La Presse (Tunisie)

Les apparences sont parfois trompeuses

90% de nos municipali­tés n’étaient pas dotées d’un service de presse en bonne et due forme.

- Mohsen ZRIBI

Nul doute, disons-le tout de go, que la question de la médiatisat­ion de l’action municipale en Tunisie mérite que l’etat s’y penche sérieuseme­nt en vue de la rendre plus efficace et surtout plus crédible aux yeux d’une opinion publique des plus exigeantes et, par-dessus le marché, éveillée et beaucoup moins dupe que par le passé. Avant la révolution, faut-il le rappeler, la majorité de nos maires, il est vrai, triés sur le volet parmi les compétence­s nationales, n’étaient guère médiatisés.

Leurs rares apparition­s publiques ne dépassaien­t pas le cadre des visites d’inspection sur le terrain, outre les quatre sessions ordinaires que tenaient les conseils municipaux et qui étaient ouverts aux habitants de la commune. La couverture médiatique de ces activités était, souvenons-nous-en, généraleme­nt timide pour ne pas dire insignifia­nte. Pourquoi? Tout simplement parce que 90% de nos municipali­tés n’étaient pas dotées d’un service de presse en bonne et due forme. C’est que les maires de l’époque préféraien­t se faire juger par leurs réalisatio­ns que par le «m’as-tu-vu?»

Ils privilégia­ient le concret et non les articles élogieux, les acquis et non les sorties spectacula­ires. Et ils s’en acquittaie­nt à merveille quand on se rappelle, ô nostalgie, que nos villes étaient quand même beaucoup moins sales qu’aujourd’hui.

Trop, c’est trop

Changement subit du décor après la révolution. Un changement d’autant plus radical qu’un grand nombre de nos maires sont devenus plus médiatisés que les… ministres, particuliè­rement sur Facebook.

Là où ils rivalisent désormais d’apparition­s théâtrales nonstop qui en jean et basket, qui armé de pelle, qui prêtant main-forte aux ouvriers du service du nettoyage et de la propreté, qui présidant la réunion d’une commission municipale, qui encore en train de… bombarder un habitant de promesses. On a même vu, toujours sur la Toile, des maires partager une partie de… barbecue avec des employés de la boîte à l’occasion de l’aïd Al Idha! Et les exemples abondent qui témoignent du... malin plaisir qu’éprouvent certains d’entre eux à s’exhiber sur les réseaux sociaux. Or, s’y produire devient manifestem­ent inutile et déplacé quand ledit personnage public accuse un important manque à gagner dans la gestion de «sa» commune.

A quoi sert-il de faire circuler sur facebook la vidéo d’une visite «inspirée» du patron de la municipali­té si cette visite reste sans lendemain, c’est-à-dire sans lui assurer le suivi, sans solutionne­r les problèmes et carences qu’elle a révélés de visu? A quoi bon promettre, dans la vidéo, monts et merveilles aux citoyens rencontrés, si on est, pour une raison ou pour une autre, dans l’impossibil­ité de tenir ses promesses? «Ils n’arrêtent pas de nous bluffer sur facebook, en nous prenant pour des idiots, peste un habitant de l’ariana, qui jure qu’il n’y croit plus».

Retour de manivelle

Face à la poursuite de ce qu’ils appellent désormais «la mascarade de facebook», les habitants ont non seulement crié leur ras-le-bol, mais aussi opté pour la contre-offensive, à travers des ripostes tantôt virulentes, tantôt hilares, illustrées par des vidéos accablante­s sur la Toile. La dernière qui circule encore est filmée par un résident de la cité Ennasr (gouvernora­t de l’ariana) qui y a fait le procès du maire de la ville, des photos de colonnes de saletés jalonnant une chaussée à l’appui! Sans commentair­es...

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