Un nouveau modèle de gouvernance
Le Projet de gestion intégrée des paysages forestiers assurera à terme le marketing territorial des forêts tunisiennes et l’inclusion sociale et économique de leurs populations.
Comment valoriser les forêts tunisiennes, un secteur hautement potentiel, toutefois sous-exploité ? Une question cruciale, non seulement pour la lutte contre l’exode rural et le terrorisme, mais aussi pour la restructuration d’un secteur miné par la monopolisation. Tout d’abord, il est à noter que la Tunisie dispose d’un total d’un million 100 mille hectares de superficie forestière, localisée dans le Nord et le Centre-ouest du pays.
Aubaine ou malédiction
La population forestière en Tunisie est estimée à environ un million d’individus, à savoir 250 mille ménages. Soit l’équivalent d’un hectare par individu. Ce qui aurait été une véritable aubaine pour les habitants des zones forestières. Mais la réalité est tout autre. Malheureusement, les forêts, notamment dans les régions frontalières, ont été désertées en raison des conditions de vie très difficiles. Elles sont devenues le fief du terrorisme et de la pauvreté. Afin de protéger les forêts, les autorités dépensent 150 millions de dinars par an. En contrepartie, les revenus enregistrés dans ce secteur ne dépassent pas les 10 millions de dinars. Sachant que la part de la Tunisie dans le marché forestier mondial est de 0,000014%, et que la demande internationale en matières forestières est en perpétuelle croissance, passant de 33 milliards en 2017 à 500 milliards estimés en 2050, l’on peut conjecturer le manque à gagner dans ce secteur. En effet, le secteur forestier est miné par la monopolisation. C’est ce qu’a affirmé M. Sofiène Garbouj, coordinateur du Projet de gestion intégrée des paysages forestiers, en marge de la conférence nationale de la femme rurale, qui a été tenue le 15 du mois dernier. Il a expliqué que le système d’exploitation des ressources forestières souffre, essentiellement, de l’hégémonie d’un bloc de 45 exploitants, dont 13 monopolisent l’exploitation du Romarin, plante médicinale phare des montagnes tunisiennes. Outre l’exploitation informelle de la main d’oeuvre féminine, qui représente 80% du total de la main-d’oeuvre forestière. De cette situation, il résulte une marginalisation et un exode rural massif des habitants des forêts.
Un projet de 280 millions de dinars
Afin de valoriser les ressources et protéger davantage les zones forestières, le ministère de l’agriculture, des Ressources hydrauliques et de la Pêche a, récemment, lancé un projet qui instaure un nouveau modèle d’exploitation des ressources forestières. Avec un coût total s’élevant à plus de 280 millions dinars, le projet permettra à la population des forêts de bénéficier de leur droit d’accès notamment économique aux ressources forestières. En contrepartie, les habitants doivent, d’une part, se structurer sous forme de Groupements de développement agricole GDA et, d’autre part, assurer l’aménagement et la protection des forêts. Pour ce faire, des projets pilotes de gestion et de gouvernance ont été entamés, à cet effet. Le modèle est basé sur une relation triangulaire où l’etat joue le rôle d’intermédiaire entre les GDA et les opérateurs économiques, notamment les exportateurs et les industriels.