Sonia MBAREK,
Celle qui mène sereinement la bataille de la culture !
« Connais-toi toi-même ». Socrate
Tunisiennes et Tunisiens l’ont connue en tant qu’artiste, une âme sereine et paisible, un esprit lumineux et une personnalité curieuse de tout ! Sonia Mbarek est politologue, ex-ministre, enseignante universitaire, chercheure et artiste interprète. Sélectionnée dernièrement par le prestigieux Collegium de Lyon en tant que chercheure enseignante en sciences politiques, Sonia Mbarek s’attèle à développer son projet d’étude consacré à la gouvernance culturelle, aux nouveaux acteurs et enjeux, tant au niveau national qu’au Maghreb, mais aussi dans une deuxième phase au Moyen-orient et en Afrique.
Un esprit lumineux
« L’ignorance mène à la peur, la peur mène à la haine, la haine conduit à la violence…». Ibn Rochd
Sonia Mbarek a suivi ses études au collège puis au lycée français Pierre Mendès France de TUNIS. Son doctorat brillamment obtenu porte sur : «Le statut du musicien en Tunisie, état des lieux de la politique musicale, approche sociologique.». Avant cela, elle a publié : « Le choc des civilisations chez Samuel P. Huntington, analyse et critique » lors de son DEA à la Faculté de droit et des sciences politiques de TUNIS (Université El Manar). Aujourd’hui, Sonia Mbarek est maître-assistante à l’institut supérieur de Musicologie de Tunis (ISMT), assurant des cours variés allant des «Droits de l’homme et Droits d’auteur », à la «Gestion des projets et des contrats artistiques », aux « Politiques publiques de la culture » et aux « Techniques d’interprétation vocales arabo-andalouses. ».
Un esprit curieux
«… Il est temps de comprendre davantage pour avoir moins peur». Marie Curie
Avant d’être ministre, Sonia Mbarek était à l’initiative de plusieurs projets, souvent en coordination avec d’autres représentants du monde académique. Certains marquent le processus de changement tels que le projet de loi sur le statut de l'artiste en Tunisie, mené avec un groupe de juristes experts ou encore la convention bilatérale entre le ministère de la Culture et le ministère de la Justice en vue de la protection et la promotion des droits culturels en milieu pénitentiaire (installation de bibliothèques, d’équipements et de salles de cinéma, etc.). « La culture dans toutes ses déclinaisons constitue à mon avis un enjeu majeur pour l’avenir de toute la région du grand
Maghreb. », précise-t-elle. D’autres projets étaient de sa propre initiative, en l’occurrence, en 2016 la nouvelle stratégie de gouvernance culturelle participative et solidaire, pour le développement et la valorisation des compétences nationales et régionales des institutions culturelles tunisiennes, établissant des passerelles de réflexion avec tous les acteurs du secteur artistique. Sonia était aussi à l’origine de l’actualisation de la législation pour une décentralisation culturelle effective (niveau institutionnel-équipements- moyens financiers-mise à niveau des agents culturels.). Elle a mis en place le projet des écoles culturelles pilotes en milieux défavorisés. Première école pilote en collaboration avec le ministère de l’education nationale et le ministère de la Jeunesse et des Sports à El Hrairya Mellassine. Soucieuse de l’avenir des arts plastiques, elle était derrière le projet de restauration et de numérisation de la grande collection d’art plastique tunisienne. Et ce ne sont pas ses seules distinctions. Sonia Mbarek est la première femme directrice du Festival international de Carthage entre 2014 et 2015.
Un esprit engagé
Sonia Mbarek croit que l’engagement est une mission de vie sur tous les plans : • Culturellement : pour la promotion de la culture tunisienne et ce, en étant membre de l’association des études internationales (1995-1998) et du comité exécutif de l’association de la Rachidia pour la musique classique (2002-2005).
• Socialement : ambassadrice de bonne volonté et membre de l’association tunisienne de lutte contre le cancer (2006-2008) -ministère de la Santé Publique.
• Politiquement : membre de l'observatoire tunisien de la transition démocratique. (2011- à ce jour).
• Scientifiquement : Chercheure invitée auprès du réseau des Instituts des études avancées, Collégium de Lyon, et associée au centre Max Weber de sociologie et à l’ecole normale supérieure (ENS)(2019-2020).
L’âme paisible entre euphorie et désillusions : Quid de la Révolution du jasmin ?
«Je suis totalement convaincue que nous sommes tous concernés par le processus de réinvention de la démocratisation tunisienne.»
Emue, Sonia Mbarek a vécu avec beaucoup d’admiration les premiers mois de la Révolution tunisienne. L’artiste nous confie: «un sentiment de fierté à voir tous ces jeunes mobilisés dans un premier temps à un niveau décentralisé, criant à cor et à cri : « le peuple veut la destitution du régime.» Mbarek ajoute : « Je me rappelle aussi cet élan de solidarité généralisée entre tous les Tunisiens grands et petits, pour protéger leur quartier, l’image extraordinaire et révélatrice d’un peuple uni, malgré sa diversité. Cette mobilisation générale je l’ai retrouvée en 2013 après les assassinats de Chokri Belaid et Mohamed Brahmi.». Le processus de démocratisation est en marche, pense Sonia Mbarek : d’abord parce que la première phase est celle de la transition politique avec l’organisation d’élections législatives et présidentielles libres mais cela n’a pas empêché la multiplication des ruptures sociales, culturelles et politiques, gangrénées par la montée du populisme, de l’abstention, et la persistance de la crise de représentativité et de leadership. Suite à son expérience en tant que ministre de la Culture, Sonia Mbarek s’exprime au sujet de la démocratisation en Tunisie qui se heurte à une confusion entre la mise en oeuvre de réformes démocratiques par le haut et la mise en pratique de la démocratie.
