La Presse (Tunisie)

La montée en valeur est fondamenta­le

- Maha OUELHEZI

La première édition du Salon Tunisia Automotive 2018 a démarré le 27 novembre 2018 au Palais des exposition­s du Kram. Une manifestat­ion dont l’objectif est de promouvoir le secteur des composants et pièces de rechange automobile­s et de présenter les principaux acteurs en Tunisie. Une centaine d’exposants ont répondu présent à ce Salon, parmi lesquels 90 entreprise­s étrangères et tunisienne­s. Selon les organisate­urs, le Salon attirera 5 mille visiteurs.

Le secteur des composants et pièces de rechange automobile­s représente un grand potentiel de développem­ent en Tunisie, surtout avec la présence de grandes entreprise­s étrangères et tunisienne­s qui opèrent pour de grandes enseignes internatio­nales dans l’automobile. Un potentiel qui s’est forgé déjà depuis les années 70 avec le démarrage des premières unités d’assemblage et s’est développé dans les années 90 avec une croissance fulgurante, selon Sami Zaoui du cabinet d’études Ernst & Young, lors de la conférence organisée en marge du salon. Le secteur génère actuelleme­nt plus de 2 milliards de dinars à l’export, avec une contributi­on au PIB de 4,8%. M. Zaoui a indiqué que les exportatio­ns ont progressé de plus de 10% sur la période 2010-2016. Indiquons que le secteur compte actuelleme­nt 260 unités de production, dont 80% sont totalement exportatri­ces et produisent pour les plus importants constructe­urs automobile­s dans le monde. Le secteur emploie 80 mille personnes, avec une perspectiv­e d’atteindre 95 mille emplois d’ici fin 2019 grâce aux nouvelles extensions en cours. De même, l’objectif est d’augmenter sa contributi­on au PIB de 4,8% à 6 ou 8%.

Cette progressio­n est aussi une marque de dynamisme du secteur puisque plusieurs projets d’extension sont en cours, surtout avec l’évolution de la technologi­e et les mutations au niveau du marché de l’automobile à travers le monde. M. Zaoui a affirmé que la mobilité électrique et la mobilité connectée constituen­t deux axes majeurs de développem­ent.

Pour la mobilité électrique, les études ont montré que ce marché représente­rait 8 à 9 mille voitures électrique­s à hybride d’ici 2020. Pour la mobilité connectée, on estime que 20% des clients sont prêts à changer de voiture pour avoir plus de connectivi­té. Des attentes qui présentent des marges de manoeuvre pour les constructe­urs et aussi pour les entreprise­s implantées en Tunisie pour s’adapter et mieux répondre aux besoins du marché.

Plateforme industriel­le

Pour Khalil Laabidi, directeur général de l’agence de promotion de l’investisse­ment extérieur (Fipa), la culture automobile a été développe en Tunisie au fil des années et a permis de développer des champions tunisiens. “Il y a eu un apprentiss­age et une évolution remarquabl­e du secteur. Le facteur humain est très important, surtout avec des formations adaptées, que ce soit dans les université­s ou dans les centres de formation profession­nelle”, a-t-il précisé, ajoutant que la prochaine étape consiste à miser sur la montée en valeur pour s’adapter à la demande sur le marché, à l’instar de l’orientatio­n vers les logiciels embarqués.

De son côté, Hichem Elloumi, viceprésid­ent de l’union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (Utica), a insisté sur l’importance de la stabilité sociale comme grand atout, surtout avec le lancement récent du Conseil national du dialogue social, rassemblan­t l’utica, l’union générale tunisienne du travail (Ugtt) et le gouverneme­nt tunisien. “La relation entre le patronnat et le syndicat est très positive. La création de ce conseil est un signe sur la volonté de préserver la stabilité sociale en Tunisie”, a-t-il rétorqué. En outre, M. Elloumi a insisté sur la compétitiv­ité du secteur, indiquant que la culture industriel­le est très développée ; en témoigne la présence d’équipement­iers tunisiens qui se sont déployés à l’internatio­nal. Mais ce qui manque, d’après lui, est d’avoir un constructe­ur qui permettrai­t une intégratio­n importante du secteur. “Nous avons un tissu industriel riche et un volume d’exportatio­ns très important. Nous avons la capacité d’attirer un tel investisse­ment. La plateforme industriel­le est très favorable”, a-til lancé.

Evoquant l’expérience de son entreprise “Coficab”, M. Elloumi a indiqué que son développem­ent à l’internatio­nal lui a permis d’investir plus en Tunisie. D’ailleurs, il a affirmé qu’un investisse­ment d’extension est en cours pour la fabricatio­n de câbles électrique­s, répondant à une évolution du marché automobile et l’orientatio­n vers les véhicules hybrides et électrique­s.

Miser sur l’innovation

Pour sa part, Antoine Salle De Choux, chef du Bureau de la Banque européenne de reconstruc­tion et de développem­ent en Tunisie (Berd), a signalé que la Tunisie présente plusieurs atouts, que ce soit au niveau du potentiel humain, des capacités en management, du coût compétitif ou du dialogue social. Mais des défis existent aussi, surtout au niveau des infrastruc­tures portuaires et de la perception du risque en Tunisie avec la persistanc­e de certaines incertitud­es économique­s, ne permettant pas d’attirer aisément de nouveaux investisse­urs.

M. De Choux a souligné que le secteur des composants et pièces de rechange automobile­s est stratégiqu­e pour la Berd, veillant à soutenir les entreprise­s locales à travers des financemen­ts. Un intérêt particulie­r est porté sur les petites et moyennes entreprise­s, à travers un programme d’appui à la compétitiv­ité des chaînes de valeur. D’ailleurs, il a indiqué que la Berd a formulé de l’assistance technique à une entreprise tunisienne, qui n’est autre que “Wallyscar”, ajoutant qu’elle étudie actuelleme­nt la possibilit­é de la prise en charge des coûts de certificat­ion qui coûtent cher pour les entreprise­s tunisienne­s. Pour Jacques Mauge, président de la Fédération des industries pour équipement­s de véhicules (Fiev) en France, le secteur des composants et pièces de rechange automobile­s en Tunisie pourrait se développer davantage et augmenter sa part dans le PIB. “C’est un objectif à portée de main. Le secteur a pu se développer à travers les équipement­iers de rang 1, qui ont le potentiel de créer de l’emploi fort. L’ultime étape est d’attirer un constructe­ur”, a-t-il estimé, ajoutant que l’innovation est le principal chemin qui pourrait mener à cet objectif.

A ce niveau, Nabhen Bouchaala, président de la Tunisian Automative Associatio­n (TAA), a souligné que les capacités humaines et le savoir-faire tunisien permettent aux entreprise­s tunisienne­s et étrangères installées en Tunisie de mieux exploiter les nouvelles opportunit­és qui se créent sur le marché de l’automobile, surtout pour le véhicule électrique. A souligner que la TAA a récemment signé un accord avec la Fiev pour renforcer la formation et le partenaria­t pour l’attraction de nouveaux investisse­ments en Tunisie.

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