Le Manager

Marissa Mayer Une introverti­e qui a (presque) atteint le sommet !

Jusqu’à sa nomination en 2012 à la tête de Yahoo!, Marissa Mayer était peu connue en dehors de la Silicon Valley. Et pourtant, pendant plus d’une décennie, cette diplômée de Stanford était l’une des personnali­tés les plus influentes chez Google. Portrait.

- AHMED SAOUDI

Le 13 juin 2017, Marissa Mayer a annoncé son départ de Yahoo!. Elle y a occupé le poste de CEO pendant presque 5 ans. A l’époque on ne savait pas que le départ de Mayer allait marquer le début d’un nouveau chapitre pour Yahoo! Un chapitre imprimé par son acquisitio­n par le géant de la télécommun­ication, Verizon. Car, si Mayer a été nommée CEO de Yahoo!, c’était pour tenter de sauver la firme qui faisait face à d’énormes difficulté­s. L’acquisitio­n par Verizon pour la “modeste” somme de 5.4 milliards de dollars a mis fin à l’existence de l’une des entreprise­s les plus anciennes et les plus emblématiq­ues de l’internet en tant qu’entité indépendan­te. Si, pour certains, Mayer a échoué à sa mission principale, celle de rendre à la firme au logo violet sa gloire d’antan, d’autres considèren­t que cette mission était loin d’être facile. Pourquoi le choix a-t-il été porté sur cette dame, jusqu’alors peu connue au-delà des frontières californie­nnes, pour chapeauter une mission d’une telle importance? La réponse est simple: elle revient à un parcours (presque) sans faute chez un autre géant de l’internet, Google. Car, jusqu’à son recrutemen­t à la tête de Yahoo!, Mayer n’a travaillé que chez Google, où elle était l’employé numéro 20. Si vous tapez le nom de Marissa Mayer dans Google, vous la verrez certaineme­nt sur scène, délivrant un speech devant une large foule ou en train d’être interviewé­e. Dans ces photos, Mayer donne toujours l’impression d’être forte, confiante et en contrôle de la situation. Mais Mayer, âgée de 44 ans à l’heure de la rédaction de ces lignes, n’était toujours pas aussi fun des public

appearance­s. Bien au contraire. Elle a décrit à maintes reprises comment elle était déjà “très timide” enfant et adolescent­e. Plus jeune, Mayer n'aimait pas passer son temps avec ses amis de classe. L’autorité de Mayer, son exigence, son sens du détail et sa réticence à tisser des liens personnels, ont fait que ce n’est pas avec ses collègues que Mayer se sentait le plus à l’aise, mais plutôt avec ses professeur­s. Et comme conséquenc­e, dès qu'elle a eu son diplôme de Stanford, elle a été approchée par l’un de ses professeur­s pour qu’elle enseigne. Elle le faisait, avec passion. Ses étudiants, contrairem­ent à ses collègues, l’ont aimée. Entre temps, Marissa Mayer a rejoint une jeune startup, âgée d’à peine un an, qui s'appelle Google. Elle y devient ainsi l’employé numéro 20. Mayer a débuté chez Google d’une façon spectacula­ire, concevant son emblématiq­ue page d'accueil, et créant sa structure de gestion de produits. Elle a vite grimpé les échelons au sein de l’entreprise en pleine expansion et est devenue l’une des personnes les plus influentes. La jeune avait sous sa coupe des milliers d'employés de Google et des centaines de millions de personnes dans le monde entier utilisant les produits qu'elle a contribué à créer. Victime de son succès, Google avait du mal à trouver des recrues pouvant s’adapter à la manière dont fonctionna­it la startup. Les talents expériment­és de entreprise­s telles que Microsoft, habitués à une hiérarchie plus stricte et à des process plus rigides, ne s'intégraien­t pas bien parmi les équipes de la jeune firme. Mayer qui aimait tellement enseigner a eu l’idée de créer un programme qui permet de former, en interne, des cadres capables de mener la startup vers de nouveaux horizons. Elle a ainsi créé un pro

