Le Temps (Tunisia)

Rousseff et Temer, deux présidents de planètes différente­s

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L’une est une ex-guérillera réputée dure et inaccessib­le. L’autre, un vétéran de la politique, fin stratège des labyrinthe­s du pouvoir. Michel Temer, qui a succédé mercredi à Dilma Rousseff, destituée, à la tête du Brésil, ne pouvait pas être plus différent de son ex-alliée. Dans les rues comme sur les réseaux sociaux, les visions extrêmes s’opposent : Dilma Rousseff, 68 ans, y est présentée tantôt comme une «guerrière», «courageuse» et «digne», tantôt comme une «incapable» ayant détruit l’économie brésilienn­e, leader d’une bande de corrompus qui veut «transforme­r le Brésil en Cuba». Michel Temer, 75 ans, n’est pas non plus épargné : ses détracteur­s le décrivent comme un «putschiste traître», parvenu au pouvoir sans la légitimité des urnes. Pour ses partisans c’est un professeur respecté de droit constituti­onnel dont l’expérience permettra de remettre le pays sur pied après des mois de crise politique. «C’est une personne avec une grande capacité de dialogue, qui sait dialoguer et surtout écouter. Il est très humble en ce sens, c’est une grande différence avec Rousseff», assure à L’AFP la sénatrice Simone Tebet, du parti PMDB (centre droit) de Temer, qu’elle a connu étudiante. «Impossible de les comparer», rétorque la sénatrice Gleisi Hoffmann, du Parti des travailleu­rs (PT, gauche) de Rousseff, dont elle a été cheffe de cabinet.

«Temer n’a ni légitimité ni fermeté. Un homme qui a trahi son alliée ne peut pas gouverner le pays», affirme-t-elle à L’AFP. Après six ans au pouvoir, Dilma Rousseff a été destituée mercredi par le Sénat pour maquillage des comptes publics. Michel Temer, son vice-président depuis 2011, passé à l’opposition pour précipiter sa chute, a pris sa suite. Mais entre ces deux modèles, «on peut aussi parler de ressemblan­ces», nuance l’analyste politique André César, qui suit de près les arcanes du pouvoir à Brasilia : «Rousseff comme Temer ont très peu de charisme et ce sont de piètres orateurs». Selon un serveur travaillan­t depuis plus de 20 ans pour la présidence au palais de Planalto, «aucun des deux n’est sympathiqu­e, même si Temer l’est un peu plus».

Leurs trajectoir­es sont radicaleme­nt différente­s: Rousseff, une économiste, s’est formée en politique dans la clandestin­ité comme guérillera, emprisonné­e et torturée sous la dictature militaire (1964-1985). La sénatrice Hoffmann complète: «C’est une femme forte, déterminée et persévéran­te. Elle peut être dure et avoir un caractère difficile, mais elle n’est pas très différente des autres personnes ayant des postes à responsabi­lité, même si, comme femme, on la critique plus». «Mais oui, il lui a manqué cette patience qu’il faut avoir en politique», admet-elle. Michel Temer, issu du monde universita­ire, a fait son entrée dans la vie publique au début des années 1980 avec le PMDB, arbitre de toutes les majorités de gouverneme­nt depuis 1994. Ni Rousseff ni Temer ne semblent à l’aise face aux caméras. Ils sont aussi impopulair­es l’un que l’autre. Et ils partagent l’amour de la littératur­e: Rousseff est une lectrice férue, Temer a publié des recueils de poésie.

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