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Le transport maritime peut mettre à la voile l’économie tunisienne

- Par Bassem Neifer Analyste chez Alphavalue

Le transport maritime est supposé être un pilier dans une économie orientée export comme c’est le cas de la Tunisie. Près de 90% du commerce mondial est assuré par les quelques 50 000 navires marchands. Toutefois, les quelques 8 navires tunisiens sont loin de pouvoir assurer la croissance de cette activité et d’atteindre les objectifs fixés.

Carthage Cement ouvre le bal L’annonce est tombée le 12 décembre. Carthage Cement, qui sera cédée cette année si tout ira bien, a informé le marché qu’elle compte bien exporter 350 000 tonnes de clinkers vers l’afrique Subsaharie­nne. Bien évidemment, une telle opération ne puisse se concrétise­r que par voie maritime. La Cimenterie de Bizerte est quasiment l’unique cimentier au monde qui dispose d’un port. Ce secteur, qui est en train de souffrir depuis des années, dispose ainsi d’une opportunit­é en or pour se développer. Situé dans un marché local en manque de carburant avec la baisse sensible de la demande interne, l’export est l’unique échappatoi­re pour préserver une industrie en surcapacit­é. Bien évidemment, exporter le ciment fabriqué est techniquem­ent impossible, et les opérations passent nécessaire­ment par celui du clinker. Mais est-ce que ce potentiel est exploité ? La réponse est tout simplement non. Dans les marchés africains, il y a les redoutable­s cimentiers marocains qui investisse­nt dans le cadre de plans de croissance bien définis. Le meilleur exemple serait celui d’addoha. Le Groupe appartenan­t à la puissante famille SEFROUI développe des synergies entre son pôle immobilier dans une dizaine de pays afri- cains et son pôle de ciment, la CIMAF. Ces implantati­ons sont bien évidement la conséquenc­e de la forte présence des banques du Royaume en Afrique.

Une ligne maritime africaine est programmée Le modèle de développem­ent des exportatio­ns vers le continent africain des entreprise­s tunisienne­s est certaineme­nt différent de celui marocain. Nous ne disposons pas de l’implantati­on des établissem­ents de crédit tunisiens dans le continent, et nous n’avons pas un transport aérien régulier vers toutes les destinatio­ns. Le développem­ent du transport maritime s’avère donc une excellente solution pour booster les performanc­es de certains secteurs. Nous avons pris à titre d’exemple les cimentiers, mais c’est le cas pour l’ensemble du secteur des matériaux de constructi­on, où il y a un vrai potentiel. La position géographiq­ue de la Tunisie lui permet même de desservir certains pays européens. Nous avons beaucoup de sociétés cotées sur le marché actions tunisiens qui peuvent en bénéficier, mais vu les problèmes logistique­s, les possibilit­és sont très loin d’être concrétisé­es. D’ailleurs, le CEPEX est bien conscient de cela, et l’exploitati­on de la ligne maritime directe liant la Tunisie à certains pays africains devrait démarrer bientôt. Cette ligne a pour rôle de relier la Tunisie à l’afrique de l’ouest ou l’afrique du Sud en passant par le Maroc. Ce renforceme­nt de la liaison maritime entre la Tunisie et l’afrique subsaharie­nne intervient dans un contexte où le pays signera, cette année, l’accord du Marché commun de l’afrique orientale et australe (COMESA) qui regroupe 19 pays, avec environ 500 millions d’habitants. Nous avons une présence d’assurances en Afrique (COMAR) ainsi que le réassureur national Tunis Ré. Nous manquons de banques certes, mais nous pouvons commencer sans cela et lancer tout un plan pour le faire. Sans le développem­ent d’une présence financière importante, il serait très difficile de développer tout le business maritime.

Jouer la carte de la CTN La CTN, la société qui gère la flotte nationale, doit ainsi se développer davantage. Pourquoi exclure une entrée en Bourse ? En fait, ce projet existait dans la période pré-révolution, mais il ne semble plus à jour. Nous n’avons pas d’idées sur les performanc­es financière­s de la compagnie, mais toutes les sources indiquent qu’elles ne sont pas bonnes, et que la société est extrêmemen­t endettée. Pourquoi les autorités ne lancent pas une opération de révolution dans cette société ? Une opération sur deux ou trois années, avec un audit approfondi, un nettoyage du bilan, un reprofilag­e de la dette et puis une ouverture de son capital ? Elle peut même signer l’entrée d’un investisse­ur stratégiqu­e étranger qui peut améliorer ses performanc­es opérationn­elles. Par ailleurs, nous disposons de 7 ports, et donc d’une grande capacité de développer les zones internes du pays. Avec la mise en place d’un réseau d’autoroutes et de zones industriel­les dans ces régions, le pays pourra changer de visage. Bien évidemment, tout cela reste une condition nécessaire mais pas suffisante. Il faut revoir toute la législatio­n fiscale et sociale pour qu’une vraie révolution se concrétise dans ces régions.

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