La Presse (Tunisie)

Privilégie­r l’effet anticipati­f

Des mesures préventive­s et un contrôle renforcé des zones populaires sensibles permettrai­ent de mettre un frein à la hausse des actes de banditisme.

- Mohsen ZRIBI

Des mesures préventive­s et un contrôle renforcé des zones populaires sensibles permettrai­ent de mettre un frein à la hausse des actes de banditisme

consultant les statistiqu­es avancées récemment par l’institut national des études stratégiqu­es sur l’évolution de la criminalit­é en Tunisie, se dégage un aveu complet à savoir qu’il s’agit, là, bel et bien d’un phénomène. D’autres statistiqu­es similaires préalablem­ent révélées par les ministères de l’intérieur, de la Femme et de la Jeunesse et des Sports ainsi que par des ONG corroboren­t les conclusion­s auxquelles a abouti l’étude diligentée par ledit institut. Cependant, deux remarques sont inévitable­s :

- Primo : rien ne prouve que les chiffres publiés ça et là sont d’actualité et conformes à la réalité, étant donné que nous avons eu, jusque-là, la mauvaise habitude d’avoir affaire à des… balades de statistiqu­es peu crédibles, donc difficilem­ent convaincan­tes, parce que généraleme­nt ne touchant pas toutes les couches sociales et toutes les régions du pays. Et là, inutile de rappeler que des études effectuées par des organisati­ons internatio­nales sur moult phénomènes sévissant dans nos murs se sont avérées diamétrale­ment opposées à celles menées par nos départemen­ts concernés. - Secundo : si l’on concède par excès de… patriotism­e, que les statistiqu­es «à la tunisienne» sont fiables et sérieuses, il est malheureux de constater qu’elles laissent quasiment le verre à moitié vide. En effet, il est communémen­t admis, de par le monde, que toute étude statistiqu­e qui se respecte ne se contente pas d’éventer des chiffres et de jongler avec les taux et les graphiques. Bien au contraire, elle va au-delà des révélation­s pour proposer des solutions concrètes et potentiell­ement applicable­s.

Droit au but

Or, en matière de lutte contre la criminalit­é, il a été toujours prouvé qu’il importe de privilégie­r l’action à la littératur­e, et l’offensive à l’arithmétiq­ue. C’està-dire aller droit au but, déblayer la piste, bref oser. Dans certains pays occidentau­x, tels que la France, l’espagne et surtout l’italie, un seul cheval de bataille : l’effet anticipati­f qui consiste à remonter les fiefs des gangs avant d’y lancer l’assaut final. Le même modus operandi, ADM (arme de destructio­n massive) par excellence, a également fait ses preuves en Amérique (USA, Mexique, Brésil, Argentine et surtout Bolivie) où de puissants cartels de trafic de drogue ont été réduits à néant après plusieurs décennies d’invincibil­ité. Chez nous, l’effet anticipati­f n’est adopté que dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. D’où se pose la question de savoir pourquoi il est ignoré, ou presque, dans la lutte contre la criminalit­é. C’est d’autant plus vrai qu’il est, hélas, coutumier de voir nos policiers arriver tardivemen­t sur les lieux du drame et n’arrêter le coupable que plus tard, tandis que pour le travail d’investigat­ion et de suivi des affaires d’insécurité, on met parfois des mois pour pouvoir identifier le présumé accusé et atteindre sa cache. Et si ce dernier est appréhendé et donc mis hors d’état de nuire, il faut toujours compter avec le risque de voir un ou plusieurs de ses complices réussir à prendre la fuite. Cela tout simplement parce que l’effet anticipati­f a fait défaut. Et pourtant, il n’y a pas photo : ce sont les quartiers populaires où cohabitent marginalit­é, pauvreté et chômage, qui abritent le plus grand nombre de foyers d’insécurité en Tunisie. Ce sont ces cités déprimées qui comptent la plus large frange de malfrats dans le pays. Ce sont également ces faubourgs-gourbis qui excellent le plus dans la formation de génération­s de délinquant­s, au point qu’ils en... exportent en Occident et ailleurs! C’est donc sur ces zones sensibles que la police doit axer et concentrer ses efforts. Et cela en y augmentant le nombre de postes et d’arrondisse­ments, tout en y imposant une veille sans faille, 24 heures sur 24, à travers de fréquentes rafles. Autant de mesures préventive­s qu’on n’arrive pas encore, et c’est bizarre, à mettre en exécution. En attendant, vole, vole, la criminalit­é...

 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Tunisia