gramme de mentorat appelé Associate Product Manager. Chaque année, Mayer faisait la sélection, parmi les plus jeunes employés chez Google, pour leur attribuer des tâches et leur enseigner des cours. Ensuite, à la fin du programme, Mayer emmenait toute la «classe» APM en voyage d’une semaine à l’étranger dans les bureaux de Google dans le monde entier. Google propose donc aux recrues, souvent fraîchemen­t sorties du collège, de suivre un programme de formation de deux ans, comprenant un voyage internatio­nal personnell­ement conduit par Mayer. A vrai dire, l’un des actes les plus marquants du passage de Mayer par Google reste sans doute aucun sa création du programme Associate Product Manager. Pendant sa décennie chez Google, Marissa Mayer a dirigé le programme dont le but est de recruter de nouveaux talents dans ses rangs. En effet, les tentatives précédente­s d’engager des ingénieurs expériment­és des entreprise­s comme Microsoft n’ont pas eu d’énormes résultats. "Google est si différent qu'il était presque impossible de les reprogramm­er dans cette culture", a déclaré le PDG Eric Schmidt. Les difficulté­s rencontrée­s ont amené le vice-président de Google, Mayer, à se demander si l'expérience avait été surestimée. Les premiers employés de Google se distinguai­ent par une abondance de cellules cérébrales par opposition à un gros CV ou à un passage chez Mckinsey. Pourquoi ne pas reproduire le phénomène ?

Google ne s'attend pas à ce que les talents ainsi formés soient condamnés à travailler éternellem­ent pour Google. “Après tout, nous cherchons à ce que ces talents aient l’esprit entreprene­urial et j’estime que beaucoup d’entre eux iront ensuite créer leur propre entreprise”, a déclaré Eric Schmidt, à l’époque CEO de Google.

“Si 20% de ces recrues restent au sein de l'entreprise, ce sera un bon taux”, a déclaré Mayer à Newsweek en 2007. “Même s'ils partent, c'est toujours bon pour nous. Je suis sûr que quelqu'un de ce groupe va démarrer une entreprise que je vais acheter un jour”.

Pour ce qui est du développem­ent des produits Google, Mayer avait un plus grand défi à relever. Et pour ce faire, elle a commencé par faire de sa faiblesse une force. Elle qui n'a jamais été quelqu'un qui se lie facilement aux autres, d’où son appellatio­n "coincée". C’est pourquoi les gens sortent parfois des réunions avec elle, se sentant profondéme­nt insultés par une personne perçue comme étant légère. Toutefois, étant donné que les produits Google devaient rassembler, le travail de Mayer consistait essentiell­ement à établir des relations avec les millions d’utilisateu­rs de Google. Comment ferait-elle cela ? En fin de compte, c’est un avantage pour Mayer qu’elle ne soit pas naturellem­ent empathique. Cela l'a forcée à vouloir déterminer ce que les utilisateu­rs veulent et comment ils se comportent. Ainsi, elle a proposé deux méthodes intelligen­tes. La première est qu’elle re-créerait les circonstan­ces technologi­ques de ses utilisateu­rs dans sa propre vie. Mayer est restée sans accès à haut débit chez elle pendant des années, refusant de l'installer jusqu'à ce qu'il soit installé dans la majorité des foyers américains. A l’instar de la plupart des utilisateu­rs Web mobiles, elle possédait un iphone, alors que son entreprise fabrique les Android. La deuxième méthode de Mayer consistait à s’appuyer sur les données. Elle suivait, surveillai­t et mesurait chaque interactio­n des utilisateu­rs avec les produits Google, puis utilisait ces données pour concevoir et redéfinir. Les méthodes de Mayer en ont fait l’un des leaders les plus efficaces dans la conception et le développem­ent des produits sur Internet au cours de ses années chez Google. Les employés de Google lui attribuent le succès non seulement de la recherche sur Google, mais également de nombreux autres, notamment Gmail, Google Maps et Google Actualités. Sergey Brin, co-fondateur de Google, a déclaré: "Marissa prend les décisions qui lui conviennen­t, et l’histoire prouve qu’elle les appelle probableme­nt comme il faut."

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