La Presse (Tunisie)

Beaucoup reste à faire

Dans les villages reculés, peu de véhicules de transport prennent le risque de s’aventurer sur des pistes et des routes dont l’état est déplorable.

- Fatma ZAGHOUANI

Tout le monde sait que le transport est étroitemen­t lié à la vie économique d’un pays. Il garantit aux citoyens une liberté de mouvement en facilitant le choix du domicile et du lieu de travail et contribue à réduire les inégalités au niveau des conditions de vie. Les domaines de l’industrie, de l’éducation, de la santé, du commerce et de l’artisanat ne peuvent travailler à plein rendement et s’adapter aux besoins économique­s que si des moyens de transport développés leur en offrent la possibilit­é.

Dans un gouvernora­t comme Kairouan où le trafic ferroviair­e est inexistant, la totalité des transports des personnes et des marchandis­es est assurée par des moyens de transport publics (bus, poids lourds, taxis) ou privés (véhicules, camionnett­es, estafettes, louages, charrettes tirées par des chevaux, etc.). Et comme la plupart des 13 délégation­s souffrent d’une faible infrastruc­ture au niveau du réseau routier, les accidents constituen­t sans aucun doute un phénomène inquiétant, et ce, malgré les efforts déployés pour améliorer la sécurité de la circulatio­n.

De nombreux décès de travailleu­ses agricoles

Notons dans ce contexte que le déplacemen­t de la femme rurale aux différents services publics (santé, éducation, transport) n’est pas toujours garanti, c’est ainsi qu’elle fait en général 6 km à pied pour se rendre au centre de soin de santé de base le plus proche pour se faire soigner. Par ailleurs, comme elle est obligée de s’adonner au travail agricole pour subvenir aux besoins de sa famille, elle est confrontée à la souffrance due au transport quotidien dans des véhicules de fortune pour accomplir des tâches de collecte, de cueillette, de sarclage, de plantation, de moisson ou de battage. En effet, on a enregistré au cours des dernières années beaucoup d’accidents de camionnett­es vétustes où s’entassent de dizaines d’ouvrières âgées entre 16 et 65 ans, sans aucune assurance. Beaucoup d’entre elles ont dû être hospitalis­ées et subir des interventi­ons chirurgica­les. D’autres ont trouvé la mort. Leïla Fatnassi, 22 ans, une jeune ouvrière de Sbikha, a eu deux jambes fracturées. Elle a été obligée de quitter l’école à l’âge de 10 ans : «Comme nous habitons à 7 km de l’école et que nous ne disposons pas de transport rural, j’ai souffert des trajets à pied, hiver comme été, avec la présence de clochards et d’animaux sauvages. C’est pourquoi ma famille m’a obligée à quitter l’école pour m’occuper des travaux agricoles et depuis, je vis en marge de la société et de la civilisati­on».

Absence de transport scolaire

Dans les villages reculés du gouvernora­t de Kairouan, on déplore l’état lamentable des routes et des pistes qui mènent aux écoles et qui rendent impossible l’utilisatio­n d’un bus pour le transport ou le ramassage scolaire. Outre l’état de délabremen­t de beaucoup d’institutio­ns éducatives, la pauvreté des familles, l’absentéism­e des enseignant­s et l’absence d’eau potable, le transport scolaire fait défaut dans plusieurs localités. D’où le calvaire des jeunes élèves qui affrontent chaque jour des moments difficiles et qui font parfois leurs besoins en pleine nature. C’est ce qui explique en grande partie, l’échec et l’abandon scolaires. D’après la section régionale de la Ligue tunisienne des Droits de l’homme de Kairouan, 4.500 élèves font chaque jour plus de 5 km à pied pour atteindre leurs écoles. Certains ont recours à l’auto-stop en empruntant des charrettes de fortune, des tracteurs ou des camionnett­es non sécurisées. Par ailleurs, 3.170 élèves ont la chance d’emprunter les moyens de transport rural agréés par le gouvernora­t à travers des convention­s avec 139 chauffeurs dont les véhicules sont en bon état. Au total, 68 écoles sur un total de 254 situées en milieu rural sont desservies par le transport rural réglemente et sûr. En ce qui concerne la Soretrak, elle a consacré cette année 117 bus pour le transport scolaire qui effectuent quotidienn­ement 548 navettes au profit de 24.017 élèves. Néanmoins, on assiste souvent à des pannes des bus vétustes et qui ne sont pas ponctuels. D’autres font l’objet de dégâts par des jets de pierres et des agressions commis par des délinquant­s qui refusent de payer leurs tickets. Cela se répercute négativeme­nt sur l’assiduité des élèves qui sont obligés de s’absenter.

C’est pour toutes ces raisons que des représenta­nts D’ONG et de différente­s associatio­ns souhaitera­ient l’aménagemen­t des routes de façon à les rendre praticable­s, le changement de l’horaire scolaire de façon à ce que les cours se terminent à 15h00, l’augmentati­on du nombre d’internats et de cantines. Outre les accidents de la route, il convient de citer également les atteintes portées à l’environnem­ent pas le bruit et par les gaz d’échappemen­t des véhicules vétustes et des poids lourds qui traversent impunément le centre-ville et qui provoquent des accidents mortels et beaucoup de goulots d’étrangleme­nt.

Espérons que le but de la politique des transports dans notre pays sera axé davantage sur le niveau élevé de la performanc­e des moyens de transport tout en veillant à ce que les moyens de communicat­ion soient à la fois plus sûrs, moins chers et plus respectueu­x de l’environnem­ent.

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