La Presse (Tunisie)

Les accusés de nouveau absents

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La chambre spécialisé­e en justice transition­nelle du Tribunal de première instance de Nabeul a examiné vendredi l’affaire des violations des droits de l’homme à l’encontre de Basma Baali, la troisième affaire de torture et de violation de droits de l’homme dans la région, après les affaires de Fayçal Baraket et Rachid Chamkhi. La deuxième audience dans cette affaire, qui s’est déroulée encore une fois en l’absence des accusés, a été consacrée à l’audition de la victime et de son frère sur les violations dont ils avaient fait l’objet et dont les stigmates sont restés gravés dans leurs mémoires et corps 31 longues années après les faits. «L’audience a permis d’entendre le témoignage de la victime, ses souffrance­s et endurances jusqu’à aujourd’hui et de réaffirmer que l’objectif de ces procès n’est pas de se venger des accusés mais de connaître toute la vérité afin de pouvoir tourner la page et pour qu’il n’y ait plus de récidives similaires en Tunisie», a déclaré Samir Dilou, membre du collectif de défense, à l’agence TAP.

De son côté, Raoudha Grafi, présidente d’honneur de l’associatio­n des magistrats tunisiens, a indiqué que l’associatio­n fait partie de la coalition d’organisati­ons de la société civile défendant le processus de la justice transition­nelle. «Ce procès revêt une grande importance car il porte sur des violations extrêmes contre une femme qui a enduré toutes les formes de tortures et de menaces et a été forcée à assister à une séance de torture de Faycal Baraket et Rachid Chamkhi», a-t-elle souligné.

Grafi a exprimé son étonnement de l’absence à chaque fois des accusés dans les affaires de violations des droits de l’homme sous prétexte que des convocatio­ns ne leur sont pas parvenues. «Il est difficile pour un Tunisien de croire que les domiciles des citoyens sont inconnus et que le ministère public et la police judiciaire, par le biais des postes de police et de la garde nationale, sont incapables d’amener les accusés devant la justice», a-t-elle affirmé. Elle fait assumer à cet égard au parquet et au ministère de l’intérieur l’entière responsabi­lité «car l’absence répétée des inculpés est un dépassemen­t de la loi». «Le déroulemen­t du procès en l’absence des accusés et l’annonce de verdicts par contumace non exécutés est synonyme d’échec du processus de justice transition­nelle et de transition démocratiq­ue car ils consacrero­nt le principe que des personnes sont au-dessus de la loi et de la justice», a fait valoir la présidente d’honneur de l’associatio­n des magistrats tunisiens.

Elle a déploré également le fait que les procès des chambres spécialisé­es en justice transition­nelle ne soient pas couverts par la presse publique, estimant que «la couverture des médias publics audiovisue­ls est très faible».

«C’est un dysfonctio­nnement inacceptab­le car le déroulemen­t de ces affaires fait partie intégrante du service public dans la garantie du droit des Tunisiens à être informés et connaître les pages sombres de l’histoire de la Tunisie», a-t-elle ajouté.

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