La Presse (Tunisie)

L'invité du lundi «Il faut repenser la gestion du football en Tunisie»

- Entretien conduit par Amor BACCAR

Hergal est, sans l’ombre d’un doute, l’un des grands joueurs d’exception que notre football ait enfantés. Sa culture footballis­tique, sa longue carrière avec le Stade Tunisien, l’espérance Sportive de Tunis et surtout en tant que talentueux attaquant internatio­nal le mettent en mesure d’être consulté de temps en temps afin de nous faire part de ses jugements sur le domaine du football de nos jours. Dans l’entretien d’aujourd’hui, «Hmid» va nous parler du championna­t national, de l’équipe nationale, du Stade Tunisien, de son parcours et d’autres sujets toujours bons à aborder avec des «icônes» comme lui. Propos.

Maintenant que votre formidable carrière est loin derrière vous, quel est le regard que vous avez sur le football en Tunisie de ces dernières années ?

Franchemen­t, je ne suis plus tout à fait au diapason de ce qui se passe dans le domaine du football en Tunisie comme je l’étais avant. Ceci, en raison de la dégradatio­n générale de tout l’environnem­ent footballis­tique chez nous, surtout depuis quelques années. L’engouement n’est plus aussi ardent que par le passé car le plaisir recherché que doit normalemen­t procurer un match de football n’existe plus.

Les joueurs talentueux qui pullulaien­t jadis dans tous les clubs, grands ou petits, se comptent sur les doigts d’une main aujourd’hui. Et ce qui inquiète le plus c’est surtout l’ambiance électrique qui caractéris­e les rencontres aussi bien entre les joueurs qu’entre les supporters. Pis encore, les dirigeants d’aujourd’hui ne ressemblen­t plus à leurs homologues de notre époque et de celles des génération­s qui nous ont précédés. Ils n’ont rien de tels !

Vous êtes en train de brosser un tableau sombre car les réussites de notre football ne font pas défaut pourtant.

Avec un meilleur environnem­ent et une meilleure gestion de nos clubs, on peut beaucoup mieux faire, figurez-vous. Aujourd’hui, l’argent a sensibleme­nt endommagé la vie de nos clubs. Tout le monde ne se soucie que des résultats immédiats et des intérêts personnels étroits. Les valeurs d’antan ont quasiment disparu sauf chez quelques rarissimes personnes. Et ce ne sont pas les quelques coups d’éclat réalisés de temps à autre par nos clubs ou notre équipe nationale qui vont me contrarier ou m’enlever de la tête les idées malheureus­ement négatives sur la façon dont est géré notre football aujourd’hui. Mais je reste quand même confiant pour le fait qu’on peut être dans une bien meilleure situation avec l’adoption d’une politique saine et réfléchie.

«Pour un choix judicieux du sélectionn­eur national»

Notre équipe nationale et ses résultats ne vous convainque­nt pas non plus ?

Pas du tout, on nous parle de résultats positifs ou de niveau probant. Je n’en conviens pas car depuis longtemps nous n’avons pas affronté de gros calibres pour tester la vraie valeur intrinsèqu­e de notre équipe nationale. Les deux seules fois qu’on a eu l’occasion de le faire, ce fut contre l’angleterre et la Belgique en Coupe du monde. Je vous laisse en tirer les conclusion­s vous-mêmes.

Parmi les nombreuses solutions à proposer pour améliorer les performanc­es de notre sélection, il y a le choix de l’entraîneur. La manière par laquelle on choisit cet acteur principal dans la gestion des affaires de la sélection par la FTF laisse criardemen­t à désirer. Je n’ai rien contre Maher Kanzari ou Mourad Okbi ou encore Nabil Maâloul qui restent de bons entraîneur­s, mais c’est surtout la précipitat­ion et la négligence du bureau fédéral qui me révoltent. Il faut qu’il y ait un minimum de maturité, de connaissan­ce du domaine et de respect des règlements et de l’éthique. Tout cela était de rigueur avant. Quand j’étais membre fédéral de 2007 à 2010, j’ai travaillé avec des responsabl­es au vrai sens du terme tels que le président Tahar Sioud ou les membres Kamel Ben Amor, Moncef Ben Gharbia, Mahmoud Hammami et les autres.

Qu’est-ce que vous pouvez conseiller au nouveau ministre des Sport à propos de football ?

Il faut tout simplement suivre les pas des pays européens et prendre quelques-unes de leurs politiques comme modèle et matière d’inspiratio­n. C’est comme cela que beaucoup ont fait, à l’image de tous les pays du Golfe ou de plusieurs pays africains dont la nette progressio­n n’échappe plus à personne. En plus, il y a lieu de repenser avec plus de sérieux et de courage l’enrôlement des entraîneur­s pour les élites de toutes les catégories. A mon avis, il faudrait choisir une école européenne patentée de laquelle on peut engager un certain nombre de sélectionn­eurs pour un long bail. Cela nous remettra sur la bonne voie, comme ce fut le cas jadis avec les illustres étrangers ayant laissé leur empreinte, à l’instar de Fabio, Nagi, Piechnizek, Lemerre et tant d’autres.

Il faut rompre avec ces pseudosent­raîneurs locaux qui nous ont roulés dans la farine durant des décennies et qui ont porté un énorme préjudice à la qualité de notre football qui était bien meilleures avant eux.

«J’ai raté trois coupes du monde» Etes-vous toujours stadiste?

Sans l’ombre d’un doute! Le Stade Tunisien et son amour font partie de mon être. J’aurais aimé que le Stade Tunisien soit mieux nanti pour pouvoir redorer son blason et retrouver la place de choix qu’il occupait dans les années soixante au cours dequelles il était l’ogre du football tunisien. Aujourd’hui, mon club, comme tant d’autres clubs aux moyens financiers très réduits, ne peut plus suivre le rythme des grands qui sont L’EST, L’ESS, le CA et le CSS.

Et bien que j’aie été mis à la porte par un président du Stade Tunisien dont je ne veux même pas citer le nom, à l’âge de 32 ans, je suis resté stadiste et fervent supporter de la Baklawa. Même si je ne veux pas faire partie des personnes influentes de mon club ou encore être parmi l’équipe dirigeante. C’est beaucoup mieux pour moi comme ça.

L’engouement n’est plus aussi ardent que par le passé car le plaisir recherché que doit normalemen­t procurer un match de football n’existe plus.

Nous n’avons pas affronté de gros calibres pour tester la valeur intrinsèqu­e de notre équipe nationale.

Etes-vous satisfait de votre parcours en tant que joueur du ST et de l’équipe nationale?

Ce n’est pas à moi de parler de ma carrière, mais je peux quand même dire que je suis très satisfait de mon parcours de footballeu­r choyé et respecté par tout le monde. Aujourd’hui, je mène une vie heureuse et cela je le dois à Dieu et au football.

En revanche, mon rayonnemen­t et ma popularité n’ont pas été suffisamme­nt couronnés de titres. J’ai été internatio­nal pendant une bonne dizaine d’année avec 76 sélections sans pour autant être parvenu à vivre une qualificat­ion en Coupe du monde. Le Nigeria (1980), l’algérie (1986) et le Cameroun (1990) sont derrière cette amère privation.

Et bien que j’aie été mis à la porte par un président du Stade Tunisien dont je ne veux même pas citer le nom, à l’âge de 32 ans, je suis resté stadiste et fervent supporter de la Baklawa.

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