Le début d’une escalade annoncée
Le Groupement des coordinations régionales des ouvriers de chantier a organisé, le 8 novembre, une manifestation devant les sièges de L’UGTT dans tous les gouvernorats, suivie de sit-in devant les centres de souveraineté. Une escalade annoncée qui se poursuivra jusqu’au règlement définitif du dossier, assurent les organisateurs.
‘’Devant la politique de procrastination, de nonchalance et de silence du gouvernement face à nos droits constitutionnels, nous annonçons un mouvement général qui commence devant les sièges de L’UGTT dans les régions et qui se terminera devant les sièges de gouvernorat’’, nous ont confié, hier, Hiba Saâdi (pour Tunis) et Kamel Bouzaïène (pour Ben Arous), les représentants du Groupement des coordinations régionales des ouvriers de chantier. Cette manifestation est la première des sept positions affichées par le Groupement, avec l’annonce d’escalade vers de nouvelles formes de militantisme, l’attachement à mettre fin à toutes les formes d’emploi précaire, le refus des demi-mesures du gouvernement, la délégation à L’UGTT pour défendre sa cause, l’appel à l’opinion publique pour soutenir l’application du Code de la Fonction publique et l’invitation de tous les ouvriers de chantier dans le pays à observer les règles de discipline et de pacifisme lors des manifestations.
Menace d’insurrection
Ces 7 positions du Groupement ayant été communiquées au gouvernement, nous avons demandé à nos deux interlocuteurs si celuici ou tout autre organe de l’etat avaient réagi d’une manière ou d’une autre à leurs revendications. ‘’Personne n’a réagi à l’exception de L’UGTT qui nous a assurés de son soutien. En vérité, la dernière réaction du gouvernement remonte au 22 février 2018 quand il nous a fait ses propositions à la suite de la tenue de la commission 5+5. Des propositions que nous avons déclinées, compte tenu de leur manque de sérieux. Il s’agit de 3 mesures : une offre de 12.600 dinars pour les partants volontaires, la formation puis l’octroi d’un microcrédit pour ceux qui le souhaitent, la création d’une société de services qui travaillera sur un principe similaire à celui de la sous-traitance et qui consacre encore la fragilité de l’emploi’’, nous répondentils.
Après la manifestation devant L’UGTT, les représentants des ouvriers de chantier ont tenu une réunion de coordination régionale dont le message principal nous est confié par Saâdi et Bouzaïène : ‘’C’est un appel au chef du gouvernement Youssef Chahed : il est temps que le dossier soit réglé une bonne fois pour toutes, sinon ce sera le début de l’insurrection des ouvriers de chantier !’’
Le syndrome Akram Nahli
Lors de notre entretien, nos deux interlocuteurs nous ont affirmé que leur plus grand regret est que l’opinion publique semble ignorer que cette appellation des ‘’ouvriers de chantier’’ n’est absolument pas exacte puisque les membres du Groupement ne comptent pas seulement de simples ouvriers parmi eux mais aussi des détenteurs de Bac+5, Master, et même en phase de Doctorat. ‘’Le public ne sait pas que nous ne travaillons pas seulement dans les domaines de la propreté et de l’agriculture. Nous sommes des agents de l’administration, des surveillants, infirmières, comptables, agents de guichet à la Poste, la Cnss, la Cnrps… mais nous ne percevons qu’un maigre salaire qui est passé de 235 dinars en 2011 à 372 dinars en 2018 ; autant dire inférieur au Smig (383 dinars) et au Smag (417 dinars)’’, nous assurent Saâdi et Bouzaïène.
Il reste encore un point particulièrement douloureux considéré comme un syndrome par les ouvriers de chantier. Il s’agit du cas de Akram Nahli qui a son Baccalauréat et son permis de conduire et qui a été engagé à la faveur du ‘’Mécanisme 16’’ en 2009. Et comme la ‘’catégorie’’ des travailleurs de chantier n’a été formalisée qu’en 2011, il s’est retrouvé complètement hors circuit ; ne faisant pas partie de ce nouveau corps mais aussi en dehors du mécanisme qui a cessé d’exister. Marié et père d’un enfant, il représente tous ceux qui étaient là avant 2011 et qui sont aujourd’hui comme suspendus entre la terre et le ciel !