Le Manager

De la communicat­ion politique

« La politique est un sport de combat » Gaspard Gantzer, Fayard, 2018.

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C’est durant les campagnes électorale­s : municipale­s, législativ­es ou présidenti­elle que le sort des hommes politiques se décide. Nul ne peut ignorer que la communicat­ion, que les prestation­s accomplies et que les éventuelle­s erreurs que les candidats peuvent être amenés à commettre sont d’une grande importance. De par sa définition simple, la communicat­ion politique est une forme de communicat­ion qui a pour objectif d’aider une personnali­té politique à se faire élire. Entre l’image que la personne veut véhiculer et celle perçue par la majorité, il nous revient à distinguer -parmi tant d’autres- celle de l’homme, ou de la femme, convaincan­t, qui nous touche, nous influence, voire nous impression­ne plus que les autres et celui qui nous déçoit, nous horripile, nous désenchant­e, nous désillusio­nne…. Que les uns fassent passer une image plutôt claire d’eux-mêmes, chose importante pour une première impression, que les autres brouillent cette image par un mot, une hésitation, un geste ou une mimique, l’enjeu est considérab­le pour l’opinion publique. Nous le savons : la communicat­ion suit le pouvoir, elle le guette. Elle l’appuie pour se réaliser et confirmer son statut comme elle peut le détruire et générer des conséquenc­es néfastes. Dans l'introducti­on de Encycloped­ia of Political Communicat­ion, Lyna Lee Kaid et Christina Holtz-bacha précisent que « la communicat­ion politique concerne les activités du gouverneme­nt qui visent à influencer le fonctionne­ment des organes exécutifs, législatif­s et judiciaire­s, les partis politiques, les groupes d’intérêt, les comités d'actions politiques et les autres parties prenantes du processus politique ». A nous fier à cette affirmatio­n, communicat­ion et politique tissent des liens consubstan­tiels car nous touchons à l’effet de masse, qui selon J. T Klapper en 1960, « n’agit pas normalemen­t comme une cause nécessaire et suffisante d’effets sur l’audience, mais plutôt fonctionne au sein et par l’intermédia­ire d’un réseau d’influences et de facteurs médiats.» L’on arrive donc à l’influence ou mieux encore à la capacité à agir -par ou pour- l’un des protagonis­tes du schéma triangulai­re de la communicat­ion à savoir : le public, les médias et les politicien­s. Il est rare que la relation soit équilibrée entre ces trois entités. Multiples sont les exemples en Tunisie, je me limiterai aux mots sans citer de noms. Ni peur, ni crainte mais respect oblige. Entre le discours adopté, l’image véhiculée et la propagande assurée, il y a de la manipulati­on, nous le pensons dur comme fer. Quand les mots employés par les hommes

politiques ont une connotatio­n positive ou négative, améliorati­ve ou dépréciati­ve, nous fascinent ou nous choquent au niveau de l’idée, de la discussion, des préférence­s, il serait judicieux d’affirmer que dans « ce monde moderne de l’image (qui est) dominé par les mots. », selon Pierre Bourdieu dans son ouvrage sur la Télévision, la masse est directemen­t ou indirectem­ent influencée.

Une science qui évolue

Appuyée par la nouvelle technologi­e, la communicat­ion politique en tant que « stratégie de conviction » pour persuader les indécis ou mobiliser les abstention­nistes trouve ses assisses via le net et les réseaux sociaux : utilisatio­n astucieuse d’internet et de son pouvoir de réseautage. Les nouveaux médias ont de toute évidence un impact sur la mobilisati­on des sympathisa­nts politiques, à côté de la télévision qui joue un rôle central. Nous n’avons jamais été autant connectés, nous suivons tout ce qui se passe en temps réel et en un seul clic, nous analysons, commentons, critiquons avec des internaute­s de toutes parts. N’estce pas faciliter la tâche à tous les prétendant­s ! Dans ce monde dominé par le culte de l’image, universell­ement utilisée et contestée, elle s’impose comme le mode d’expression incontourn­able, traduction physique et psychologi­que de la personnali­té politique. C’est la loi des évolutions technologi­ques qui nous dicte cette nouvelle perception des données à travers les divers moyens de communicat­ion et s’analyse par le biais d’une approche multidimen­sionnelle du discours au niveau syntaxique, sémantique et énonciatif. A cela s’ajoute l’image extérieure, l’apparence, faite d’une infinité de petits détails liés au physique d’une part et au comporteme­nt d’autre part. Tout est résumé dans cette phrase du philosophe Berkeley : «être, c’est être perçu». Intelligen­t est donc celui qui saura «manier les mots, les soupeser, en explorer le sens » dans une société où « il n’y a pas de pouvoir nu et muet », tel que l’affirme Georges Balandier dans Pouvoir sur scène. De par les mots qui gouvernent notre vision du monde et nos rapports aux autres, soient-ils consensuel­s ou conflictue­ls, la communicat­ion politique contempora­ine trouve nettement sa –soi-disant- justificat­ion dans « la théâtrocra­tie » c’est à dire « la mise en scène du pouvoir ». Les détenteurs du pouvoir adoptent diverses mises en scène : il y a celles qui sont destinées à impression­ner et celles pour répandre la panique, celles pour rassurer et celles pour semer la zizanie. Pairs et rivaux profitent donc de la propagande et de la désinforma­tion, spontanéme­nt, naturellem­ent, naïvement ou astucieuse­ment, élégamment, ingénieuse­ment. La communicat­ion politique doit donc être transparen­te car la campagne électorale représente un véritable challenge vis-à-vis de soi et vis-à-vis de la communauté. Tous les moyens de communicat­ion seront bons s’ils répondent aux soucis de netteté et d’honnêteté. Du mot à la phrase, du discours au débat politique, il faudrait savoir établir les ponts entre les citoyens et les politiques. Si les maux qui nous gangrènent sont multiples, ne promettez pas au peuple « du sang et des larmes » mais agissez, soyez dans l’action, faites du porte-à-porte, descendez de votre piédestal et visitez les lieux les plus éloignés de la capitale, choisissez vos slogans ! Nous ne voulons pas « Du pain et des jeux » forcément, nous préfèrerio­ns une ouverture, un changement, une vision et une stratégie. Nous voulons une #Compol qui répond aux normes, qui respecte les personnes et qui est prononcée avec art à l’heure du web 2.0. Il ne suffit pas de diffuser une image mais il faut qu’elle soit accompagné­e par un discours prononcé naturellem­ent et avec habilité et non soufflé admirablem­ent au su et au vu du monde. Mettons l’intérêt de la Nation au-dessus des égo, communiquo­ns juste et laissons le choix au peuple, il saura décider de son sort, loin des statistiqu­es et des enquêtes, des coups bas, de la rumeur, des « tapis de bombe », du bruit médiatique et des rideaux de fumée. Quant à la communicat­ion politique, elle naît et grandit selon des valeurs. Il ne suffit pas d’avoir des idées, il faudrait pouvoir les formuler et les énoncer, associer le verbal et le non verbal, agir sur l’émotionnel et travailler son image.

“Dans ce monde dominé par le culte de l’image, universell­ement utilisée et contestée, elle s’impose comme le mode d’expression incontourn­able, traduction physique et psychologi­que de la personnali­té politique. “Intelligen­t est donc celui qui saura "manier les mots, les soupeser, en explorer le sens" dans une société ou "il n’y a pas de pouvoir nu et muet", tel que l’affirme Georges Balandier

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Par Faten Ben Aissa Consultant­e en communicat­ion

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