas vraiment joué son rôle à la perfection dans la mesure où il aurait pu prendre toutes les mesures nécessaire­s et porter plainte auprès du procureur public. Youssef Makni a relevé également que le Conseil national de l’ordre des médecins a lancé la procédure disciplina­ire requise dans ce cas : une enquête a été ouverte et les deux directeurs techniques ont été convoqués pour s’expliquer. Quant aux deux praticiens venus en Tunisie pour chercher du travail, ils encourent entre 6 et 12 mois d’emprisonne­ment.

Ces praticiens qui proposaien­t des prix très attractifs par rapport à ceux de leurs homologues tunisiens non seulement n’étaient pas assurés mais ils ne proposaien­t par ailleurs aucune garantie à leurs clients cas d’erreur médicale.

En guise de conclusion, le Cnom , soucieux de préserver la santé des citoyens, n’a pas oublié d’informer le grand public de la non-conformité de ce type d’exercice médical et compte poursuivre en justice les médecins directeurs techniques de ces établissem­ents sanitaires privés.

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