Logistique : liaisons maritimes
Les questions sur les difficultés que rencontre le secteur du transport maritime- mais surtout les solutions à apporter -, sont des plus pressantes. Une conférence a été organisée par l’institut Méditerranéen de Formation aux Métiers Maritimes et l’escola Europea de Short Sea Shipping en l’occasion.
Dans le cadre du Plan quinquennal 2016–2020, la Tunisie aspire à améliorer la part de la logistique dans son PIB. D’après Wissem Mahjoub, directeur général de la logistique au ministère du Transport, cette contribution devrait passer de 4.5% en 2010 à 7% à l’horizon de 2020. Le chemin, de l’aveu même du responsable, ne sera pas facile. Elaborée depuis 2007, la stratégie nationale de la logistique peine toujours à se concrétiser. De plus, le responsable estime que la Tunisie souffre d’un manque de savoir-faire dans certaines spécialités de la logistique ainsi que d’infrastructures développées. Tout cela n’est pas sans conséquences. Déjà, le coût de la logistique n’est pas optimisé : alors qu’il est de 20% par rapport au PIB en Tunisie, la moyenne dans les pays émergents n’est que de 15%. Le responsable se veut tout de même rassurant : plusieurs chantiers sont déjà en cours, annonce-t-il.
À Radès, le plus important port de commerce du pays, plusieurs chantiers ont déjà été entamés. Ce point focal assure à lui seul 28% du trafic
8 conteneurs à l’heure à Radès et de 16 conteneurs à Sfax avec 0 rade. Elle avait un rendement meilleur que celui de la société Groupement des Manutentionnaires (GMS) à Sfax. La question qui se pose est la suivante: pourquoi on ne fait pas dérouter quelques bateaux vers Sfax plutôt que de les laisser une semaine au port de Radès ? Il faut savoir que le tirant d’eau du port de Sfax est plus important que celui de Radés avec à peu près une différence de 50 cm. Il y a également une grue avec une flèche qui est plus longue que celle au port de Radès. Coûterait-il plus cher de ramener un conteneur de Sfax à Tunis que de passer des jours en rade.
Je reviendrai à ce pic de 2000 jours au port, à quoi sont dus ces délais invraisemblables? Pour ce cas précis, cette période était justifiée par l’action de nettoyage qu’a subie le port. Il y avait des conteneurs en souffrance pour lesquels ils ont dû trouver des solutions entre la douane et l’importateur. Il faut savoir que lorsque le bateau accoste, il est déchargé et le transporteur a une semaine pour avertir le titulaire de la marchandise. A partir de cette date, ce dernier a une semaine pour faire sa déclaration en douane. Chaque retard engendre un autre retard. Par ailleurs, il faut reconnaitre également que certains importateurs laissent trainer leurs marchandises au niveau du port. Par exemple, suite à des opérations d’inspection, on a constaté la présence d’une marchandise qui est arrivée au mois de février et dont la déclaration en douane n’a été faite qu’au mois de juin, soit quatre mois plus tard. Alors que cette procédure aurait dû être faite dans les quinze jours après son arrivée au port. En réalité, le titulaire de l’avis d’arrivée a refusé de payer les droits de douane faute de trésorerie. Autre chise, le délai moyen entre l’admis conforme de la douane et la sortie des marchandises est de cinq jours avec une pointe de 75 jours alors qu’il ne peut prendre qu’une demi-journée, voire quelques heures. Ce retard au niveau des procédures est malheureusement à la charge de l’opérateur économique ou importateur.
Vous voulez dire que le temps d’accostage est dû en grande partie à l’opérateur lui-même ? Tout à fait, généralement on impute ce temps à la douane, mais c’est plus parce qu’elle intervient en bout de chaine. Plusieurs formalités sont réalisées avec d’autres intervenants. Pour éclaircir tout amalgame, on avait entamé à TTN un projet permettant d’identifier le temps d’intervention de chaque intervenant dans la chaine. L’objectif de la publication de ces statistiques était d’identifier la responsabilité de chaque intervenant la STAM, le transporteur, l’importateur économique et la douane. L’affichage mensuel de ces statistiques incitera les intervenants à ne pas figurer en haut de la liste et introduire une certaine transparence au niveau des transactions. La mise en place de ce projet pourra, à mon avis, diminuer le délai de 25% en six mois et de 50% en un an, c’est-à-dire passer de 18 à 9 jours. Ceci générera à son tour non seulement une réduction des coûts induits à la charge de l’opérateur économique mais aussi une multiplication par deux de la capacité de stockage.
Pouvez-vous nous parler de l’impact de la signature électronique dans ce secteur ? La signature électronique est un élément indispensable pour la dématérialisation des procédures car c’est ce qui attestera de l’origine du document numérique, surtout si la législation exige à ce que le document soit signé comme cela est le cas des déclarations en douane. Ainsi la signature électronique permettra la dématérialisation des procédures ce qui contribuera à la diminution des délais de procédures et des délais de séjour de la marchandise au port. La procédure ordinaire nécessite du temps, ne serait-ce que celui de l’acheminement des documents qui exige des déplacements alors qu’utiliser la signature électronique permet un acheminement électronique à la vitesse de la lumière, ce qui est le cas pour l’obligation cautionnée qui permet d’avoir une obligation qui est immédiatement et instantanément transmise à la douane à partir du moment où elle a été confirmée par la banque. Pour preuve de l’intérêt de la digitalisation, le temps moyen de traitement des déclarations ne douane qui passent par le couloir vert ne dépasse pas quelques minutes (moins de 6 minutes) grâce à l’introduction de la sélectivité ou gestion du risque et à la possibilité d’automatiser certains contrôles et traitements. De même, il y a un ensemble d’opérations qui doivent être dématérialisées et qui permettront de diminuer les délais des procédures et de rendre la vie plus facile au citoyen.
