L’état d’urgence prolongé de trois mois
La Turquie va prolonger de trois mois l’état d’urgence imposé après le coup d’etat raté du 15 juillet et poursuivre plus avant la vague de purges qui a déferlé sur le pays. « Nous avons décidé de reconduire l’état d’urgence pour quatre-vingt-dix jours dans le cadre de la lutte contre les organisations terroristes », a déclaréle vice-premier ministre Numan Kurtulmus.
Par « organisations terroristes », il faut considérer la confrérie religieuse de l’imam Fethullah Gülen, tenue pour responsable de la tentative de putsch, ainsi que le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK, interdit en Turquie), en lutte contre Ankara depuis 1984.
Instauré pour trois mois quelques jours après le coup d’etat raté du 15 juillet, l’état d’urgence est en vigueur jusqu’au 19 octobre. Il permet au gouvernement de diriger par décrets, sans l’aval du Parlement, et de jouir de pouvoir coercitifs illimités pour mener les purges.
Dans le cadre de l’état d’exception, la durée de la garde à vue a été portée à trente jours, dont cinq jours au secret, sans accès à un avocat. Non contestables devant la Cour constitutionnelle, ces décrets ont permis jusqu’ici l’inculpation de 32 000 personnes, l’éviction de 93 000 fonctionnaires et la confiscation des biens de centaines d’hommes d’affaires.
Le 28 septembre, le Conseil national de sécurité, réuni à Ankara sous la houlette du président, Recep Tayyip Erdogan, avait recommandé la reconduction de l’état d’urgence pour une durée de trois mois à partir du 19 octobre. Lors de son séjour à New York dans le cadre de l’assemblée générale des Nations unies, M. Erdogan avait évoqué une reconduction pour une durée d’un an. A l’occasion d’une rencontre avec des organisations non gouvernementales turques, actives sur le sol américain, le numéro un turc avait reconnu que son gouvernement avait, par le passé, « donné des terres et des propriétés » aux adeptes de l’imam Gülen. C’est notamment grâce à ses liens privilégiés avec le Parti de la justice et du développement (AKP, islamo-conservateur) que la confrérie secrète a réussi à infiltrer les rouages de l’etat turc. « Aurait-il été possible pour nous de reprendre ces propriétés dans des circonstances normales ? Grâce à l’état d’urgence, il a été possible de saisir les biens de cette bande de traîtres », avait-il expliqué.