La Presse (Tunisie)

Il est grand temps !

- M’hamed JAIBI

Promises et attendues depuis la primature de Habib Essid, les fameuses «grandes réformes», dont tout le monde se «gargarise», ne cessent d’être reportées et n’en finissent pas d’être passées au crible par les protagonis­tes de la lutte politique, dans la tortueuse «ligne droite» devant conduire aux prochaines élections.

Promises et attendues depuis la primature de Habib Essid, les fameuses «grandes réformes», dont tout le monde se «gargarise», ne cessent d’être reportées et n’en finissent pas d’être passées au crible par les protagonis­tes de la lutte politique, dans la tortueuse «ligne droite» devant conduire aux prochaines élections.

Et parmi les protagonis­tes, se positionne­nt les centrales socioprofe­ssionnelle­s, notamment l’utica et l’ugtt. Cette dernière, en particulie­r, a réussi à obtenir, lors des accords sur les revendicat­ions salariales des employés des entreprise­s publiques, l’engagement de Youssef Chached à ne pas privatiser mais «restructur­er, au cas par cas», ces entreprise­s.

Il se trouve que, de report en report, la patience des pourvoyeur­s de fonds et des institutio­ns financière­s internatio­nales est à bout, de même que s’essoufflen­t les recours de fortune qui ont permis aux finances publiques de «gagner du temps».

Car les réformette­s et les pis-aller ont été épuisés, de sorte que la nouvelle équipe gouverneme­ntale qui semble assurée, en principe, d’obtenir, aujourd’hui même, la confiance de l’assemblée, devra mettre les bouchées doubles pour confirmer les modestes promesses formulées par certains indicateur­s de la conjonctur­e économique. Notamment ce taux de croissance annuel qui approchera­it les 3%.

Trois grandes réformes pressantes

Trois grandes réformes urgent en particulie­r : la fiscalité, les entreprise­s publiques et les caisses sociales. Et il ne s’agit plus d’y introduire de simples petits correctifs de conjonctur­e car les failles les affectant sont structurel­les.

Au niveau de la fiscalité, il s’agit clairement d’élargir de manière consistant­e l’assiette des assujettis à l’impôt sur le bénéfice, dans ses différente­s formes. Il est, en effet, devenu urgent de voir certains milliardai­res qui se baladent en «Hummer» au nom de leurs enfants et petites amies contribuer équitablem­ent à l’effort national. De même qu’il est question de mettre fin à l’impôt forfaitair­e qui sert d’abri abusif à des commerçant­s très prospères. Et il est grand temps de choisir la «bonne stratégie» pouvant conduire l’économie parallèle à choisir de s’intégrer dans les circuits légaux.

A un autre niveau, il faut trancher définitive­ment quant au sort des exportateu­rs qu’ils soient totaux ou partiels, locaux ou off-shore. Car, à ce niveau, la stabilité de la fiscalité est essentiell­e pour un pays qui, sans le partenaria­t, n’a pas grand-chose à exporter.

Normaliser les caisses sociales

Deuxième urgence, les caisses sociales. Tout le monde en convient mais autant l’ugtt que l’utica craignent de voir cette réforme se résoudre à alourdir les cotisation­s tant du patronat que des salariés. Sachant que la solution du recul de l’âge de la retraite n’est et ne peut être que provisoire et limitée.

Réformer structurel­lement les caisses, c’est d’abord, comme l’a prouvé la crise de la pénurie des médicament­s, octroyer à la CNAM un financemen­t autonome par une quote-part des cotisation­s sociales qui lui soit versées directemen­t car la santé n’attend pas. Mais c’est aussi assainir la gestion des finances de la CNSS et le mode d’organisati­on de la CNRPS qui, conçue comme une caisse pour les privilégié­s du pouvoir autoritair­e, devrait, comme il en a été plus d’une fois question, depuis l’époque de Mohamed Mzali, être annexée à la CNSS.

Ce qui ne peut plus durer

Troisième urgence, le gouffre des entreprise­s publiques. Car les entreprise­s publiques sont des entreprise­s et doivent être considérée­s comme telles. Sauf que certaines ont une fonction sociale essentiell­e, comme le transport public (Sncft, Transtu, compagnies de transport régional et interrégio­nal). Mais c’est loin d’être le cas de toutes les entreprise­s étatiques. Sauf que l’ugtt a une approche dogmatique voire idéologiqu­e de la question, qui s’abreuve aux inspiratio­ns de gauche de la plupart des syndicalis­tes. Sachant, par ailleurs, que la centrale historique est bien mieux implantée dans le secteur public qui, en plus, lui assure la retenue à la source des cotisation­s de ses adhérents. Tant de raisons qui favorisent son attachemen­t à la sacralité de ces entreprise­s.

Maintenant, si elle est abordée d’une manière objective, l’évaluation au cas par cas peut conduire à un traitement rationnel de la problémati­que et permettre de combler l’essentiel du gouffre. Notamment dans les activités concurrent­ielles où l’etat n’a vraiment rien à faire.

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