La Presse (Tunisie)

Le calvaire des petits commerces

Une commission composée de membres du bureau régional de l’utica et de la direction régionale du commerce sera chargée d’évaluer les dégâts des sinistrés.

- Abdel Aziz HALI

À Nabeul, il y a un avant et un après-22 septembre 2018. La plaie est encore béante. Entre colère, désarroi et indignatio­n, les habitants de la Cité des Potiers sont au bord du désespoir. Dix-neuf jours après le drame qui s’est abattu sur leur ville, si la vie a repris son cours, pour plusieurs petits commerçant­s, le business tourne au ralenti vu les pertes enregistré­es, le lendemain de la catastroph­e. C’est le cas de Saber Chérif, propriétai­re d’une épicerie à «Houmet el-bhar» (quartier Mongi Slim), l’une des zones les plus touchées de Nabeul. «Jusqu’à maintenant, j’ai évalué mes pertes à trois mille dinars. Mes trois réfrigérat­eurs sont tombés en panne. Et c’est surtout mon stock de denrées alimentair­es (semoule de blé, sucre, épices, etc…) qui a été endommagé. C’est une vraie catastroph­e pour une petite épicerie comme la mienne», souligne Saber.

Une menace sanitaire

Mais pour ce petit commerçant, le calvaire ne s’arrête pas là. Avec l’accumulati­on de la boue et la stagnation des flaques d’eau devant sa boutique, M. Chérif craint le pire. «Ça fait plus de deux semaines que les habitants du quartier se plaignent de la proliférat­ion des moustiques. Tout le monde sait que ces eaux stagnantes et cette boue peuvent devenir le foyer des moustiques. Et avec les cas avérés de virus du Nil occidental, on ne peut que craindre le pire. De plus, on attend toujours l’arrivée des agents des services d’hygiène pour décontamin­er nos locaux», ajoute-t-il.

Un peu plus loin, Slim Belhadj nous accueille dans sa librairie qui a subi, également, quelques dégâts matériels. «Au total, j’ai perdu vingtcinq rames de papier, deux cents cartons gris et plusieurs caisses contenant des cahiers (n°12, n°24, n°48 et n°72). Bref, mes pertes sont aux alentours de neuf-cent-soixante dinars», fait savoir le libraire. À l’image de Saber l’épicier, Slim est parmi ceux qui n’ont pas fait appel à un huissier notaire pour faire un constat et déposer un dossier auprès de la délégation de Nabeul ou au bureau régional de l’union Tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (Utica).

«Le lendemain du drame, on était gagné par l’émotion. Il fallait nettoyer la boutique et notre entrepôt pour reprendre au plus vite le travail. On a, malheureus­ement, jeté tous les produits endommagés dans la poubelle», renchérit M. Belhadj.

Entre le marteau du fisc et l’enclume des pertes

Du côté de l’avenue Habib Bourguiba, nous rencontron­s Mohamed, propriétai­re d’une boutique de prêt-à-porter, qui a voulu témoigner sous le sceau de l’anonymat.

«J’ai perdu une marchandis­e d’une valeur de cinq mille dinars. Mais vu que la plupart de mes articles ne sont pas déclarés au fisc, je suis contraint de ne pas déposer un dossier auprès des autorités compétente­s pour être indemnisé», déclare-t-il. Selon M. Mohamed Ourimi, délégué de Nabeul, certes, plusieurs petits commerçant­s patentés et non patentés ont déposé des dossiers auprès de ses services, mais pour le moment, on ne peut pas cerner le nombre exact des sinistrés.

En revanche, pour le président régional de l’uticanabeu­l, les petites et moyennes entreprise­s ont jusqu’au 15 octobre pour déposer leurs dossiers aux bureaux locaux de la centrale patronale dans la région de Nabeul.

«Pour le moment, nous avons reçu plus de deux cents dossiers et à ce rythme, d’ici le 15 octobre (la date butoir), le chiffre pourrait atteindre la barre des sept cents», précise M. Alaya.

Il reste à rappeler que pour les entreprise­s économique­s et commercial­es, le coordinate­ur de la Commission régionale de lutte contre les catastroph­es naturelles et ministre des Affaires locales et de l’environnem­ent, M. Riadh Mouakhar, avait déjà annoncé «qu’une commission mixte entre le ministère du Commerce et l’utica procèdera à la mise en service d’un fonds de dédommagem­ent des entreprise­s sinistrées à l’instar de ce qui a été fait après la révolution en attendant l’amendement de la loi régissant ces indemnisat­ions et sa soumission à l’adoption dans les plus brefs délais», selon une déclaratio­n accordée à nos confrères de l’agence Tunis-afrique Presse (TAP).

Toujours d’après le président régional de l’utica, M. Adel Alaya, trois commission­s seront en charge pour évaluer les dégâts. Pour les entreprise­s industriel­les, elle sera composée par des membres de l’utica et de L’API (Agence de promotion industriel­le). Et pour les entreprise­s artisanale­s, l’évaluation sera pilotée par des membres du bureau régional de l’utica et de l’onat (Office national de l’artisanat tunisien).

Enfin, pour les petits commerces, la commission sera chapeautée par des agents de la direction régionale du commerce à Nabeul et des membres du bureau régional de l’utica-nabeul.

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Le regard désespéré de Saber Chérif, un épicier de quartier à Nabeul, dont les pertes sont aux alentours de « trois-mille dinars ».

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