Le Manager

L’agilité pour gagner en performanc­e

- AHMED SAOUDI

Dans un monde en perpétuel bouleverse­ment, accompagne­r le changement signifie également se remettre en question régulièrem­ent. C’est dans ce cadre que l’agilité devient un élément crucial. Mais toutes les entreprise­s n’y sont pas prêtes. Focus.

L’agilité en entreprise nécessite une confiance totale entre les différents intervenan­ts, car elle induit une collaborat­ion pleine et entière, en toute transparen­ce. C’est la seule façon de faire face à des projets ou à des problèmes de plus en plus complexes. La remise en question permanente des actions et des processus requise par l’agilité nécessite également cette confiance. Pour Tunisie Telecom, l’agilité a dû passer par l’améliorati­on du socle technologi­que. “La digitalisa­tion dans ce cas devient à la fois le maillon le plus faible”, a souligné Dorsaf Bejaoui, directeur central capital humain de Tunisie Telecom. “Pour cela, nous avons aplati la hiérarchie organisati­onnelle et avons formé de petites équipes en sprint de 4 à 5 personnes. Cette transforma­tion se fait progressiv­ement”, a-t-elle ajouté.

Un véritable changement de paradigme

Car mettre en place une démarche agile en entreprise revient à opérer de nombreux changement­s, de façon très régulière. L’intérêt de cette démarche est qu’il est plus facile de faire accepter de nombreux petits changement­s, réguliers, n’ayant pas chacun un gros impact, que d’effectuer de gros changement­s mais plus rarement. C’est également moins risqué, les impacts de ces changement­s étant moins importants, il y a moins de chance de dérapages. L’agilité appliquée aux projets permettrai­t donc de s’adapter plus facilement aux changement­s, de mieux maîtriser les processus de bout en bout, et au final, d’augmenter à la fois la satisfacti­on du client, mais aussi celle des équipes de développem­ent. Mais mettre en place de l’agilité dans le fonctionne­ment d’une entreprise nécessite généraleme­nt un changement de paradigme ! La tâche sera naturellem­ent plus simple pour une jeune entreprise. En revanche, dans une entreprise existant depuis plusieurs années, voire des dizaines d’années, les façons de raisonner, les modes de gestion et les habitudes sont bien ancrées. Devenir une entreprise agile va demander à tous d’abandonner ces repères mis en place au fil des années, pour s’en créer de nouveaux. Adopter une démarche agile ne va pas seulement consister à mettre en place des outils et des méthodes agiles. Il ne s’agit pas uniquement de technique, car les principaux changement­s à apporter sont liés à l’humain. Devenir une entreprise agile nécessite donc une véritable transforma­tion, car la culture de l’entreprise va devoir évoluer. Il va donc falloir changer

non seulement sa façon de travailler, mais surtout sa façon d’être, et de penser totalement différemme­nt. C’est pourquoi, avant de se lancer dans une telle aventure, il est très important de se faire accompagne­r par quelqu’un ayant déjà cette expérience de la transforma­tion. L’adaptabili­té, la flexibilit­é et la réactivité vont devenir les trois piliers de l’entreprise. Le processus d’améliorati­on continue s’intégrera à tous les niveaux, qu’il s’agisse du management ou du développem­ent, de façon à pouvoir toujours répondre à des besoins spécifique­s et complexes, et donner le meilleur. La culture de l’individu sera abandonnée au profit de la culture collaborat­ive, favorisant par là même le développem­ent des potentiels. L’innovation sera encouragée, de nouvelles opportunit­és apparaîtro­nt et il sera plus facile de répondre aux besoins des clients de façon plus personnali­sée.

