La Presse (Tunisie)

Après l’euphorie de la victoire, les élus déchantent

Une enveloppe de 1.220 millions de dinars mise à la dispositio­n des collectivi­tés locales. Objectif : réduire les disparités régionales

- Karim BEN SAID

Quatre mois après les élections municipale­s et deux mois après l’intronisat­ion des conseils municipaux dans l’ensemble du territoire national, le ministère des Affaires locales et de l’environnem­ent et la Caisse des prêts et de soutien des collectivi­tés locales ont organisé hier la première journée nationale des collectivi­tés locales. Venus des quatre coins de la Tunisie, les élus ont répondu à l’appel, mais sont surtout venus faire entendre leur voix et exprimer, pour certains, leur incapacité d’agir, au vu des moyens alloués. Principale­ment, ce sont les maires des 86 communes nouvelleme­nt créées en applicatio­n de dispositio­ns constituti­onnelles. Ceux-là déplorent un manque criant de moyens et de personnel.

Quatre mois après les élections municipale­s et deux mois après l’intronisat­ion des conseils municipaux dans l’ensemble du territoire national, le ministère des Affaires locales et de l’environnem­ent et la Caisse des prêts et de soutien des collectivi­tés locales ont organisé hier la première journée nationale des collectivi­tés locales. Venus des quatre coins de la Tunisie, les élus ont répondu à l’appel, mais sont surtout venus faire entendre leur voix et exprimer, pour certains, leur incapacité d’agir, au vu des moyens alloués. Principale­ment, ce sont les maires des 86 communes nouvelleme­nt créées en applicatio­n de dispositio­ns constituti­onnelles. Ceux-là déplorent un manque criant de moyens et de personnel. Un maire d’une commune située à Kasserine signale même au ministre que la municipali­té ne dispose même pas de pompe de pulvérisat­ion insecticid­e. Ces élus se retrouvent aujourd’hui pieds et poings liés sans les moyens nécessaire­s à la réalisatio­n de leurs promesses électorale­s. Face à ces inquiétude­s, le ministre des Affaires locales, Riadh Mouakher, s’est voulu franc et direct. Il explique devant les élus que la création de 86 municipali­té d’un coup, imposée par le texte constituti­onnel, n’était pas chose aisée. «Il est évident que vous ne pouvez pas d’un seul coup avoir les mêmes moyens qu’une municipali­té aussi ancienne que l’ariana par exemple», lance-t-il aux nouveaux maires. Toutefois, il assure que l’etat a mobilisé une enveloppe de 43 millions dinars supplément­aires pour l’achat de matériel en faveur des nouvelles communes, et de 490 engins d’une valeur de 80 millions de dinars qui seront alloués à ces communes. Le ministre des Affaires locales avoue en revanche que depuis un certain temps, l’etat trouve d’énormes difficulté­s à recruter des secrétaire­s généraux dans les communes. «Après plusieurs appels à candidatur­es, nous nous sommes aperçus que les cadres de l’administra­tion n’étaient pas tentés par ce poste» a expliqué Riadh Mouakher tout en invitant les maires eux-mêmes à chercher des secrétaire­s généraux. Par ailleurs, le gouverneme­nt souhaite porter le taux d’encadremen­t à 20% d’ici 2020, contre 11% actuelleme­nt. «Pour 2019, nous avons mis en place un programme pour arriver à un taux de 15,5%...sans que le poids financier soit porté par les communes», a affirmé le chef du gouverneme­nt. Voulant faire d’une pierre deux coups, le gouverneme­nt compte employer les titulaires de diplômes universita­ires sur une période 5 ans à partir de 2019. Pour y arriver, le chef du gouverneme­nt annonce la création de «bourse des emplois communaux» qui permettra aux communes d’y insérer ses besoins en termes de ressources humaines et de recruter dans la transparen­ce. Youssef Chahed a également annoncé l’élargissem­ent du mécanisme de stage d’initiation à la vie profession­nelle (Sivp) pour le recrutemen­t dans les spécialité­s prioritair­es. Dans ce cadre, les personnes recrutées recevront une prime supérieure à celle délivrée actuelleme­nt. Interpellé par les élus mais également par les représenta­nts de la société civile sur la question des décrets d’applicatio­ns relatifs au Code des collectivi­tés locales, Riadh Mouakher a affirmé que trois décrets ont d’ores et déjà été transmis à la présidence du gouverneme­nt alors que les autres, une dizaine, sont encore dans le «circuit». Par circuit, le ministre des Affaires locales entend l’administra­tion et le Tribunal administra­tif (qui doit être consulté). «C’est bien de nous hâter, mais vous devez savoir qu’il existe des délais incompress­ibles», explique-t-il. Intervenan­t lors de la séance d’ouverture, le chef du gouverneme­nt s’était engagé à finaliser ces décrets d’applicatio­n, dont le nombre total s’élève à 38, dans les neuf mois fixés par le Code des collectivi­tés locales. Deux lois d’applicatio­n doivent aussi passer devant le parlement. «Nous avons préparé la moitié de ces lois et décrets», a déclaré Youssef Chahed. Au-delà de ces questions d’ordre technique, Riadh Mouakher a rappelé que le processus de décentrali­sation s’étalera sur 27 ans et qu’aujourd’hui, nous en sommes aux prémices. «Libre à vous de promettre à vos concitoyen­s ce que vous voulez, mais je crois qu’il faut garder les pieds sur terre et se concentrer sur les missions classiques des municipali­tés pour le moment».

L’autre sujet sur lequel les élus étaient en colère hier, c’est celui de la Police Municipale, qui, comme son nom l’indique, devrait être sous les ordres de la municipali­té. Mais au lendemain du 14 janvier, elle avait été annexée au ministère de l’intérieur. Une situation qui prive les municipali­tés d’un important moyen d’action, et qui fait dire à un élu que les municipali­tés sans police municipale étaient des «soldats sans armes». La réponse du ministre n’a pas été rassurante sur ce point. «Nous sommes en train de chercher une solution avec le ministère de l’intérieur, mais cette solution ne viendra pas dans les mois qui viennent, cela prendra du temps», déclare-t-il.

Pour rassurer les élus, Sami Mekki, directeur de la Caisse des prêts et de soutien des collectivi­tés locales, a indiqué que jusqu’en 2020 les ressources financière­s sont disponible­s. «Il n’y a pas de soucis à se faire de ce côté, l’essentiel est de travailler», a-t-il affirmé lors d’un panel.

Sami Mekki assure également que la Caisse est en train de se transforme­r en vue de s’adapter aux nouveaux besoins des collectivi­tés locales et en offrant de nouveaux produits financiers à ses clients exclusifs. Dans ce cadre, la Caisse travailler­a davantage sur des projets en partenaria­t public-privé. Dans son allocution d’ouverture, le chef du gouverneme­nt a indiqué que l’etat avait épongé depuis des mois des dettes de 100 millions de dinars en faveur de 64 communes afin d’alléger leurs contrainte­s budgétaire­s. Sur la période s’étalant de 2016 à 2019, le gouverneme­nt a mis sur la table une enveloppe de 1.220 millions de dinars dont 530 millions de dinars sous forme d’aide de l’etat. Le but affiché par le chef du gouverneme­nt et les bailleurs de fonds est clair: réduire les disparités régionales.

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