Un bijou maculé de vulgarité
Avec son film «Regarde-moi», Néjib Belkadhi, le réalisateur tunisien au talent incontesté, a interpellé les âmes sensibles et même insensibles avec le sujet délicat qu’il a choisi. Seulement il y a un franc «oui, mais…» à tenir en compte.
Avec son film «Regardemoi», Néjib Belkadhi, le réalisateur tunisien au talent incontesté, a interpellé les âmes sensibles et même insensibles avec le sujet délicat qu’il a choisi. Seulement il y a un franc «oui, mais…» à tenir en compte.
Il n’est guère aisé d’écrire le scénario d’un film dramatique ayant trait au thème lié à la différence de l’autre par rapport à la société, particulièrement quand il est question d’aborder le domaine délicat des anomalies ou des pathologies. C’est pourtant ce que notre réalisateur Néjib Belkadhi a merveilleusement bien réussi dans son nouveau film «Regarde-moi». Dans ce film qui a ému tous les cinéphiles qui l’ont vu, tous les ingrédients de la bonne recette cinématographique étaient réunis (ou presque). Et par-dessus tout, il y a la formidable prestation de l’enfant Idryss Kharroubi qui a magistralement incarné le rôle d’un enfant autiste qui rendait la vie difficile à tous ceux qui l’entouraient. Particulièrement à son père qui est parti en France pour refaire sa vie après s’être séparé de sa femme (Sarra) en Tunisie, la mère de l’enfant Youssef (l’autiste) et qui est revenu à Tunis spécialement pour lui, étant donné que Sarra était atteinte d’un accident vasculaire cérébral irréversible. La délicatesse et la sensibilité du sujet traité par Néjib Belkadhi lui dictaient d’être très pointu dans le choix des interprètes.
Aussi, le casting était judicieusement effectué dans la mesure où l’enfant Idryss Kharroubi, qui n’a aucune expérience cinématographique préalable, a tout juste été une vraie star. Sans pour autant arriver à éclipser Nidhal Saâdi qui a joué le rôle de Lotfi, père de l’enfant. Nidhal, que les Tunisiens ont particulièrement connu dans le feuilleton télévisé «Awled Moufida», a été impérial dans son jeu.
C’est que dans l’expression du visage de Nidhal, on pouvait en une fraction de seconde lire le courroux qui fait peur et la tendresse du père qui dépasse l’entendement. Il faut le faire !
De son côté, Sawssen Maâlej a été égale à elle-même. Ses larmes, vraies, dans la dernière séquence du film quand elle s’était rendue à l’évidence que son neveu Youssef, qu’elle aimait sincèrement, était enfin entre de bonnes mains auprès de son père qu’elle n’aimait pourtant pas puisqu’il était sur le point de réussir le miracle rêvé qu’aucun centre de réhabilitation ne peut vraiment garantir.
Le message de ce film est fort. Et ce qui a rehaussé cette belle réalisation de Néjib Belkadhi par-dessus tout, c’est incontestablement la superbe incarnation du surdoué Idrys Kharroubi, ce petit héros qui n’a absolument rien à envier aux autres enfants stars du cinéma mondial tels que Ricky Schroder dans «Le champion» de Franco Zeffirelli, ou Daniel Radcliffe dans «Harry Potter» et tant d’autres. Idryss Kharroubi a peut-être plus de mérite que les enfants stars connus par tous les cinéphiles du monde entier. En effet, sans dire la moindre phrase durant toutes les scènes du film, ce gamin a su très «professionnellement» bien véhiculer le fort message qui tenait à coeur pour Néjib Belkadhi.
Ce fut exactement similaire à ce qu’a réussi l’enfant Jackie Coogan dans «The kid» de Charlie Chaplin.
En revanche, il y a un bémol dans ce beau film, c’est qu’il a été éclaboussé par les gros mots proférés d’une manière (alors là) superflue. C’était comme une grosse mouche sur un magnifique gâteau. D’autant plus qu’il n’y avait aucune raison de recouvrir à ce genre d’usage qui risque, pour un grand nombre de cinéphiles idéalistes (et ce n’est pas un tort) de le répugner. Car franchement, aucun père de famille ne peut se hasarder à accompagner sa fille ou sa nièce pour voir ce film pourtant très bien fait. «Akhlakaouia» ou pas ! c’est un avis à respecter absolument je pense !