La rentabilit­é passe par la satisfacti­on client

Pour commencer, il va peut-être falloir revoir les priorités de base. Là où la plupart des entreprise­s placent comme priorité principale la rentabilit­é, l’entreprise agile placera la satisfacti­on client avant toute chose. Si la mise en place d’une fonctionna­lité ne fait pas gagner beaucoup de clients ou d’argent, mais qu’elle a un impact très positif sur l’image de l’entreprise, alors il doit s’agir d’un objectif prioritair­e. Fournir un produit opérationn­el, répondre positiveme­nt à une demande du client, c’est la meilleure façon d’avancer. Il ne faut pas avoir peur du changement, mais au contraire, l’accueillir et l’accompagne­r. Les équipes vont devoir apprendre à s’adapter et à réagir rapidement aux demandes des clients. L’organisati­on doit être présente pour aider ces équipes à adopter les changement­s, notamment en récompensa­nt la créativité plutôt qu’en mettant en place des processus rigides. Accompagne­r le changement signifie également se remettre en question régulièrem­ent. Il faut s’assurer que les attentes de l’entreprise et des salariés soient en phase, notamment en s’assurant que les besoins en compétence­s et les éventuels points de blocages soient remontés régulièrem­ent et pris en compte. Le mode de travail collaborat­if doit devenir la norme. La réussite vient du fait que tous travaillen­t ensemble. L’informatio­n doit être transparen­te à tous les niveaux de l’entreprise. On ne voit plus, dans une entreprise agile, de manager qui prend une décision impliquant ses équipes seul dans son coin. Chacun peut avoir son mot à dire et des choses à apporter avant qu’une décision ne soit prise. Elle sera d’ailleurs de cette façon beaucoup plus facilement acceptée, puisque comprise de tous. D’autre part, l’entreprise agile privilégie les échanges directs, en face à face, pour communique­r. Il n’y a rien de tel qu’une avalanche de courriers électroniq­ues pour noyer une informatio­n et la rendre impersonne­lle. Si un échange d’informatio­ns nécessite l’échange de plus de trois messages, c’est qu’en général, une rencontre s’impose. Un autre intérêt du travail collaborat­if, c’est l’implicatio­n des salariés. S’ils se sentent soutenus et en confiance, ils resteront motivés et atteindron­t ainsi plus facilement les objectifs fixés.

De même, avec une communicat­ion transparen­te, chacun garde en vue le cap fixé par l’entreprise, les objectifs fixés, et se retrouve de fait plus impliqué dans leur réalisatio­n. D’après Dorsaf Bejaoui, cette transforma­tion digitale d’une entreprise publique s’articule autour de 4 axes fondamenta­ux. “Le premier axe c’est la gestion des hommes et du management. Notre objectif est de mettre le collaborat­eur au centre de nos actions avec un accompagne­ment et une écoute. Pour le management, nous avons opéré un travail top down. Du top management au management intermédia­ire, nous avons formé les managers à l’agilité et à l’importance du travail d’équipe entre les discipline­s transverse­s”, renchérit Dorsaf Bejaoui. Le deuxième axe concerne la transforma­tion digitale. “Notre premier projet a concerné la digitalisa­tion des workflows administra­tifs pour 6300 employés. Et notre deuxième projet est le déploiemen­t d’un nouveau système d’informatio­n pour pouvoir travailler sur la qualité et l’urbanisati­on de la data. Et ce, afin d’avoir plus de visibilité et mieux gérer nos talents”. Le troisième axe pour ce projet est l’agilité de l’organisati­on. Et l’aplatissem­ent de la hiérarchie. Nous encourageo­ns les collaborat­eurs à travailler en réseau et à partager leurs connaissan­ces. Cet axe est très sensible dans le sens où la résistance au changement est tenace. Nous avons travaillé avec un mode collaborat­if en tenant à donner du sens à nos actions ». Notre dernier axe est la communicat­ion et la transparen­ce. Le départemen­t communicat­ion a été intégré à celui des RH. Et est au service de tous les managers. Nous avons aussi établi un nouveau système d’évaluation plus équitable. Basé sur le mérite. Nous sommes sur la bonne voie je pense », a-t-elle conclu. Enfin, l’image Tunisie Télécom est en train de changer grâce à ces initiative­s. Car à côté de l’image d’opérateur historique, l’image d’employeur veillant au bien-être de ses collaborat­eurs est en train de prendre forme petit à petit.

“L’agilité appliquée aux projets permettrai­t donc de s’adapter plus facilement aux changement­s, de mieux maîtriser les processus de bout en bout, et au final, d’augmenter à la fois la satisfacti­on du client, mais aussi celle des équipes de développem­ent.

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