L'action culturelle de Laura Baeza
Tunisie-union européenne
Si la participation des ambassades de plusieurs pays européens à la vie culturelle en Tunisie est un fait indéniable, celle de la délégation de l'union européenne constitue un fait relativement nouveau qui s'est fortement renforcé au cours du mandat de l'ambassadeur Laura Baeza.
En effet, la délégation de l'union européenne a surtout axé sa présence culturelle des vingt dernières années autour des Journées du cinéma européen (JCE), devenues aujourd'hui un élément incontournable du calendrier culturel. Ces journées ont connu plusieurs développements et drainent désormais un public important dans de nombreuses villes tunisiennes.
Partenariat euroméditerranéen et synergies européennes
De fait, la consolidation et la systématisation de la décentralisation des JCE reviennent clairement à Laura Baeza, ambassadeur et chef de la délégation de l'union européenne en Tunisie qui achève en septembre 2016 un mandat de quatre années en Tunisie.
Spécialiste du Maghreb, pleinement impliquée dans les stratégies de partenariat euroméditerranéen, Laura Baeza a effectué son mandat en Tunisie après avoir mené une mission de quatre ans en Algérie. Bien entendu, les volets économique et politique ont dominé son mandat; toutefois, malgré les difficultés de tous ordres de ces quatre dernières années en Tunisie, l'ambassadeur Baeza est parvenue à renforcer le volet culturel de la coopération entre la Tunisie et l'union européenne.
Plusieurs réalisations sont ainsi à mettre à l'actif de son action culturelle à commencer par la mise en place d'un partenariat culturel qui devrait prochainement commencer à donner ses fruits. Il s'agit en l'occurence d'un vaste projet de modernisation institutionnelle et de formation technique qui a vu le jour en partenariat avec le ministère de la Culture. En ce sens, le mandat de Laura Baeza en Tunisie aura aussi été celui de la clarification des missions de L'EUNIC. Cet acronyme en langue anglaise signifie "European Union National Institutes for Culture" et pourrait se traduire par "Réseau des instituts culturels nationaux européens". Jusqu'à une date récente, EUNIC manquait de visibilité et ne parvenait pas à s'installer durablement dans le paysage culturel, avec surtout un public qui n'arrivait pas à pleinement comprendre la mission de cette institution.
Désormais, cet écueil semble dépassé et EUNIC organisera par exemple le 26 septembre prochain la nouvelle édition de la Journée européenne des Langues avec la participation des instituts et services culturels de plusieurs pays.
Des manifestations régulières, des publications remarquables
Sur un autre plan, l'action culturelle de Laura Baeza se sera également distinguée par deux autres projets qu'elle a portés à bout de bras et qui laisseront des traces durables car tous deux consignés dans des ouvrages de référence.
Il s'agit en premier lieu du "Projet Sfax" et du "Projet Kairouan". Initiés en 2013 avec le succès de la première rencontre euromaghrébine des photographes, ces deux projets articulent photographie et mémoire architecturale.
C'est ainsi qu'est né le Projet Sfax qui en 2013 avait réuni des photographes dans la capitale du sud pour y installer leurs dispositifs et aller à la rencontre des vécus et des monuments. L'expérience fut un succès et déboucha sur la publication d'un livre, véritable document qui saisit la spécificité sfaxienne en mouvement et exprime les regards des photographes sur cette ville. Deux années plus tard, en mai 2015, une seconde rencontre photographique avait lieu avec pour thème Kairouan et réunissait une nouvelle fois près d'une trentaine de photographes d'europe et du Maghreb. Le Projet Kairouan était né et débouchera aussi sur un ouvrage exhaustif conjuguant le talent des photographes et les beautés monumentales ou secrètes de la capitale spirituelle de la Tunisie, également première ville musulmane dans le Maghreb.
Souhaitons que le départ prochain de Laura Baeza ne coincide pas avec l'arrêt de cette dynamique qui, selon un rythme biennal, devrait ouvrir la voie à une troisième rencontre des photographes en 2017. Aussi bien les expositions consécutives à ces rencontres que les ouvrages publiés par la suite sont des témoignages éloquents du succès de cette initiative qui mériterait de se poursuivre.
Enfin, l'engagement culturel de Laura Baeza a aussi été à l'origine d'une rencontre euromaghrébine annuelle des écrivains qui s'est traduite par la publication d'ouvrages documentaires ayant grosso modo valeur d'actes de colloques.
Des initiatives à installer dans la durée
Initiées dans la médina de Tunis, ces rencontres se sont poursuivies à Sidi Bou Said et les ouvrages publiés s'ils soulignent l'ambition louable des promoteurs témoignent aussi de la faiblesse des échanges et de la notoriété relative des participants. On dirait, à lire l'ouvrage relatif à la troisième rencontre, des textes écrits à la va-vite, dans un style sténographique, comme s'il s'agissait des minutes d'un quelconque procès-verbal et non de communications d'écrivains.
Il n'en reste pas moins que le document existe bel et bien et qu'avec ses qualités et ses défauts, il met en exergue le bien-fondé d'une politique de publication qui permet de préserver la mémoire d'une action exemplaire tout en motivant sa reconduite dans les années à venir.
Au fil des quatre dernières années, Laura Baeza aura installé dans la durée plusieurs initiatives qui sont venues renforcer l'action culturelle européenne en Tunisie et, surtout, stimuler les échanges artistiques et intellectuels en mettant en réseau les acteurs culturels d'europe et du Maghreb.
Hatem BOURIAL