Quelles solutions préconisez-vous ? En réalité, nous pouvons agir sur deux volets. Le premier consiste à étudier les possibilités de simplification du processus complet et en deuxième lieu, dématérialiser tout le processus de dédouanement en dehors d’une seule opération qui est la visite du conteneur. Chaque opération de dématérialisation doit être accompagnée d’une opération d’optimisation du processus voire repenser tout le processus en prenant en considération les opportunités d’optimisation introduites par toutes les technologies et outils pouvant être utilisés. Par exemple, l’introduction d’un systèe de gestion du risque ou de sélectivité permet de réaliser un meilleur ciblage des dossiers à risque sur la base d’un calcul de risque qui est associé au conteneur, à l’importateur de la marchandise, au fabriquant, au pays de transbordement… pour décider du type de traitement qui sera accordé au conteneur : sortie immédiate (couloir vert) ou étude documentaire approfondie (couloir orange) ou visite du conteneur (couloir rouge), la visite documentaire devant aboutir à une réorientation du conteneur vers le couloir rouge ou le couloir vert. A Singapour le temps moyen de traitement de toute la procédure est de 15 minutes en moyenne, voire moins. Certaines douanes dans le monde vont jusqu’à relever le matricule du conteneur, pour voir par quels ports il a transbordé. Ils associent un risque plus important pour certains ports que pour d’autres. Ce processus peut également réussir en introduisant le concept de pré-dédouanement u dédouanement anticipé qui consiste à accepter d’entamer la procédure de dédouanement avant l’arrivée du conteneur au port. Ce concept est entré en vigueur en Europe et a été instauré par ce code unifié des douanes. En Tunisie, et en préparation, une circulaire conjointe entre le ministère du Transport et le ministère des Finances a été publiée en 2016 et qui exige à ce que le manifeste navire soit transmis au départ du navire du port de départ pour une marchandise qui est expédiée ou bien au plus tard 24 heures avant l’arrivée de la marchandise au port tunisien. Une fois que le manifeste est arrivé en format électronique, un avis de pré-arrivé en format électronique pourra être transmis et la procédure du pré-dédouanement peut être appliquée. Dans ce cas, le système de sélectivité pourra êre appliqué avant l’arrivée de la marchandise au port ce qui permettra aux conteneurs mis sur le couloir vert de sortir sans subir de visite, comme c’est le cas pour les entreprises totalement exportatrices et les opérateurs économiques agréés. Actuellement, la Tunisie est en train d’appliquer ce système pour les matières dangereuses qui font l’objet d’une déclaration anticipée et qui sortent du port dès qu’elles sont déchargées du bateau.
aux accidents qui endommagent nos équipements. D’ailleurs, le système de gestion de la maintenance assistée par ordinateur, que nous allons mettre en place, va nous permettre de faire le suivi automatisé des opérations de maintenance : savoir en temps réel quelle machine est en panne, sa localisation, les causes de la panne, etc. Et avec la mise en service très prochaine des grues à portique sur pneus (RTG), les opérations de chargement et de déchargement seront effectuées avec beaucoup plus d’efficacité. Ces RTG vont également nous permettre d’accroître la capacité de stockage du port qui passera de 7 mille EVP à 20 mille puisque nous serons capables d’empiler 5 étages de conteneurs au lieu de 3 actuellement. Quant aux conteneurs frigorifiques, ils vont pouvoir profiter d’une nouvelle plateforme intelligente qui va permettre de contrôler à distance la température de chaque conteneur.
Comment comptez-vous fluidifier le flux au port? Nous allons également installé un système Smart Gate qui va permettre la gestion automatisée du flux des camions entrant et sortant. En effet, il nous sera possible de collecter à distance toutes les informations nécessaires sur les véhicules accédant au port : immatriculation du camion, numéro du conteneur et son état, etc. Ces camions ne vont plus perdre des heures à la recherche d’un conteneur parmi les 12 mille qui occupent actuellement le port. Grâce au système de gestion de terminaux (TOS) que nous allons mettre en place et à la localisation par GPS qu’il offre, il nous sera possible de guider électroniquement les camions jusqu’au conteneur à déplacer. Cerise sur le gâteau: le paiement peut se faire en ligne avant même que le camion n’arrive au portail. La bonne nouvelle est que la première tranche de ce système sera fonctionnelle dans les jours à venir. Le contrôle de tous ces systèmes va être centralisé dans une même salle de contrôle, elle aussi en cours de préparation. À partir de ce centre nerveux, nous allons même pouvoir gérer le déplacement des conteneurs : les appareils de manutention ne vont pouvoir déplacer que les conteneurs qui leur ont été indiqués par le système de planification. De plus, nous pensons que ce système va mettre fin aux accusations infondées de traitements préférentiels. Bien évidemment, les ressources humaines sont fondamentales pour réussir cette nouvelle approche. Nous avons donc tenu à bien former nos agents pour leur permettre de tirer pleinement avantage de ces nouveaux outils.
Avez- vous également des projets pour améliorer la dématérialisation des procédures ? Nous avons déjà avancé sur ce volet. Je peux vous assurer que, mises à part quelques exceptions, toutes nos transactions se font électroniquement.
Comment expliquez-vous que le rendement de la STAM dans les autres ports soit supérieur à celui de Radès ? Il n’y a point de mystère à ce sujet: la cadence dans les autres ports du pays est nettement inférieure à celle de Radès. Dans les autres ports, nous avons le temps nécessaire pour effectuer les opérations de maintenance préventive et curative sur le matériel, ce qui n’est pas le cas à Radès. De plus, la surcharge des conteneurs déposés sur les quais de Radès fait que les opérations de manutention ne se font pas dans les meilleures conditions.