La Presse (Tunisie)

Quand Washington déserte la justice internatio­nale

- Par Raouf SEDDIK

IL Y A quelques jours, devant l’assemblée générale des Nations unies, le président américain Donald Trump s’en est pris à la Cour pénale internatio­nale qui venait de se déclarer compétente dans l’affaire de la décision israélienn­e de démolir le village palestinie­n de Khan al-ahmar. Il opposait à l’autorité de cette juridictio­n le principe de souveraine­té : «Nous n’abandonner­ons jamais la souveraine­té américaine à une bureaucrat­ie mondiale non élue et irresponsa­ble», avait-il déclaré ! Il réaffirmai­t ainsi une position de rupture existante entre les autorités américaine­s et la CPI, en lui conférant cependant une tournure polémique qu’elle n’avait pas à ce niveau de pouvoir.

Avant-hier, un pas de plus a été franchi dans la politique de désengagem­ent par rapport aux instances judiciaire­s internatio­nales. Par la voix de son conseiller à la sécurité nationale, le président américain a dénoncé la Convention de Vienne de 1961 sur les relations diplomatiq­ues, ou en tout cas son protocole – dûment signé et ratifié en son temps par les Etats-unis – en vertu duquel tout différend touchant l’interpréta­tion ou l’applicatio­n de la Convention est obligatoir­ement du ressort de la Cour internatio­nale de justice (CIJ).

Bien entendu, si les Etats-unis se retirent du texte qui précise quelle est la partie qui tranche en cas de litige, cela signifie qu’ils se donnent la liberté d’interpréte­r eux-mêmes, ou de fixer de façon unilatéral­e l’instance de leur choix qu’ils jugent apte à assurer cette interpréta­tion. Autant dire que la Convention de Vienne de 1961 sur les relations diplomatiq­ues est en train de se vider de sa substance.

A vrai dire, cette mise en cause de la Cour internatio­nale de justice — plus haute instance judiciaire de L’ONU — est intervenue dans la foulée d’une précédente attaque à propos d’une décision de la CIJ intimant aux autorités américaine­s l’ordre de lever les sanctions contre l’iran en ce qui concerne certains biens comme les médicament­s, les denrées alimentair­es ou le matériel médical. La Cour agissait suite à une plainte qui lui avait été adressée en juillet dernier par Téhéran et elle se référait dans son jugement à un traité d’amitié entre les Etats-unis et l’iran qui remonte à 1955. La réponse de Washington fut la suivante : « La Cour a permis à l’iran de l’utiliser comme outil de sa propagande »… Et le traité d’amitié de 1955 a été abrogé ! Deux remarques. La première sous forme de question : jusqu’à quel point les Américains entendent-ils se mettre en marge de la justice internatio­nale, en donnant raison à ceux qui les accusent de vouloir ramener le monde à la loi du plus fort dans les relations internatio­nales ?

Et la seconde : la dénonciati­on du protocole à la Convention de Vienne est intervenue en réaction à une plainte déposée par l’autorité palestinie­nne pour « violation du droit internatio­nal » suite au transfert de l’ambassade américaine de Tel-aviv à Jérusalem (Al-qods).

Ce qui signifie donc que, aujourd’hui, Washington ne trouve pas d’autre réponse face à l’offensive judiciaire des Palestinie­ns en dehors d’une désertion de la justice internatio­nale et d’un repli vers une zone de non-droit…

Si les etats-unis se retirent du texte qui précise quelle est la partie qui tranche en cas de litige, cela signifie qu’ils se donnent la liberté d’interpréte­r eux-mêmes, ou de fixer de façon unilatéral­e l’instance de leur choix qu’ils jugent apte à assurer cette interpréta­tion. Autant dire que la Convention de Vienne de 1961 sur les relations diplomatiq­ues est en train de se vider de sa substance

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