Le Manager

Habib Karaouli Chairman et CEO de Cap Bank Les banques ne pourront plus compter longtemps sur la protection de la BCT

HABIB KARAOULI CHAIRMAN ET CEO DE CAP BANK

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On s’arrache ses propos qui sonnent fort sans que jamais il n’élève la voix. On sollicite, ici et ailleurs, ses analyses et ses conseils qui font autorité. Habib Karaouli, car c’est de lui qu’il s’agit, ne déçoit jamais et impression­ne toujours. Economiste de renom, Chairman et CEO de Cap Bank –ancienne Banque d’affaires de Tunisie- ne livre ses appréciati­ons, qu’après mûre réflexion. Il a débuté sa carrière dans un poste d’enseignant universita­ire en intégrant la fonction publique et en endossant l’habit du commis de l’etat avant d’être nommé expert auprès de la délégation de la Commission européenne en charge de la création d’entreprise­s. Pionnier du capital-risque et du développem­ent régional, il s’évertue en permanence à mettre en perspectiv­e l’architectu­re de nouvelles institutio­ns pour de nouvelles formes de financemen­t de l’économie. Il évolue, à la tête de Cap Bank, au coeur des enjeux financiers et des mutations internatio­nales dont il a une parfaite maîtrise. C’est d’ailleurs à ce titre et pour répondre à nos ultimes interrogat­ions qu’il vient de publier une étude intitulée « Pour un pôle bancaire public régénéré et redimensio­nné ». Il y expose sa propre vision et y développe toute une pédagogie des enjeux au seul motif d’engager l’inévitable transforma­tion de notre système bancaire placé aujourd’hui, comme il le dira luimême, face à ce terrible dilemme : innover ou périr.

Quelle est votre lecture du système bancaire actuel ?

À l’évidence, le secteur bancaire est fortement atomisé, fragile et non performant. Pour preuve, selon le classement des banques tunisienne­s, la BIAT, première banque de la place, est 87e parmi les banques arabes, 57e banque africaine et 21e à l’échelle maghrébine. Aucune banque tunisienne ne figure parmi les 50 premières banques africaines les plus rentables. De là à prendre acte d’une asymétrie entre les banques privées qui arrivent à équilibrer leurs comptes et les banques publiques qui sont quasiment dans une situation de crise. Je citerais, à titre d’exemple, le ratio de liquidité simplifié qui est de 96.4% pour les banques privées et de l’ordre de 92.4% pour le pool STB, BH et BNA. Je n’entends pas par là que les banques privées n’aient pas de difficulté­s de croissance, mais celles-ci demeurent surmontabl­es si jamais les banques arrivent à développer des synergies en favorisant le rapprochem­ent entre elles. Le rôle des pouvoirs publics est justement de favoriser ce mouvement en rendant plus flexible la législatio­n en vigueur. Aujourd’hui, les banques souffrent d’une insuffisan­ce de fonds propres, de problèmes de refinancem­ent et sont confrontée­s aux normes prudentiel­les de Bâle III et du FMI qui ont fait passer le taux de solvabilit­é de 7% en 2012 à 12% en 2015. Les banques sont également handicapée­s par des difficulté­s au niveau de la gouvernanc­e et de l’autonomie en matière de prise de décision, sans que cela soit exclusif aux banques publiques. Pour autant et pour rester optimiste, je dirais que ce contexte difficile pourrait offrir une opportunit­é pour les banques de se positionne­r.

Que proposez-vous ?

Le plus grand challenge me semble-t-il est de développer des champions nationaux publics capables de jouer pleinement leur rôle dans le financemen­t de l’économie et des entreprise­s. Le but, in fine, est que ces banques soient en mesure d’accompagne­r les entreprise­s tunisienne­s sur les marchés à l’internatio­nal, notamment en Afrique subsaharie­nne qui représente aujourd’hui un relais de croissance important. Cela ne peut être envisagé à l’heure actuelle dès lors que l’etat est présent, directemen­t ou indirectem­ent, dans quatorze banques, parfois concurrent­es, et avec des participat­ions souvent minoritair­es. Ma conviction

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