Quid de la transition démocratique ?
«Je reste optimiste et toujours passionnée et admirative de mon pays ».
Nous sommes dans une nouvelle phase faite de continuités et de ruptures. La tâche est très ardue, nous confie Sonia Mbarek, face à la complexité et à l’éclatement du paysage politique d’une part, et aux exigences fortes d’une population qui attend beaucoup d’un président qui devrait tenir ses promesses, d’autre part. Le processus de réinvention de la démocratisation tunisienne doit passer selon Sonia Mbarek par :
• L’assainissement de l’écosystème institutionnel en imposant l’application de la loi et la redevabilité de tous, gouvernants et gouvernés.
• Une nouvelle gouvernance multi-niveau qui permettrait d’associer les nouveaux acteurs (médias, activistes, société civile, etc.) et les intellectuels au niveau centralisé et surtout décentralisé dans la production d’une culture démocratique.
• Une révolution culturelle pour changer les pratiques et les mentalités, au niveau individuel et collectif, et pour apporter tout le sens et la puissance de la démocratie, en tant que pratique politique et sociale, en s’appuyant sur un socle de valeurs à partager.
• Valorisation de l’humain, du savoir, de la créativité, de l’innovation et du travail, toutes valeurs qui s’imposent d’elles-mêmes.
• Le renouvellement des répertoires d’action collective est nécessaire notamment au niveau du discours politique, des processus de mobilisation, du rôle des partis, et des mouvements citoyens dans la reconfiguration des modes d’engagement.
Une nouvelle voie
Sonia Mbarek a été sélectionnée pour un séjour scientifique (2019-2020) de quelques mois, et en tant que chercheure enseignante en sciences politiques, de l’université de TUNIS, par le réseau des instituts d’études avancées, le Collégium de Lyon, ainsi que le Centre Max Weber de Sociologie et l’ecole nationale supérieure de Lyon. Sonia Mbarek présentera dans ce cadre des conférences et des séminaires multiples en France autour de la politique culturelle tunisienne mais aussi et surtout autour de son projet de base : les politiques culturelles maghrébines, lancé d’abord en Tunisie à la Faculté de droit et de sciences politiques de TUNIS El Manar.
Une vision plus juste, plus équitable
« Je crois au potentiel humain culturel, économique et industriel maghrébin. »
Sonia Mbarek lutte à sa manière pour la mise en place d’une stratégie culturelle, sociale et inclusive. Avec un groupe d’experts internationaux et nationaux, l’artiste vient de finaliser une très importante étude sur les industries culturelles et créatives en Tunisie dans le cadre du projet « TFANEN ». Dans son dernier article intitulé : «Le consensus dans le discours politique tunisien depuis la révolution du 14 Janvier 2011». (Discours politique arabe : contraintes de traduction et de terminologie – Ouvrage Collectif –Nejmeddine Khalfallah, Héla Najjar, Livre broché – PUN Editions Universitaires de Lorraine – Octobre 2019), Sonia Mbarek affirme que la culture nous garantit un meilleur avenir : « la culture doit être considérée comme axe central du développement durable.».
Des lectures diverses
Amusée, l’artiste nous cite ses auteurs préférés : Jabran Khalil Jabran, Abou el Kacem Echebbi, Mnaouar Smadah, Abdelaziz Kacem, Yasmina Khadra, Edward Said, Hele Beji pour ne citer que ceux-là. De toutes ses lectures, The prophet, de Jabran Khalil Jabran et les Mondes de l’art de Howard Becker restent ses préférés. En sociologie politique, elle retient Howard Becker, Michel Foucault, Pierre Bourdieu, Mohamed Karrou, Hamadi Redissi, Yadh Ben Achour et Ali Mezgheni comme source d’inspiration.
Notre fierté
Aujourd’hui, Sonia Mbarek est reconnue en tant qu’artiste, Auteure- interprète de renommée internationale, avec plus de trente ans de carrière. Animant des Master-class et dirigeant des chorales et des concerts de chant arabo-andalous en Tunisie, Europe, Etatsunis, Monde Arabe (1990-2015), dans des lieux de mémoire comme le siège des Nations-unies à New York, The Kennedy Center à Washington, l’institut du monde Arabe à Paris, l’opéra royal-paris Versailles, le Siège de L’UNESCO à Paris, la Maison des cultures du monde de Berlin, Le théâtre des arts à Montréal, The Royal Opera House Muscat, l’opéra du Caire, de Damas, Maroc, Algérie, Suède, Roumanie, Suisse, Sonia Mbarek nous honore, en tant que femme tunisienne, par ses compétences ô combien nombreuses !