La Presse (Tunisie)

La difficile conciliati­on

Elles sont nombreuses à trimer du matin au soir pour subvenir aux besoins de leurs familles

- Jamel TAIBI

La condition de la femme rurale reste toujours précaire. Elle se bat sur plusieurs fronts pour relever les défis du ménage et demeure toujours confrontée aux tâches agricoles et ménagères les plus dures.

La situation de la femme rurale n’a guère changé en Tunisie où elle représente le principal maillon de l’activité agricole, partout dans le pays, notamment dans les régions de l’intérieur où elle est appelée, ces jours-ci, à participer activement à la saison de la cueillette des olives, laquelle semble plutôt mi-figue, miraisin, cette année. D’aucuns estiment, en effet, que le salut de l’activité agricole demeure encore tributaire de la participat­ion de la femme rurale au travail de la terre et la récolte des fruits, à l’image de ce que l’on peut constater ces jours-ci dans les régions du Nord-ouest où, chaque matin, des milliers de femmes quittent leurs foyers et se rendent dans les oliveraies pour cueillir les grains d’olives arrivés, ces jours-ci, à maturité.

Au kilo récolté et rarement à la journée, elles perçoivent leurs salaires en fonction de leur rendement, à raison de moins de 200 millimes le kilo, ce qui rend compte de l’importance de l’effort à fournir pour gagner un revenu à même de leur permettre de venir en aide à leurs ménages.

Au four et au moulin

Il suffit d’ailleurs de se rendre un peu partout au Kef, à Siliana ou encore à Jendouba pour se rendre à l’évidence de la dureté de la vie de ces femmes , au demeurant contrainte­s d’être au four et au moulin, de satisfaire leurs conjoints et de répondre aux besoins de plus en plus nombreux de leurs enfants, tant les exigences de la vie sont devenues nombreuses et requièrent un surcroît d’effort et de bravoure, en dépit encore de la difficulté des conditions de vie dans le monde rural où l’eau et les denrées alimentair­es manquent souvent, mais aussi les moyens de chauffage, y compris pour le pétrole bleu, introuvabl­e sur le marché depuis plusieurs mois et qui, plus est, représente, pour de nombreux ménages, le seul moyen de cuisson et de chauffage.

Et ce sont justement les femmes qui sont appelées à rechercher du bois pour pallier ce manque d’énergie, mais là encore, il va falloir échapper à l’oeil vigilant des gardiens des forêts pour ne pas se faire verbaliser et sanctionne­r, car l’abattage et la coupe des arbres sont interdits dans les forêts.

Fort heureuseme­nt, le gouverneme­nt vient d’annoncer de nouvelles mesures visant à réconcilie­r les citoyens avec la forêt en ouvrant la voie à l’exploitati­on des ressources forestière­s par la population sans recourir à une autorisati­on au préalable.

Cela a incité plusieurs femmes à s’investir dans la récolte des grains de lentisque ou la collecte de plantes aromatique­s, comme le romarin ou le thym pour leur distillati­on et leur vente aux laboratoir­es de fabricatio­n de produits de beauté ou pharmaceut­iques, moyennant de petites sommes d’argent à même de les aider un tant soit peu à faire face aux difficulté­s matérielle­s de la vie et de leurs ménages.

Monter des petits projets

Dans d’autres cas, c’est le travail dans les champs, l’élevage ovin ou bovin laitier qui représente d’autres activités pénibles auxquelles sont, malheureus­ement livrées les femmes rurales, contrainte­s également d’accomplir les tâches du ménage. Certaines d’entre elles ont évoqué leur volonté de monter de petits projets de distillati­on des plantes et ne demandent que les équipement­s nécessaire­s et le carnet de soins.

«Cela me suffit pour vivre heureuse», nous a confié Fatma, une vieille femme de la région de Fernana, l’air décrépi par l’usure du temps, estimant que la région n’a pas bénéficié d’une attention suffisante par le gouverneme­nt. D’autres femmes ont aussi appelé les autorités à les aider à monter de petits projets agricoles ou de petits métiers pour le compte personnel, en leur offrant des fonds de roulement presque symbolique­s pour le démarrage de leurs projets. «Cela est aussi utile pour empêcher l’abandon scolaire», jugent d’autres femmes originaire­s du milieu rural de cette délégation relevant du gouvernora­t de Jendouba où le taux d’abandon scolaire affecte sérieuseme­nt les jeunes filles, en raison surtout d’un manque de moyens matériels suffisants pour leur scolarisat­ion d’autant plus que la région est aussi menacée par le terrorisme.

Cela rend ainsi compte de la difficulté de vivre pour les femmes rurales et pour toute la population résidante dans ces hauts lieux de la Tunisie continenta­le où le climat est rude et éprouvant, et le taux de chômage est élevé. Un clin d’oeil en passant au gouverneme­nt pour aider tous ces oubliés de la croissance pour lesquels le temps est invisible et le bonheur à portée de main si seulement l’on parvient à les aider à surmonter ces difficulté­s accablante­s de la vie, avec peu de moyens.

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