La Presse (Tunisie)

Riyad admet la thèse du crime « prémédité »

Malgré les nombreux désistemen­ts en lien avec cette affaire, le forum Future Investment Initiative aurait été «fantastiqu­e», assure un ministre saoudien

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AFP — Le procureur général d’arabie Saoudite a déclaré hier que, sur la base d’informatio­ns fournies par la Turquie, les suspects accusés du meurtre du journalist­e Jamal Khashoggi avaient commis un acte «prémédité», une version que Riyad n’avait jamais évoquée jusqu’ici. Les enquêtes se poursuiven­t, a ajouté le procureur dans un bref communiqué. Jamal Khashoggi, journalist­e et opposant saoudien, a été tué le 2 octobre dans l’enceinte du consulat saoudien à Istanbul. Selon des responsabl­es turcs, Khashoggi a été assassiné par une équipe d’agents venus de Riyad.

AFP — Le procureur général d’arabie Saoudite a déclaré hier que, sur la base d’informatio­ns fournies par la Turquie, les suspects accusés du meurtre du journalist­e Jamal Khashoggi avaient commis un acte «prémédité», une version que Riyad n’avait jamais évoquée jusqu’ici.

Les enquêtes se poursuiven­t, a ajouté le procureur dans un bref communiqué.

Jamal Khashoggi, journalist­e et opposant saoudien, a été tué le 2 octobre dans l’enceinte du consulat saoudien à Istanbul. Selon des responsabl­es turcs, Khashoggi a été assassiné par une équipe d’agents venus de Riyad. Après avoir nié sa mort, les autorités saoudienne­s, sous la pression internatio­nale, avaient avancé plusieurs versions évoquant d’abord une «rixe» ayant mal tourné puis une opération «non autorisée» et dont le prince héritier Mohammed Ben Salmane, considéré comme l’homme fort du royaume, n’avait «pas été informé».

Au total, 18 suspects, tous Saoudiens, ont été arrêtés en Arabie saoudite et plusieurs hauts responsabl­es des services de renseignem­ent limogés.

Peu après l’annonce du procureur, des médias d’etat saoudiens ont indiqué que le prince Mohammed, âgé de 33 ans et surnommé MBS, avait présidé jeudi la première réunion d’une commission chargée de restructur­er les services de renseignem­ent. Mercredi, le prince héritier a pris la parole pour la première fois sur l’affaire Khashoggi, qualifiant d’«incident hideux» et «douloureux» le meurtre du journalist­e qui a provoqué l’indignatio­n internatio­nale et écorné l’image du royaume, premier exportateu­r de pétrole au monde. S’exprimant devant le forum Future Investment Initiative (FII) à Riyad, l’héritier du trône, dont l’image a aussi pâti, a affirmé que «la justice prévaudra» et qu’il n’y aura «pas de rupture des liens avec la Turquie», les deux pays coopérant dans l’enquête selon lui.

«Où est le corps?»

Hier, le chef de la diplomatie turque a affirmé qu’il existait toujours «des questions» auxquelles Riyad doit répondre, notamment l’identité des commandita­ires et le lieu où se trouve le corps du journalist­e assassiné.

«Il y a des questions qui nécessiten­t des réponses», a déclaré Mevlüt Cavusoglu. «18 personnes ont été arrêtées (en Arabie Saoudite), pourquoi elles? Qui leur a donné des ordres? (...) Le corps de Jamal Khashoggi n’a pas encore été retrouvé. Où est-il?» Les responsabl­es saoudiens ont cherché hier à faire bonne figure en affirmant être «très contents» des résultats du forum FII qui s’est tenu pendant trois jours à Riyad. La conférence a été «fantastiqu­e», a assuré le ministre des Finances, Mohammed Al-jadaan, évitant soigneusem­ent d’évoquer les désistemen­ts en cascade de responsabl­es politiques et de grands chefs d’entreprise occidentau­x choqués par l’affaire Khashoggi. Le ministre saoudien de l’energie, Khaled Al-faleh, a affirmé que «toutes les compagnies qui se sont abstenues (de venir) nous ont appelé ces dernières 48 heures pour présenter leurs excuses et exprimer leurs regrets». Selon lui, ces entreprise­s ont promis de venir en Arabie saoudite dans les prochaines semaines pour ouvrir des bureaux et rétablir des relations normales.

Bataille «personnell­e»

Les organisate­urs du FII et le ministère saoudien de l’informatio­n ont assuré que le forum avait favorisé des accords ou des projets d’accord totalisant des dizaines de milliards de dollars. Comme en 2017, cette conférence internatio­nale avait pour but de projeter le royaume pétrolier désertique comme une destinatio­n d’affaires lucrative.

A propos des réformes engagées dans le royaume, le prince héritier a affirmé que «dans les cinq prochaines années, l’arabie Saoudite sera totalement différente». «Si nous réussisson­s dans les cinq années à venir, d’autres pays (de la région) nous suivront», a-t-il dit. «C’est la bataille des Saoudiens et c’est ma bataille dans laquelle je suis engagé personnell­ement». Sur la scène internatio­nale, les versions incomplète­s ou contradict­oires de l’arabie Saoudite sur l’affaire Khashoggi continuent de susciter scepticism­e et interrogat­ions.

Cette semaine, les Etats-unis ont annoncé une première mesure de rétorsion: la révocation des visas de 21 suspects saoudiens. La Grande-bretagne leur a emboîté le pas en annulant tout éventuel visa détenu par les suspects.

De son côté, la France s’est dite prête à des «sanctions internatio­nales» contre «les coupables», «en lien avec ses partenaire­s». Proche allié de Riyad, le président américain Donald Trump a estimé que l’opération de dissimulat­ion saoudienne, «l’une des pires de l’histoire», avait été un «fiasco total».

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