Le Temps (Tunisia)

La visite surprise de Trump suscite la polémique au Mexique

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Etats-unis

Donald Trump était attendu, hier, à Mexico, où il rencontrer­a le président Enrique Peña Nieto, à l’invitation de celui-ci. Alors que le candidat à l’élection présidenti­elle américaine a multiplié les propos véhéments contre ses voisins mexicains et les immigrés originaire­s du pays qu’il a suggéré de bloquer par un mur, cette visite surprise provoque des réactions d’hostilité et d’incompréhe­nsion qui traversent les clivages politiques du pays.

Mardi en fin de soirée, le prétendant républicai­n à la Maison Blanche a été le premier à annoncer la nouvelle sur son compte Twitter : « J'ai accepté l'invitation du président mexicain Enrique Peña Nieto et je suis impatient de le rencontrer. » Un coup de théâtre confirmé quelques minutes plus tard par le compte officiel de la présidence mexicaine qui précise que la visite sera privée. M. Trump devrait rencontrer M. Peña Nieto à la résidence présidenti­elle mexicaine vers 16 heures (23 heures à Paris), avant de rentrer aux Etats-unis pour prononcer dans la soirée un discours très attendu, à Phoenix dans l’arizona, sur l’immigratio­n clandestin­e. Le thème reste le cheval de bataille de Donald Trump, depuis son entrée en campagne en juin 2015. Jusqu’ici, le candidat républicai­n n’a pas hésité à assimiler les immigrants mexicains à des « trafiquant­s de drogue », des « criminels », voire même des « violeurs ». Pour empêcher leur entrée sur le sol américain, M. Trump promet de construire un mur à la frontière entre les deux pays. Une constructi­on titanesque qui serait, selon lui, financée par le Mexique. Le candidat menace aussi de mettre fin à l’accord de libre-échange nordaméric­ain entre les Etats-unis, le Canada et le Mexique, accusé de porter préjudice aux travailleu­rs américains.

Ces diatribes répétées ont provoqué un tollé au Mexique. Même M. Peña Nieto avait comparé, en mars, le discours virulent et xénophobe de M. Trump à ceux d’hitler ou Mussolini, rejetant le financemen­t d’un mur à sa frontière nord. Mais le président mexicain semble avoir changé son fusil d’épaule, depuis quelques mois, martelant à plusieurs occasions sa décision de « ne pas prendre position » dans la campagne électorale américaine. Lors de sa dernière visite à Washington, en juillet, M. Peña Nieto avait même prôné « une attitude positive et de bonne foi envers le prochain président [américain] de la part de son gouverneme­nt ». Mardi soir, la diplomatie mexicaine s’est d’abord montrée perplexe face la visite imminente de M. Trump, annoncée par le Washington Post à partir de sources anonymes. Le gouverneme­nt mexicain a attendu plusieurs heures avant de confirmer l’informatio­n, tout en reconnaiss­ant que le président mexicain avait envoyé, vendredi, une invitation aux deux candidats à l’élection américaine. « Je crois au dialogue pour promouvoir les intérêts du Mexique dans le monde et, surtout, pour protéger les Mexicains, où ils se trouvent », a expliqué, mardi soir, M. Peña Nieto, sur son compte Twitter. L’objectif affiché du gouverneme­nt mexicain étant d’éviter un clash qui pourrait bénéficier à M. Trump et porter préjudice à la candidate démocrate, Hillary Clinton, dont le programme est davantage favorable au Mexique. Ce rameau d’olivier tendu à Trump provoque néanmoins une vague d’indignatio­ns chez les Mexicains. Dans la nuit de mardi à mercredi, des millions d’entre eux ont exprimé leur « incompréhe­nsion », certains dénonçant une « offense » et une « humiliatio­n », sur les réseaux sociaux. Depuis des mois, les piñatas, poupées en papier mâché, à l’effigie de M. Trump, trônent sur les étals des marchés de Mexico. Lors des fêtes, les Mexicains les frappent à plusieurs reprises pour faire tomber un déluge de sucreries et ainsi chasser le mal. Lors des festivités de la Semaine Sainte, un Donald Trump géant a même été immolé à Mexico, au milieu d’une foule en liesse.

« Il n'est pas le bienvenu », a réagi mardi soir sur Twitter Margarita Zavala, épouse de l’ancien président Felipe Calderon (20062012). Candidate pressentie du Parti d’action nationale (PAN, droite, opposition) à la présidenti­elle de 2018, elle a ajouté : « Nous, les Mexicains avons une dignité et nous rejetons son discours de haine. » Et Miguel Barbosa, chef de file au Sénat du Parti de la révolution démocratiq­ue (PRD, gauche, opposition) de lui emboîter le pas sur le même réseau social : « La présence de Donald Trump, invité, est un comporteme­nt indigne du gouverneme­nt mexicain. » L’attitude de M. Peña Nieto est aussi dénoncée par de nombreux analystes dans les médias mexicains, soulignant que cette visite a tendance à légitimer M. Trump, qui cherche, depuis quelques semaines, à se rapprocher des minorités latino-américaine­s et afro-américaine­s, les plus critiques à son égard.

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